Les personnes qui rejettent la vaccination ont plus de mal que la population générale à estimer la probabilité qu’une conséquence négative survienne – et ce, même dans des domaines qui n’ont rien à voir avec les vaccins.

Évaluer les risques

Recevoir un vaccin, c’est courir un risque infime de subir une réaction négative sérieuse. Sommes-nous capables de faire la distinction entre ce qui est très rare et ce qui est plus courant ? Pour le savoir, Mark LaCour, professeur adjoint de psychologie à l’Université d’État de Louisiane à Alexandria, a codirigé une étude visant à voir si les personnes qui s’opposent à la vaccination avaient une vision réaliste des risques encourus. « En tant qu’humains, nous prenons des décisions dont chacune tient compte des conséquences auxquelles nous nous attendons, et aussi de notre estimation quant à la probabilité que ces conséquences se réalisent, note M. LaCour. Notre hypothèse de départ était que les personnes antivaccins évaluaient mal les risques pour la sécurité associés à différents évènements. »

Cancers, accidents...

Les chercheurs ont d’abord voulu déterminer le niveau de scepticisme à l’égard des vaccins de 158 participants, dont leur perception des dangers et leur degré de confiance au sujet des autorités sanitaires. Ensuite, les participants devaient donner leur estimation du nombre de décès par année associés à différents évènements, comme être atteint d’un cancer, être mordu par un animal, accoucher, être électrocuté ou encore être impliqué dans un accident de voiture. « Ce que nous avons réalisé, c’est que plus les gens étaient sceptiques à l’égard des vaccins et des autorités sanitaires, moins ils étaient capables de classer correctement les évènements négatifs selon s’ils arrivaient fréquemment ou s’ils étaient rares. C’est comme s’ils mettaient tout sur un pied d’égalité. » Leurs résultats ont été publiés dans la revue scientifique Vaccine en 2020.

... et sujets moins émotifs

Dans un test subséquent, les chercheurs ont voulu voir si les participants étaient capables de faire des estimations correctes sur des sujets moins émotifs que la maladie ou la mortalité. « Par exemple, nous avons demandé aux participants d’estimer le nombre de véhicules vendus aux États-Unis par année, ou bien d’estimer combien de fois l’animatrice Ellen DeGeneres écrivait sur Twitter. » Les chercheurs ont réalisé que le phénomène de surestimation de certains évènements rares chez les personnes sceptiques à l’égard des vaccins disparaissait : lorsque la maladie ou la mortalité n’étaient pas en jeu, elles donnaient des réponses semblables à celles des personnes favorables à la vaccination.

Pistes et stratégies

Les chercheurs ont établi des stratégies qui permettent de remettre en contexte les risques négatifs extrêmement rares associés à la vaccination. « Premièrement, les facteurs sociaux jouent un rôle de premier plan : si des personnes que vous considérez comme importantes ou comme étant des membres représentatifs de votre communauté sont en faveur de la vaccination, cela va influencer votre décision. » Quant à l’idée d’utiliser la logique pour essayer de rejoindre les personnes sceptiques, il peut être bon de donner de la perspective. Dans une recherche sur le vaccin contre le virus du papillome humain (VPH) donné aux enfants de 11 ou 12 ans, des médecins ont réussi à convaincre des parents récalcitrants en leur faisant remarquer que leur enfant courait plus de risques de se blesser en jouant au soccer ou au football que de subir une réaction négative au vaccin. En utilisant l’analogie du sport – une activité familière et acceptée –, les médecins ont pu recentrer la perception des gens sur la probabilité extrêmement faible d’un effet négatif.

En chiffres

5 %

C’est l’estimation faite par des électeurs républicains interrogés aux États-Unis de la réduction du risque d’hospitalisation dont jouissent les personnes vaccinées contre la COVID-19, selon un récent sondage Gallup. En réalité, les vaccins contre la COVID-19 ont une efficacité de 92 % contre les hospitalisations, même en présence du variant, révèle une récente étude de l’INSPQ.

8 %

Quelque 8 % des Québécois qui détiennent un diplôme d’études secondaires ou moins refusent la vaccination. Cette proportion tombe à 6 % chez les gens qui ont fait des études collégiales, et à 3 % chez les gens qui ont fait des études universitaires, selon un récent sondage de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).

21 %

C’est la proportion de Québécois antivaccins qui disent refuser la vaccination contre la COVID-19 par crainte d’effets secondaires possibles, selon l’INSPQ.

95 %

La question d’infirmières ou d’autres travailleurs de la santé qui refusent la vaccination a beaucoup retenu l’attention au cours des derniers mois. Or, à peine 4 % des gens qui travaillent en santé au Québec s’opposent à la vaccination, alors que 95 % sont en faveur des vaccins, selon l’INSPQ.