Les conséquences des changements climatiques sont déjà nombreuses et parfois catastrophiques. Elles peuvent aussi être insidieuses et affecter un aspect primordial de la santé humaine : le sommeil. Une toute nouvelle étude s’est penchée sur la question et les résultats indiquent que pour bien des gens, les nuits seront plus courtes dans un monde plus chaud.

11 nuits

Selon une étude publiée récemment dans le journal One Earth, le Terrien moyen perd déjà 44 heures de sommeil chaque année en raison des températures nocturnes supérieures à la moyenne. C’est l’équivalent de 11 nuits avec moins de 7 heures de sommeil, le minimum généralement reconnu. Or, le manque de sommeil peut avoir des conséquences importantes sur la santé quand il devient chronique.

7 millions

L’étude intitulée Rising temperatures erode human sleep globally a analysé les données de 7 millions de nuits chez 47 000 personnes dans 68 pays, de 2015 à 2017. Les participants portaient un bracelet au poignet, connecté à un téléphone portable, permettant de recueillir de nombreuses données physiologiques. Les données météo ont aussi été prises en compte. La recherche menée principalement par des chercheurs de l’Université de Copenhague, au Danemark, a été publiée en avril dernier.

Quantifier le phénomène

On savait déjà que des nuits trop chaudes peuvent affecter le sommeil. L’intérêt de cette nouvelle étude, selon la Dre Claudel Pétrin-Desrosiers, présidente de l’Association québécoise des médecins pour l’environnement, c’est qu’elle quantifie le phénomène. Une situation qui ne risque pas de s’améliorer d’ici la fin du siècle. « Les changements climatiques sont la plus grande menace pour la santé humaine au XXIsiècle », rappelle-t-elle.

10 degrés

Des effets « clairs » sur le sommeil ont été observés dans tous les pays dès que la température nocturne était supérieure à 10 degrés. Si la température minimale la nuit dépasse les 25 degrés, les risques de ne pas dormir au minimum 7 heures sont encore plus élevés.

15 nuits

Dans un scénario d’émissions élevées de gaz à effet de serre (GES), la hausse des températures pourrait faire passer à 15, en moyenne, le nombre de nuits de moins de 7 heures d’ici la fin du siècle.

22 nuits

Les personnes vivant dans les régions les plus chaudes du globe pourraient subir jusqu’à 22 nuits de moins de 7 heures, d’ici 2099. Pour ceux vivant dans les pays les moins riches, qui ont moins facilement accès à la climatisation, par exemple, ce nombre de nuits de sommeil amputées pourrait être jusqu’à trois fois plus élevé, souligne l’étude. Les auteurs admettent cependant manquer de données sur les personnes en provenance des pays les plus pauvres de la planète. « Les personnes à faible revenu sont sous-représentées dans les données et nous sommes très transparents à ce sujet », a déclaré le responsable de l’étude, Kelton Minor, au quotidien The Guardian.

Les limites du corps

L’étude montre que les problèmes de sommeil liés à la chaleur sont plus grands dans les régions les plus chaudes, suggérant ainsi des limites aux capacités d’adaptation du corps humain, passé un certain seuil. « Il y a en effet des limites pour le corps à s’adapter à de telles chaleurs, explique la Dre Pétrin-Desrosiers. Et plusieurs nuits consécutives de mauvais sommeil peuvent avoir des impacts importants. »

Les femmes

La recherche rappelle que les femmes sont généralement plus affectées que les hommes par la chaleur. Leur corps se refroidit plus tôt en soirée, du coup, elles sont ainsi plus touchées par des températures nocturnes plus élevées. Elles ont aussi en moyenne des niveaux de graisse sous-cutanée plus importants, ce qui peut ralentir le processus de refroidissement du corps.

Les personnes âgées

L’étude a également pu constater que la chaleur nocturne affecte deux fois plus les personnes âgées de 65 ans et plus qu’un adulte dans la quarantaine. Cet effet est encore davantage marqué chez les 70 ans et plus.

Des conséquences multiples

Si une mauvaise nuit de sommeil peut nous rendre grognons le lendemain, le manque de sommeil peut avoir des effets néfastes pour la santé s’il devient plus fréquent. Les auteurs de l’étude rappellent notamment les conséquences sur les performances cognitives et ses effets sur les systèmes immunitaire et cardiovasculaire. Le manque de sommeil affecte également la santé mentale.

40,9 nuits

Selon les prévisions du consortium Ouranos, spécialisé dans l’étude des changements climatiques au Québec, Montréal pourrait vivre jusqu’à 40,9 nuits où la température sera supérieure à 22 degrés d’ici la fin du siècle. « Plusieurs journées consécutives où il fera 26-27 degrés dans un appartement sans climatisation à Montréal, ça va devenir de plus en plus fréquent, signale la Dre Pétrin-Desrosiers. L’impact du réchauffement sera disproportionné pour les personnes défavorisées. »

Consultez l’étude de l’Université de Copenhague (en anglais)