Une mauvaise manipulation dans un laboratoire de microélectronique qui produit une fresque évoquant des cerisiers japonais. Deux galaxies qui tournent autour l’une de l’autre en un tango cosmique. Il arrive que les chercheurs tombent sur des phénomènes de toute beauté au cours de leurs recherches. Chaque année, le congrès de l’Acfas présente les plus belles photos scientifiques dans un concours intitulé « La preuve par l’image ». Morceaux choisis.

Gardes du corps

Yanis Chaib Université Laval Dans les mots des chercheurs

« Notre peau sert de barrière physicochimique contre les envahisseurs. On aperçoit ici, en embuscade parmi les cellules de l’épiderme (en vert), les cellules dendritiques (en rouge), qui forment l’avant-garde du système immunitaire. Dès qu’un danger est détecté, ces cellules déclenchent une réaction inflammatoire. Elles interceptent ainsi les ennemis en attendant que les lymphocytes T viennent les neutraliser. L’image présente la répartition de ces cellules sur une peau humaine dans la région mammaire. »

Dimension : 430 x 430 µm Microscopie confocale 16 images compilées, prises à différentes profondeurs

Étouffer la menace

Martine Blais et Danny Rioux Ressources naturelles Canada Dans les mots des chercheurs  

« Le noyer cendré est en voie de disparition au Canada. Un champignon exotique envahissant, Ophiognomonia clavigignenti-juglandacearum, est responsable de ce ravage. Pourtant, certains individus lui résistent par l’encapsulage du pathogène sous une couche de liège. En haut, à gauche, on distingue cette ligne de défense mauve en forme d’accolade au cœur de l’aubier, ensuite montrée à différents grossissements sur les autres photos. Ces arbres résistants vont-ils donner naissance à la prochaine lignée de noyers cendrés nord-américains ? »

PHOTO FOURNIE PAR L'ACFAS

Largeur de l’accolade : 4 mm Tige de 2 ans de noyer cendré (Juglans cinerea) Microscopie conventionnelle et microscopie confocale

Tout sauf un baiser

Andréanne Beardsell Université du Québec à Rimouski Dans les mots des chercheurs  

« C’est l’été en Arctique, et des milliers d’oiseaux migrateurs se rassemblent pour se reproduire. Des œufs sont alors produits en abondance, au grand bonheur du renard arctique, qui assure ainsi la survie de sa famille. L’étude de cette prédation sert d’indice aux chercheurs pour estimer les effets de l’ensemble des activités humaines sur les écosystèmes nordiques. La recherche est réalisée dans un laboratoire à ciel ouvert, dont l’absence d’arbres facilite grandement l’observation des évènements de prédation. »

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Photographie avec un Nikon D7100

Traînées d’étoiles microfluidiques

Pierre-Alexandre Goyette Polytechnique Montréal Dans les mots des chercheurs  

« Un fluide est injecté dans une ouverture située au centre de l’image. Il se retrouve emprisonné dans un mince interstice, baigné aussi de fluide, et réaspiré par une deuxième ouverture située à droite de l’image. À cette échelle du micromètre, les fluides ne connaissent pas de turbulences. Ils s’écoulent de manière laminaire, comme en témoignent les microbilles fluorescentes scintillant dans le noir. Le contrôle précis des fluides sur des surfaces permet l’amélioration de tests biomédicaux nécessitant le marquage de tissus biologiques. »

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Diamètre des traceurs fluorescents : 3 μm Grossissement : 5 fois Microscopie à fluorescence Superposition de 10 photographies

Floraison nanométrique

Meriem Bouchilaoun Université de Sherbrooke Dans les mots des chercheurs  

« La fabrication de microprocesseurs commence par le dépôt d’une couche de résine photosensible sur une plaquette d’arséniure de gallium. Cette technologie d’une extrême précision exige une surface parfaitement lisse. Or, même si ce procédé est maintenant bien maîtrisé, il arrive parfois qu’un incident de manipulation devienne création. En témoignent ces résidus de résine qui ont mystérieusement bourgeonné sur leur plaquette et qui évoquent la forme des sakuras, ces cerisiers japonais ornementaux. »

