POUR BIEN GÉRER SON PATRIMOINE. IL FAUT UTILISER LES BONS OUTILS FINANCIERS. CE DEUXIÈME TEXTE D'UNE SÉRIE DE 12 PORTE SUR L'ÉPARGNE. LA SEMAINE PROCHAINE, ON ABORDERA DES TRUCS POUR BIEN GÉRER SON CRÉDIT.

Épargnez-vous 10% de votre revenu annuel brut, comme le suggèrent les planificateurs financiers? Si c'est le cas, vous faites figure d'exception, car au Québec, le taux d'épargne était aussi bas que 4,4% l'an dernier.

En 1976, il était de 15,3%, et il n'a cessé de chuter depuis. Une étude du Mouvement Desjardins estime qu'il ne sera que de 1,2% pour l'année en cours. Et pendant ce temps, le taux d'endettement moyen n'a cessé d'augmenter, passant de 54,5% en 1976 à 113,6% en 2008.

Pourtant, l'épargne est la clé des finances personnelles. «C'est ce qui donne une marge de manoeuvre nous permettant de réaliser nos objectifs», dit Jean-Rémi Deschênes, responsable Affaires, gestion des avoirs au Mouvement Desjardins.

Pourquoi avons-nous autant de mal à épargner? «Une des explications, c'est que le mot budget fait peur, dit M. Deschênes. Les gens associent le budget à une diminution de leur train de vie.»

De plus, nous sommes assaillis de toutes parts par la société de consommation. «On se crée des besoins artificiels, dit Dominique Gervais, conseillère budgétaire chez Option consommateurs. Le crédit a tellement été facile que les gens se sont laissé embarquer: achetez maintenant, payez plus tard.»

Se payer en premier

Pour quelqu'un qui gagne 40 000$ par année, en épargner 10%, soit 4000$, peut paraître décourageant, selon Jocelyne Houle-LeSarge, directrice générale et secrétaire de l'Institut québécois de planification financière.

«Si on le ramène sur une base mensuelle ou hebdomadaire, c'est plus facile, dit-elle. Chaque mois, on paye notre loyer et nos comptes, mais on oublie de se payer soi-même. Le meilleur moyen d'acquérir cette bonne habitude est d'avoir recours à l'épargne automatique, en faisant prélever un montant directement sur son salaire ou dans son compte bancaire.»

Soyez stratégique

Qui paye ses dettes s'enrichit, dit le proverbe. Si vous traînez des dettes sur une carte de crédit avec des taux d'intérêt à 20%, mieux vaut payer celles-ci le plus vite possible avant d'accumuler de l'épargne, conseille Dominique Gervais.

Ensuite vous pourrez songer à mettre de l'argent de côté dans un compte d'épargne libre d'impôt (CELI) ou un REER.

Lequel des deux faut-il prioriser? Cela dépend beaucoup de votre situation, de votre revenu et de vos obligations financières, dit Dominique Vincent, gestionnaire de portefeuille chez MacDougall, MacDougall & MacTier.

«Il est certain que c'est bien de maximiser ses REER, mais il faut prendre en considération la réalité du moment», dit-elle.

Si vous gagnez un très bon salaire et que votre taux marginal d'imposition est élevé, maximisez d'abord vos contributions REER pour obtenir des remboursements d'impôt importants avant de songer au CELI.

Par contre, si vous commencez à travailler et que vous avez d'autres projets à plus court terme, ou que vous souhaitez bâtir un petit fonds pour faire face aux imprévus, le CELI est tout indiqué. Il permet d'avoir accès à vos liquidités et de ne pas vous sentir coincé en cas d'urgence.

Toutefois, si vous souhaitez acquérir une maison, le REER est préférable puisqu'il sera possible de l'utiliser dans le cadre d'un Régime d'accès à la propriété.

«Quand on pense épargne, il est important de respecter le profil de chaque personne, dit Dominique Vincent. Oui c'est important d'accumuler de l'argent dans ses REER, mais il ne faut pas se rendre malade avec tout ça.»

Par contre, si vous avancez en âge et que vos contributions REER ne sont pas toutes utilisées, il est important d'avoir un plan étalé sur les années qui restent avant la retraite pour rattraper cet espace, ajoute Mme Vincent.

 

Dix conseils pour épargner

1. La clé du succès est d'établir des objectifs, selon Dominique Gervais, conseillère budgétaire chez Option consommateurs. «Fixez-vous des objectifs à court, moyen et long terme, cela vous aidera à vous motiver et à respecter votre budget.»

2. N'essayez pas de gravir l'Everest du jour au lendemain. Mieux vaut économiser de petits montants pour commencer et augmenter progressivement à mesure que la discipline s'installe.

3. Faites de votre budget un exercice familial. «Cela permet d'établir des priorités et de voir le rapport que chacun entretient avec l'argent, dit Jean-Marie Deschênes, responsable Affaires, gestion des avoirs au Mouvement Desjardins. Faites participer les enfants en fonction de leurs capacités.»

4. Faites de l'épargne un poste budgétaire à part entière, au même titre que les autres postes, comme l'épicerie ou le chauffage.

5. Revoyez tous vos postes de dépense pour dégager une marge de manoeuvre, surtout les dépenses discrétionnaires, comme le restaurant ou les loisirs.

6. Une des dépenses les plus importantes dans une année est l'impôt. En faisant votre déclaration de revenus, assurez-vous de réclamer tous les crédits et exemptions auxquels vous avez droit.

7. Dans le contexte économique actuel, il est intéressant de souscrire à un intérêt à taux fixe pour votre hypothèque, conseille Jean-Rémi Deschênes. Cela vous donnera une chance d'encadrer mieux vos versements sur les cinq prochaines années.

8. Souscrivez à un Régime enregistré d'épargne-études pour vos enfants, car les droits se scolarité ne peuvent qu'augmenter à l'avenir.

9. Le fait de cotiser ou non à votre REER ne devrait avoir rien à faire avec l'évolution de l'économie, dit M. Deschênes. «De la même façon que l'on ne regarde pas les marchés financiers pour financer les études de nos enfants. Les REER servent pour des objectifs à moyen et long terme, comme pour s'acheter une première maison ou pour la retraite.»

10. Si vous êtes une femme, votre plan d'épargne devrait avoir encore plus d'importance, selon Jocelyne Houle-Lesarge, directrice générale de l'Institut québécois de planification financière. «Les femmes ont souvent des emplois plus précaires, moins bien rémunérés, et passent moins de temps sur le marché du travail. Elles sont plus vulnérables sur le plan financier.»