Dans le cadre de la présente campagne REER, les courtiers, conseillers et planificateurs financiers vont devoir modifier royalement leur argument de vente pour convaincre les épargnants de continuer d'investir en Bourse en achetant des actions ou des parts de fonds communs d'action.

À la Bourse canadienne seulement, les pertes boursières subies depuis le sommet historique de juin dernier s'élevaient, à la fin de décembre, à près de 1000 milliards. Pour récupérer ces pertes canadiennes, il faudra que la Bourse de Toronto grimpe de 75%. Un méchant défi!

 

Q: Est-ce toujours approprié de conserver ses placements à long terme?

R Les conseillers financiers recommandent de conserver ses placements à long terme, tout en minimisant les transactions de vente. Prétexte: ça monte toujours à long terme. Je crois que cet argument n'a plus sa place dans le monde financier d'aujourd'hui. Les investisseurs qui s'en sont le mieux tirés à la suite de la récente destruction boursière des marchés sont, au contraire, les investisseurs actifs avec leurs portefeuilles. Quand je parle d'investisseurs «actifs», je ne fais pas référence aux traders amateurs qui multiplient les transactions quotidiennes. Je fais plutôt référence aux investisseurs qui se contentent d'engranger les profits raisonnables (de 15 à 30%) qu'ils ont accumulés sur papier durant les périodes fastes de la Bourse. Quitte, après cela, à réinvestir leurs épargnes dans les périodes boursières de déprime. Durant une même année, qu'elle se termine à la baisse ou à la hausse, la Bourse traverse plusieurs périodes haussières et baissières. Il arrive à quelques reprises que les indices oscillent dans une fourchette de 10% et parfois plus. Les investisseurs le moindrement aguerris profitent de cette volatilité boursière pour essayer de tirer leur épingle de la Bourse et encaisser des profits. Ou à tout le moins réduire au minimum leurs pertes lorsqu'on traverse une crise comme ce fut le cas en 2008.

Q: Pouvions-nous faire de l'argent en 2008?

R: Récemment, un auditeur de l'émission de Joël LeBigot m'a rappelé sur les ondes de Samedi et rien d'autre que j'avais recommandé en janvier 2008 l'achat de l'indice de la Bourse canadienne, le XIU, lequel indice représente la performance des 60 plus grosses entreprises cotées à la Bourse de Toronto. Sa question: comme l'indice de M. Girard a perdu en 2008 plus de 30%, est-ce que je le recommandais toujours comme placement boursier? J'ai dit oui. Mais je me suis mal défendu en me contentant de dire que l'indice avait quand même mieux fait que l'ensemble de la Bourse canadienne (-31% à comparer à -35%). J'aurais dû lui rappeler la réalité boursière suivante. Entre le creux de janvier 2008 et le sommet historique atteint six mois plus tard, la Bourse canadienne (et le XIU) avait réussi à grimper de 26%. Vous préférez le début de février. Entre celui-ci et le début de juin, la Bourse canadienne avait grimpé de 15%. Du côté de la Bourse américaine, qui était pourtant sur la déprime depuis son sommet historique d'octobre 2007, sachez l'indice S&P 500 (représenté à la cote canadienne par le symbole XSP) avait monté de 15% entre son creux de janvier 2008 et son haut de mai 2008.

Q: A-t-on touché le creux du présent marché baissier?

R: Après le sommet historique de juin sur la Bourse canadienne, tous les grands stratèges, analystes et gestionnaires de portefeuille de caisse de retraite et de fonds communs d'action ont eu l'air de deux de pique. L'ampleur de la crise boursière à travers le monde a déjoué même les plus pessimistes d'entre eux. Tout ce beau monde cherche maintenant le fameux «creux» de l'actuel marché baissier. Pourquoi est-il si important de trouver ledit «creux» ? Parce que, historiquement parlant, la Bourse a tendance à repartir fortement et rapidement une fois que ledit «creux» d'un cycle baissier a été atteint. À preuve, de 1956 à aujourd'hui, voire sur une période de 53 ans, nous avons traversé 11 cycles baissiers. Lors des 10 précédents cycles baissiers, le S&P 500 de Wall Street a réussi à grimper en moyenne de 41% dans les 12 mois qui suivaient le fameux «creux» du cycle baissier. Jusqu'à présent, on croit que le «creux» atteint lors de la séance du 21 novembre (ou celui de fin de journée du 20 novembre), serait possiblement «la» référence du présent cycle baissier.

Q: Avez-vous des titres à suggérer pour profiter de la prochaine reprise boursière?

R: Bon an, mal an, une grande partie des gestionnaires de portefeuille de caisses de retraite et de fonds communs d'action se font battre par les indices boursiers de référence. La solution? Pourquoi se casser la tête avec la sélection de titres individuels alors qu'il est possible d'acheter sur le marché les indices en question, notamment par l'entremise des iShares, des fonds indiciels négociés en Bourse? Mais attention! Pas n'importe quel indice. La grande popularité des fonds indiciels boursiers auprès des petits investisseurs a généré ces dernières années un nouvel élan de créativité chez les grandes firmes financières, de sorte qu'on se retrouve aujourd'hui avec une panoplie carrément inutile de «sous-sous-indices» boursiers qui se négocient comme des actions de compagnie. Restons simples. Si votre tolérance au risque le permet, tenez-vous-en aux trois indices boursiers qui sont cotés à la Bourse de Toronto sous les symboles suivants:

- le XIU, un clone de l'indice S&P/TSX 60 de la Bourse de Toronto

- le XSP, une copie de l'indice S&P 500 de la Bourse de New York

- le XIN, une clone de l'indice MSCI EAFE des bourses étrangères (Europe, Australasie, Extrême-Orient).

