Une nouvelle molécule qui a notamment été mise à l’essai au Centre hospitalier de l’Université de Montréal constitue potentiellement une « découverte capitale » dans le traitement des accidents vasculaires cérébraux (AVC), estime l’organisme Cœur + AVC, qui a partiellement financé les travaux des chercheurs.

L’étude internationale a été menée par l’Université de Calgary, mais le CHUM était le deuxième site au Canada et le quatrième dans le monde. Les résultats ont été publiés par le journal médical The Lancet et présentés au Congrès international sur l’AVC, à Los Angeles.

L’étude multicentrique, randomisée, à double insu et contrôlée portait sur le nérinétide, un médicament qui semble protéger les cellules cérébrales dont l’alimentation en oxygène est interrompue par la présence d’un caillot sanguin (ce qu’on appelle un AVC ischémique).

« Quand il y a une interruption du flux sanguin vers les neurones, les neurones commencent à mourir et il y a comme une cascade qui embarque de […] différents produits qui sont produits par l’absence d’oxygène et de sang, et qui endommagent davantage les neurones, a expliqué le docteur Alexandre Poppe, l’investigateur principal de cette étude au CHUM. Si on peut stopper cette cascade de produits chimiques toxiques, on peut limiter les dommages aux neurones en attendant qu’on essaie d’ouvrir l’artère. »

Lors des essais cliniques, un premier groupe de patients a reçu du nérinétide et de l’altéplase (un médicament qui fait fondre les caillots sanguins). Le deuxième groupe de patients, chez qui l’altéplase n’était pas approprié, n’a reçu que du nérinétide. Les deux groupes ont profité d’une technique endovasculaire pour retirer le caillot mécaniquement.

Comparativement à un placebo, environ 20 % de plus des patients qui avaient été traités seulement avec le nérinétide et la technique endovasculaire, mais non l’altéplase, se sont remis des effets dévastateurs de l’AVC — soit la différence entre sortir de l’hôpital sur ses deux pieds ou affliger de lourdes séquelles.

« Dans la moitié des patients qui n’avaient pas l’altéplase, le nirénétide avait […] un bénéfice qui avait l’air très prometteur au niveau du handicap, donc la paralysie, la capacité de marcher et de parler, mais aussi au niveau de la mortalité, a dit le docteur Poppe. Ça diminuait la mortalité d’environ 7 % dans le groupe de patients qui n’avaient pas reçu l’altéplase. »

L’étude témoigne aussi apparemment de l’existence d’un mécanisme biologique qui empêche les cellules cérébrales de mourir quand elles sont privées d’oxygène. Le nérinétide cible les derniers moments de la vie des cellules en stoppant la production d’oxyde nitrique dans la cellule.

Des images prises des cerveaux des patients montrent que l’ampleur attendue des dégâts est nettement moindre chez ceux qui ont été traités avec le nérinétide (mais non l’altéplase) et la technique endovasculaire.

Plus de 1100 patients ont participé à cette étude clinique entre mars 2017 et août 2019, dans des centres médicaux de l’Amérique du Nord, de l’Europe, de l’Australie et de l’Asie.

Le nirénétide est encore une substance expérimentale dont l’utilisation n’est autorisée nulle part dans le monde. Il fait actuellement l’objet d’une autre étude clinique pour en tester l’efficacité.

On calcule que 1,9 million de cellules cérébrales meurent lors de chaque minute d’un AVC. Plus de 62 000 AVC se produisent chaque année au pays, selon Cœur + AVC, et plus de 11 000 personnes en meurent. Parmi les cas, 85 % sont ischémiques et 15 % sont hémorragiques.