(Québec) Le projet de loi 11 visant l’élargissement de l’aide médicale à mourir a été adopté mercredi à l’Assemblée nationale. La ministre Sonia Bélanger promet un plan d’action pour réduire le délai controversé de 24 mois pour l’entrée en vigueur des demandes anticipées.

« Je me réjouis de l’adoption de la loi [sur laquelle nous avons] travaillée les cinq derniers mois de façon transpartisane […] Je pense que ça démontre le travail qui a été fait avec sérieux et avec empathie », s’est réjouie la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger, à sa sortie du Salon bleu.

Toutes les formations politiques avaient permis un vote libre de leurs députés sur cet enjeu personnel. Seules les députées libérales Filomena Rotiroti et Linda Caron ont voté contre l’adoption du projet de loi tandis que le député libéral André A. Morin s’est abstenu. Au total, 103 députés ont voté en faveur.

Mme Bélanger, qui s’était montrée particulièrement émotive lors du dépôt du texte législatif en février, a aussi indiqué qu’il s’agissait mercredi « d’une journée importante sur le plan personnel ».

La Commission sur les soins de fin de vie s’est aussi réjouie de cette nouvelle étape. « Les modifications apportées à la loi permettent aux Québécoises et Québécois d’avoir une plus grande liberté de choix en matière de fin de vie et de décider pour eux-mêmes. Cette évolution de la loi répond à un besoin exprimé par la population du Québec », a mentionné le président de la Commission, DMichel Bureau.

« Avec les demandes anticipées, les personnes touchées par une maladie neurodégénérative cognitive désirant l’aide médicale à mourir peuvent enfin avoir une fin de vie dans l’apaisement », a souligné de son côté le président de l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, le DGeorges L’Espérance.

Pour sa part, le réseau citoyen Vivre dans la Dignité, qui estime que le texte législatif n’offre « pas les balises suffisantes pour éviter des dérives », soutient qu’il y a « un immense bénéfice au fait que le projet de loi ne soit pas adopté unanimement ». Selon le regroupement, il s’agit « d’une marque d’espoir pour tous ceux et celles qui ont pris la parole afin de prioriser l’aide médicale à vivre ».

La nouvelle loi québécoise vient élargir l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes aux prises avec un handicap. Elle permet aussi aux personnes souffrant de maladies graves et incurables, comme l’alzheimer, de faire une demande anticipée pour recevoir ce soin ultime. Les infirmières praticiennes spécialisées (IPS) pourront aussi administrer l’aide médicale à mourir.

On vient aussi permettre de recevoir l’aide médicale à mourir à l’extérieur d’un établissement de santé ou du domicile, comme au salon funéraire ou tout autre lieu qui n’était pas prévu par la loi.

Demande anticipée : plan d’action à venir

Critiquée pour avoir inscrit un délai maximal de 24 mois pour l’entrée en vigueur des demandes anticipées, la ministre Sonia Bélanger a promis de présenter un plan d’action détaillé qui viendra accélérer le processus. « Pour le délai de 24 mois, ce n’est pas un objectif en soi, c’est la limite pour mettre en vigueur la demande anticipée, je me suis engagée à le faire le plus rapidement possible », a-t-elle affirmé jeudi.

La ministre doit rencontrer le Collège des médecins et l’Ordre des infirmiers et infirmières du Québec pour concevoir les programmes de formation nécessaire à l’administration d’une demande anticipée d’aide médicale à mourir. Elle a aussi exprimé lundi son intention de procéder rapidement à la sous-ministre à la Santé, Dominique Savoie.

Mme Bélanger prévoit aussi avoir des échanges avec Ottawa au sujet du Code criminel, qui ne prévoit pas pour l’heure d’exceptions sur les demandes anticipées d’aide médicale à mourir.

« La demande anticipée d’aide médicale à mourir c’est du nouveau, il ne faut pas pousser trop rapidement dans la cour des médecins cet enjeu-là », a expliqué la députée Nancy Guillemette, qui a présidé la Commission spéciale sur l’évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie. « On ne veut pas non plus pousser quelqu’un à faire un geste illégal », ajoute-t-elle.

La Commission sur les soins de fin de vie a indiqué appuyer la ministre dans ses démarches. « La formation des équipes soignantes, la formulation des demandes anticipées d’aide médicale à mourir et l’élaboration des guides de pratique pour s’assurer que la Loi soit applicable demandent du temps », a-t-on indiqué.

« La Loi doit d’une part protéger les personnes inaptes vulnérables et d’autre part leur donner l’accès réel à l’aide médicale à mourir sur demande anticipée afin de respecter autant que possible leurs décisions. Dans son application, le Québec doit éviter l’écueil de lois semblables en Belgique et aux Pays-Bas qui dans la réalité, sont si restrictives que peu de personnes qui deviennent inaptes y ont accès. »