Les Québécoises devraient-elles toutes passer une mammographie dès 40 ans ? Un panel de scientifiques américains recommande d’abaisser de 10 ans l’âge minimal du premier examen, afin de réduire la mortalité du cancer du sein, qui tue plus de 5000 femmes au Canada chaque année.

Ce qu’il faut savoir

  • Un organisme américain a recommandé mardi la mammographie de dépistage du cancer du sein pour les femmes à partir de 40 ans.
  • Au Québec, la mammographie est offerte à toutes les femmes de 50 à 69 ans, contrairement à plusieurs provinces canadiennes, où elle est conseillée dès 40 ans.
  • La proportion de cancers du sein avancés chez les quinquagénaires est moins élevée dans les provinces effectuant des mammographies chez les 40 à 49 ans, selon une étude de l’Université d’Ottawa.

Mardi, le Groupe de travail américain sur les services préventifs a recommandé la mammographie de dépistage du cancer du sein pour les femmes à partir de 40 ans. « Cette nouvelle recommandation contribuera à sauver des vies et à empêcher davantage de femmes de mourir du cancer du sein », a déclaré la présidente sortante de l’organisme, la Dre Carol Mangione. Abaisser l’âge à 40 ans pourrait permettre de sauver 19 % de vies supplémentaires, soutient l’organisme.

Ce n’est pas la première fois que de telles conclusions sont avancées. Une étude de l’Université d’Ottawa publiée en août dernier a révélé que la proportion de cancers du sein avancés chez les femmes de 50 à 59 ans est moins élevée dans les provinces effectuant des mammographies annuelles chez les 40 à 49 ans que dans les provinces qui commencent le dépistage plus tardivement.

Les quinquagénaires n’ayant pas fait de dépistage dans la quarantaine présentent des cancers du sein à des stades plus avancés. Elles nécessitent donc des traitements plus intensifs et leur pronostic est moins favorable, comparativement aux femmes ayant reçu un diagnostic à un stade plus précoce.

La Dre Anna Wilkinson, coauteure principale de l’étude et professeure agrégée à la faculté de médecine de l’Université d’Ottawa

Au Québec, les femmes de 50 à 69 ans sont invitées à passer une mammographie de dépistage du cancer du sein tous les deux ans. La Colombie-Britannique, l’Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse et le Yukon permettent toutefois aux femmes de prendre rendez-vous pour une mammographie à 40 ans sans ordonnance médicale. L’Alberta le recommande à partir de 45 ans.

Un suivi personnalisé

À l’heure actuelle au Québec, les femmes qui ont des risques accrus de cancer du sein peuvent réaliser une mammographie avant 50 ans sur la recommandation de leur médecin de famille, explique la conseillère scientifique à l’Institut national de santé publique du Québec Marie-Hélène Guertin.

Jacques Simard, vice-doyen à la recherche et aux études supérieures de la faculté de médecine de l’Université Laval et chercheur en prévention du cancer du sein, estime que ce n’est pas suffisant.

Un cas de cancer du sein sur six est dépisté avant 50 ans. On doit faire quelque chose.

Jacques Simard, vice-doyen à la recherche et aux études supérieures de la faculté de médecine de l’Université Laval

Sans pour autant devancer l’âge du dépistage pour tout le monde au Québec, il estime que les femmes devraient obtenir un suivi personnalisé selon leur niveau de risque. Ce dernier serait évalué en tenant compte notamment des antécédents familiaux, de la densité mammaire et de l’âge.

Il suggère que celles qui ont un risque dit normal continuent de passer une mammographie tous les deux ans entre 50 et 69 ans, tandis que celles qui ont un risque intermédiaire commencent la mammographie annuelle dans la quarantaine. Enfin, celles qui ont un risque élevé pourraient obtenir une mammographie annuelle en plus d’une imagerie par résonance magnétique (IRM).

À noter, près de la moitié des femmes ont des seins denses, ce qui augmente leur risque de cancer du sein. Les seins denses sont composés de plus de tissu glandulaire et de tissu fibreux que de tissu graisseux. La densité mammaire ne peut être observée qu’à la mammographie et n’est pas liée à la taille, à l’apparence ou à la texture des seins.

Discuter avec son professionnel de la santé

En réponse à la demande de La Presse, la Société canadienne du cancer s’est dite impatiente d’en savoir plus sur le projet de recommandations relatives au dépistage du cancer du sein publié mardi.

« Lorsque le cancer du sein est détecté et traité à un stade précoce, les chances de réussite du traitement sont meilleures. C’est pourquoi la Société canadienne du cancer (SCC) est un fervent partisan des programmes organisés de dépistage du cancer du sein », a déclaré l’organisme par courriel.

L’organisme invite par ailleurs les Canadiennes dans la quarantaine à discuter avec leur fournisseur de soins de santé des limites et des avantages d’un dépistage régulier par mammographie, ainsi que de leurs facteurs de risque.

De son côté, la Fondation du cancer du sein du Québec n’a pas souhaité prendre position sur la recommandation.