En 2008, le XIU a perdu 31,1%. Le XSP et le XIN ont fondu de 40%. Ces deux indices étrangers se négocient en dollars canadiens couverts (à l'abri des fluctuations de notre dollar par rapport aux monnaies étrangères). Après une telle débandade de 30 à 40% des plus grandes compagnies inscrites en Bourse, on comprend pourquoi la majorité des stratèges et gestionnaires de portefeuille s'attendent une reprise à la hausse en 2009.

Q: Avez-vous des exemples de fonds diversifiés facilement accessibles?

R: En voici une brève liste, avec leur performance annualisée sur 5 et 10 ans au 31 décembre 2008. En raison des lourdes pertes boursières subies en 2008, vous noterez que les rendements de plusieurs fonds diversifiés sont faibles. Le bon côté de la chute boursière? Pour une rare fois en campagne REER, on peut acheter des parts de fonds diversifiés pour pas cher...

- RBC revenu mensuel: 5,25%; 6,81%

- AIM équilibré: 5,10%; 6,37%

- Fidelity équilibré: 3,79%; 6,34%

- Dynamique FocusPlus équilibré: 2,28%; 6,22%

- GWL Croissance et revenu AFS: 5,63%; 5,27%

- BMO allocation actif: 4,31%; 4,85%

- Desjardins équilibré Québec: 2,25%; 4,18% depuis 2002

- Altamira équilibré (Banque Nationale): 2,07%; 3,10%

- Fonds de revenu équilibré TD: 2,42%; 3,88%

- CIBC équilibré: 1,47%; 2,15%

- Scotia canadien équilibré: 1,29%; 2,11%

Q: Est-il opportun d'investir dans l'achat de nouveaux certificats ou billets boursiers?

R: Aussi garantis soient-ils, je fais une croix sur les nouveaux CPG et billets boursiers. Les marchés boursiers sont devenus trop volatils pour ce genre de produits dérivés. Les détenteurs de ces CPG et billets boursiers l'ont échappé belle en 2008, bénéficiant d'une protection totale contre les lourdes pertes boursières engendrées par la violente débandade des Bourses à l'échelle de la planète. Sauf de rares exceptions, tous ces produits dérivés de la Bourse émis depuis 2004 présentent à l'heure «0%» de rendement. Ce qui est tout de même «appréciable» dans les malheureuses circonstances de la déprime boursière. Toutefois, ces placements garantis ne sont malheureusement pas liquides. Étant obligé de les conserver jusqu'à échéance, le détenteur des CPG et billets boursiers ne peut profiter des périodes haussières de la Bourse pour encaisser ses profits... avant que les marchés ne se corrigent à la baisse. La catastrophe boursière de 2008 vient de démontrer noir sur blanc qu'on peut perdre tous ses profits accumulés sur papier depuis des années, et ce, en l'espace de quelques mois.

Q: Les placements ultra conservateurs ont-ils encore leur place dans le REER?

R: Les épargnants qui se sont contentés des «minables» rendements offerts depuis 10 ans par les placements conservateurs comme les CPG (certificats de placement garanti) ont encaissé, eux, un rendement annualisé de 3,7% avec les CPG de 5 ans. Même rendement avec les bons du Trésor de 91 jours. Les épargnants qui se sont démenés un peu plus en trouvant les CPG les plus généreux qui étaient offerts sur le marché ont réussi à gagner un rendement annualisé d'au moins 4,5% avec leurs placements pépères. À l'heure actuelle, on peut obtenir du 4% avec les obligations à taux fixes émises par Épargne Placements Québec. Achieva Financial (1-877-224-4382) et Outlook Financial (1-877-958-7333), deux Credit Union du Manitoba, offrent des certificats de cinq ans à 3,80% de rendement. La Banque TD (TD Canada Trust, TD Waterhouse) a émis un CPG de cinq ans à taux progressifs qui rapporte un rendement moyen de 4%. Tous ces placements sont garantis à 100%. En période de blitz REER, la plupart des institutions financières se montrent généralement plus généreuses qu'à l'accoutumée. Il faut juste leur rappeler que vous pouvez déménager vos REER chez une institution plus généreuse. Du tordage de bras? Non, juste du gros bon sens!

Q: Le marché des obligations reste-t-il encore attrayant à la suite de la baisse des taux?

R: Les épargnants qui ont investi dans les obligations négociables, comme les obligations gouvernementales et corporatives négociées sur le marché obligataire, ont accumulé des gains intéressants en 2008. On peut acheter en Bourse les principaux indices obligataires, comme de simples actions cotées, par l'entremise des iShares. Le XBB (l'indice obligataire universel DEX composé d'un éventail diversifié d'obligations du gouvernement du Canada, d'obligations provinciales, d'obligations de sociétés et d'obligations municipales) a rapporté en 2008 un rendement de 6,1%. Pour sa part, le XGB (obligations gouvernementales canadiennes) a enrichi ses détenteurs de 8,7% et le XSB (obligations court terme) a procuré un rendement de 8%. C'est la forte baisse de taux d'intérêt qui a poussé à la hausse la valeur marchande des obligations. Comme les taux sont maintenant proches de leur niveau plancher, le marché des obligations négociables risque d'en arracher lorsque les taux repartiront à la hausse. Avec les obligations négociables, il faut ne jamais oublier que la valeur marchande de celles-ci grimpe lorsque les taux baissent et vice-versa, la valeur chute quand les taux repartent à la hausse.