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Coloration Facteur de grossissement : 15 000 fois Microscopie électronique à balayage

Molécule de cobalt en son nuage d’électrons

Antoine Juneau Université du Québec à Montréal Dans les mots des chercheurs  

« La chimie informatique est couramment utilisée en recherche grâce à la puissance des ordinateurs. Elle prédit les propriétés des molécules ou valide des observations, et ce, avec une impressionnante précision. Un complexe de cobalt a ici été modélisé par des méthodes de calcul quantique. En rouge et bleu, on aperçoit l’emplacement statistique de deux de ses électrons, tandis que les sphères blanches et grises représentent respectivement la position prédite des noyaux atomiques d’hydrogène et de carbone. »

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Surfaces calculées à partir du logiciel de chimie numérique Gaussian 09 et modélisées en 3D à l’aide du logiciel Blender

Tango cosmique

Amélie Dumont et Hugo Martel Université Laval Dans les mots des chercheurs  

« Imaginez deux jeunes galaxies composées surtout de gaz et attirées l’une vers l’autre, voilà 10 milliards d’années. Grâce à un superordinateur et à quelques semaines de calculs, il a été possible de simuler leur première rencontre, puis leur séparation, pour les voir plus tard s’enlacer de nouveau. Et ainsi de suite, à six reprises, jusqu’à fusionner après une simulation de 500 millions d’années, pour former une seule galaxie spirale où naîtront encore plus d’étoiles. Une galaxie un peu à l’image de notre Voie lactée. »

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Simulation numérique réalisée avec le code GCD+, écrit par Daisuke Kawata Images réalisées à l’aide du logiciel Dotty Plotty, développé par David Williamson, et du langage de programmation Python

L’élément moteur

Charles Ducrot Université de Montréal Dans les mots des chercheurs  

« Issu d’une région du cerveau appelée “substance noire compacte”, ce neurone dopaminergique intrigue et fascine. Lui et ses semblables, avec leurs multiples ramifications, jouent un rôle clé dans la coordination des mouvements. Mais ces neurones sont malheureusement aussi connus pour leur grande vulnérabilité, observée notamment dans la maladie de Parkinson. On tente de percer le mystère de cette fragilité au moyen de leur culture in vitro combinée à la microscopie électronique, pour distinguer jusqu’aux terminaisons synaptiques (invisibles dans cette vue d’ensemble). »

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Grossissement : 950 fois Microscopie électronique à balayage

Petits envahisseurs de grandes cultures

Julien Saguez CÉROM – Centre de recherche sur les grains Dans les mots des chercheurs 

« Ces drôles de “soucoupes volantes” sont en fait des dizaines d’œufs posés sur les feuilles à la cime d’un plant de maïs. Bientôt, ils libéreront les larves du ver-gris occidental du haricot, très friandes des épis en devenir. Ces œufs sont pondus par des papillons nocturnes originaires du centre des États-Unis et maintenant bien établis en Ontario. Portés par les vents jusqu’au Québec, et par suite des changements climatiques, ils pourraient, craint-on, s’installer ici à demeure. »

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Un œuf : 1 mm Grossissement : 200 fois Microscopie optique

Vol au-dessus d’un nid de tordeuse

Janie Lavoie Université du Québec à Chicoutimi Dans les mots des chercheurs  

« Lors de ses passages cycliques, la tordeuse des bourgeons de l’épinette cause d’énormes dégâts, tant écologiques qu’économiques. Les dommages que cet insecte inflige aux arbres matures sont largement documentés. En témoigne cette image, prise par un drone, qui montre des arbres gris incapables de résister à la voracité du ravageur. On cherche maintenant à savoir si, après une coupe totale, la tordeuse s’attaquera aux semis d’épinette et de sapin, ce qui compromettrait la régénération de cette précieuse ressource. »

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Photographie par drone avec une caméra ZenMuse X4S