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Y a-t-il des études sur le diagnostic du TDAH autour de la ménopause ?

Francine Gaudreault

Oui. Un livre vient même d’être publié sur la question, Still Distracted After All These Years, par la psychologue américaine Kathleen Nadeau.

Mme Nadeau a été l’une des premières à sonner l’alarme au sujet du sous-diagnostic du TDAH chez les filles, avec son livre Understanding Girls with ADHD en 1999.

« Les premières études sur la possibilité que les fluctuations hormonales aient un impact sur le TDAH datent de seulement 10 ans, dit Mme Nadeau. Avec la périménopause à partir de 40 ans, les niveaux d’estrogène diminuent. Plusieurs femmes rapportent des problèmes de concentration, de mémoire. Je pense que c’est lié. On commence tout juste à en parler davantage. Il y a trois ans, j’ai participé à une conférence sur le sujet, organisée par la société pharmaceutique Takeda. »

Takeda vend le Vyvanse, un médicament anti-TDAH qui a été testé en 2015 par des psychologues de l’Université de Pennsylvanie chez des patientes en ménopause se plaignant de problèmes de concentration. Les résultats préliminaires étaient encourageants, mais ont été critiqués parce que le Vyvanse peut améliorer la concentration même si on n’a pas de TDAH.

PHOTO TIRÉE DU SITE DU CUSM

Deborah Da Costa

Deborah Da Costa, psychologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM), a beaucoup de patientes qui rapportent des symptômes s’apparentant au TDAH autour de la ménopause. « Mais il n’est pas clair si c’est une apparition à la ménopause ou tout simplement un sous-diagnostic de TDAH qui était présent depuis l’enfance, qui apparaît plus clairement avec la ménopause. »

La question est compliquée par la présentation différente du TDAH chez les deux sexes.

On sait bien maintenant que chez les filles, il y a moins de problèmes de comportement avec le TDAH, plus d’anxiété et de dépression. Certains disent qu’il y a moins d’impulsivité chez les filles TDAH, mais je serais encline à penser que les compulsions de magasinage ou alimentaires peuvent être des problèmes d’impulsivité.

Kathleen Nadeau, psychologue

« J’ai passé toute ma carrière à chercher des groupes de la population où le TDAH est ignoré, pour beaucoup de facteurs souvent culturels. L’accent mis sur le bon comportement dans l’éducation traditionnelle des filles peut avoir rendu moins apparents certains des symptômes du TDAH », ajoute-t-elle.

L’autre inconnue est le caractère temporaire ou non du TDAH à la ménopause, selon Mme Da Costa. Cela influence d’ailleurs les choix de thérapie. « Beaucoup de patientes ne veulent pas prendre de médicaments, notamment parce qu’elles n’en ont jamais pris. De toute façon, la psychothérapie cognitivo-comportementale peut aider beaucoup par elle-même. Je prends aussi des approches de “pleine conscience” [mindfulness]. »

Mme Da Costa cite aussi des applications de pleine conscience, CALM et Headspace. Il y a davantage de données scientifiques sur l’efficacité de Headspace, note-t-elle.

Surdiagnostic

Comment conjuguer ces constats de sous-diagnostic du TDAH à la ménopause avec les inquiétudes récentes concernant la surmédication pour le TDAH chez les enfants québécois ? « La surmédication existe surtout chez les garçons, pas les filles », selon Mme Da Costa. Mme Nadeau, elle, estime qu’environ 10 % des enfants peuvent bénéficier d’une médication TDAH.

En 2019-2020, plus de 13 % des ados québécois avaient eu de la médication pour le TDAH, selon un rapport récent de l’Institut national de santé publique du Québec. Les garçons sont 60 % plus susceptibles que les filles de recevoir ces médicaments.

Une version précédente de cet article orthographiait mal le nom Vyvanse

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  • 15 %
    Prévalence du TDAH aux Pays-Bas en 2020 chez les 18-24 ans
    Source : Journal of Global Health
    9 %
    Prévalence du TDAH aux Pays-Bas en 2020 chez les 40-44 ans
    Source : Journal of Global Health
  • 3 %
    Prévalence du TDAH aux Pays-Bas en 2020 chez les plus de 60 ans
    Source : Journal of Global Health