Il sera bientôt possible de traiter l’aphasie en implantant une électrode dans le cerveau, ont annoncé hier des neurologues californiens. Ils ont réussi à reproduire les pensées d’une personne sans qu’elle parle.

Les chercheurs de l’Université de Californie à San Francisco ont sélectionné cinq patients qui ont eu en 2014 une implantation d’électrode visant à traiter leur épilepsie. L’électrode a été modifiée pour transmettre l’enregistrement de leurs ondes cérébrales. 

« Nous avons enfin une technique qui nous permet d’envisager de faire parler les gens qui ont perdu la parole », a expliqué mardi, en conférence de presse téléphonique, Edward Chang, l’auteur principal de l’étude publiée hier dans la revue Nature

Les chercheurs ont demandé aux patients de prononcer 400 phrases à plusieurs reprises. Ils ont enregistré les ondes liées aux mouvements de leur gorge, de leur bouche et de leur pharynx. Ensuite, les cobayes ont prononcé les mêmes phrases sans émettre de sons, seulement en bougeant les lèvres. En dernier, ils se sont imaginés en train de dire 101 phrases. Un algorithme a permis de synthétiser les phrases imaginées.

Lire dans les pensées

Plusieurs journalistes ont posé la même question à la suite de ces résultats : sera-t-il possible de lire dans les pensées ? 

« Ça va être beaucoup plus difficile, a dit le neurologue Chang. Nous pensons que notre algorithme fonctionne bien parce qu’il interprète des ondes cérébrales liées à des mouvements. Quand on pense seulement, c’est moins bon. » 

La prochaine étape est d’affiner l’algorithme pour les types de sons moins bien interprétés, notamment les sons plus brefs comme un b. « Ça marchait mieux pour les sons plus longs, comme ch. » 

Dans un premier temps, d’ici une demi-douzaine d’années, le système fonctionnera pour les gens qui ont perdu la parole à la suite d’un AVC, d’une opération oncologique à la gorge ou de la sclérose latérale amyotrophique. Ensuite, il pourra fonctionner pour les muets congénitaux, par exemple ceux qui souffrent de paralysie cérébrale.

Amazon Turk

Les neurologues californiens ont innové par rapport à des équipes concurrentes en comparant les phrases avec des humains, recrutés par le truchement du service Amazon Turk, plutôt qu’avec des algorithmes informatiques d’évaluation de la similitude de deux phrases. 

« Ça a fait une grosse différence pour entraîner notre algorithme de synthétisation du langage, a dit M. Chang. Les humains étaient bien meilleurs pour évaluer sa performance et nous aider à l’améliorer. »