La première fois qu'une formation économique du Fonds de solidarité s'est déroulée chez Glendyne, Dany Dumont, son président, était un peu craintif.

«Comme tout le monde, je me demandais quel genre de questions les employés poseraient, et quelles seraient les intentions derrière ces questions», se souvient-il. C'était il y a près de 12 ans, environ deux ans après le lancement de l'entreprise de Saint-Marc-du-Lac-Long, dans le Bas-Saint-Laurent.

Glendyne est la seule ardoisière à toitures en exploitation au Québec.

Elle fabrique des ardoises garnissant les toits d'édifices partout dans le monde, en Europe, aux États-Unis et même en Australie. On en trouve sur le toit de constructions aussi prestigieuses que l'Université Harvard ou la Cour internationale de justice, à La Haye.

Dès sa deuxième année d'existence, le Fonds est devenu partenaire de l'entreprise, ce qui a permis de faire les investissements nécessaires pour devenir l'un des cinq plus grandes ardoisières au monde.

Avec cet investissement venait la formation économique, un outil extrêmement important de communication avec les travailleurs, selon Dany Dumont.

«Dans notre cas, c'est encore plus important parce qu'il n'y a pas d'industrie comparable au Québec, dit-il. Nous sommes la seule ardoisière, et si on veut que nos employés comprennent comment fonctionne cette industrie, il faut leur donner la bonne information.»

Les cours ont lieu au moins une fois par année, pendant deux jours. Les employés passent un jour et demi avec un formateur pour apprendre à lire les états financiers de la compagnie.

Les dirigeants viennent ensuite les rencontrer pendant la dernière demi-journée.

Ils ont reçu au préalable les questions des participants et se présentent pour y répondre. Rapidement, le président de Glendyne s'est aperçu que l'exercice était une occasion de motiver les employés, en leur permettant de mieux comprendre à quoi sert leur travail.

«C'est une belle occasion d'échanger avec eux et on se rend compte qu'ils connaissent beaucoup plus de choses qu'on le pense, dit M. Dumont. Chez eux aussi, il y a eu de l'évolution. Avec les années, leurs questions deviennent de plus en plus pertinentes et approfondies.»

Et s'il arrive que les affaires ralentissent, il est bon que les employés le sachent aussi pour aider à redresser la situation, croit le président.

«Une fois qu'ils voient les chiffres, personne ne peut dire qu'on leur cache quoi que ce soit, dans les bons comme les mauvais moments», dit-il.

Depuis les débuts du Fonds, plusieurs milliers de travailleurs ont reçu une telle formation. Entre 2000 et 2007 seulement, 11 000 en ont bénéficié. Et au cours du dernier exercice financier, 2633 personnes l'ont reçue dans 56 entreprises.

Selon Michel Arsenault, président de la FTQ et du conseil d'administration du Fonds de solidarité, les employeurs apprécient cette formation parce qu'elle a contribué à changer la mentalité et l'attitude sur les lieux de travail.

«La formation économique a permis aux travailleurs de comprendre la notion de profit, dit Michel Arsenault. Les notions d'économie que l'on a inculquées à nos gens ont assaini les relations de travail au Québec.»

À une certaine époque, il n'y avait aucune confiance entre le syndicat et les employeurs, raconte le syndicaliste. Lorsque le comptable de la compagnie se présentait devant les employés pour parler des finances, ceux-ci avaient l'habitude de dire qu'il y avait deux livres: un pour les actionnaires et l'autre pour les employés.

«Le fait que cette formation soit donnée par des experts du Fonds a été bon pour les entreprises, car ce sont des interlocuteurs crédibles pour les travailleurs, dit Marcel Côté, associé fondateur de SECOR. Cela les amène à comprendre la réalité de l'entreprise et la nécessité d'être plus flexibles.»