Un vent froid souffle sur l'industrie des fonds communs de placement. Glacés par les rendements négatifs de 2008, les investisseurs font preuve d'une grande prudence afin d'éviter de nouveaux dérapages.

Rappelons que l'année dernière, le mercure a glissé sous les -30%. La plupart des grandes catégories de fonds d'actions ont dégringolé de 30 à 50%. Et même les portefeuilles équilibrés ont flanché de près de 20%.

En fait, seuls les fonds de marchés monétaires et de revenus fixes ont procuré un abri aux détenteurs de fonds contre les cinglantes rafales de la tempête financière planétaire. Mais ce ne sont pas leurs maigres 1 ou 2% qui ont revigoré les épargnants.

Ce ne sont pas non plus les rendements de janvier qui ont réchauffé les investisseurs. Au contraire, «95% des fonds communs ont terminé janvier dans le rouge», relève Christian Charest, rédacteur en chef de Morningstar Canada. Les fonds d'actions internationaux ont subi les pertes les plus sévères, avec un nouveau plongeon de 10% en un mois seulement.

Dans ce climat frigorifique, les épargnants sont frileux: ils investissent dans les fonds avec beaucoup de précautions.

En 2008, les Canadiens ont retiré 14,2 milliards de leurs fonds à long terme (actions canadiennes et étrangères, équilibrés, etc.), selon l'Institut des fonds d'investissement du Canada (IFIC). Jamais n'avait-on assisté à une année entière de retraits depuis que l'association compile les données, en 1995.

Par contre, les investisseurs ont stationné 14,3 milliards dans des fonds de marchés monétaires, des placements à court terme pratiquement sans risque. L'un dans l'autre, l'industrie a fait du sur-place l'année dernière.

«Les ventes de fonds ont pris des forces en janvier», indique toutefois Pat Dunwoody, vice-présidente de l'IFIC. Les ventes totales de fonds ont atteint 1,2 milliard grâce à «l'engouement des investisseurs pour les fonds d'obligations et à une baisse des rachats nets dans d'autres catégories comme les actions mondiales», précise Mme Dunwoody.

La ceinture de sécurité bien bouclée

Mais bien des investisseurs tardent à verser leur contribution annuelle dans leur régime enregistré d'épargne retraite. «Plusieurs sont venus nous consulter pour réaffirmer leur foi dans les placements», raconte Richard La Ferrière, chef de région chez TD Waterhouse planification financière.

Ceux qui vont de l'avant optent pour des fonds de marchés monétaires ou des dépôts garantis à court terme. «Il y a un grand appétit pour les placements sécuritaires», constate M. La Ferrière.

Justement, Épargne Placements Québec, qui se spécialise dans les produits garantis, récolte des ventes largement supérieures à celles des deux dernières années. «Sûrement que l'attrait pour les placements garantis a un impact», convient Carl Lessard, directeur principal au ministère des Finances du Québec.

Mais les fonds de travailleurs, dont les unités ont fondu l'année dernière, n'ont pas la même popularité.

Chez Fondaction, le fonds de développement de la CSN, on observe un ralentissement des contributions forfaitaires. Par contre, les investisseurs qui avaient mis en place un système d'épargne par prélèvements périodiques se cramponnent à leur plan. «Dans les entreprises, tout va bien: les travailleurs continuent d'investir à l'aide de retenues périodiques sur le salaire», indique la porte-parole, Suzanne La Ferrière.

Le Fonds de solidarité FTQ ressent les mêmes réticences de la part des épargnants. Le fonds a encore des unités à écouler, un contraste par rapport aux dernières années où le plafond avait été atteint avant la mi-février. «Ça va bon train, mais il en reste», avoue la porte-parole Josée Lagacé.

D'ailleurs, la tiédeur des épargnants inquiète le Fonds, qui souligne que le taux d'épargne moyen des Québécois touche un creux. Il est tombé à 1,4% de leur revenu personnel disponible, au premier trimestre de 2008, son plancher des 10 dernières années, selon l'Institut de la statistique du Québec.

Or, en gardant le pied sur le frein, les investisseurs vont manquer un éventuel rebond du marché, prévient M. La Ferrière.

À son avis, il est possible d'investir dans chaque catégorie de fonds, tout en limitant les risques.

«Par exemple, à l'intérieur de la catégorie des fonds d'actions, on peut opter pour un fonds de dividendes, qui est normalement moins volatil.»