(Québec) Devant l’absence de consensus, Québec nomme un comité d’experts qui se penchera sur la notion de « handicap » en marge des travaux vers l’élargissement de l’aide médicale à mourir. Cette décision transpartisane ne doit pas retarder le cheminement du projet de loi.

Le projet de loi 11 sur les soins de fin de vie doit élargir l’aide médicale à mourir aux personnes vivant avec un « handicap neuromoteur ». Il s’agit d’articles réintroduits par le gouvernement Legault dans la nouvelle mouture du texte législatif, déposé en février, maintenant piloté par la ministre Sonia Bélanger. La version précédente, déposée par le ministre Christian Dubé, est morte au feuilleton au printemps dernier.

« Ce qui est ressorti des consultations particulières, c’est que la notion de handicap neuromoteur est difficile à définir. Donc, ça voudrait dire éventuellement difficile à appliquer, et ça veut dire aussi que cela pourrait causer des préjudices », a expliqué mercredi la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés. Les parlementaires ont entendu un total de 37 groupes en commission, en plus de recevoir 60 mémoires.

Dès le début des travaux parlementaires, la notion de « handicap neuromoteur » a fait débat. L’Office des personnes handicapées du Québec et le Barreau du Québec ont notamment fait valoir que de cibler uniquement le « handicap neuromoteur » pourrait être discriminatoire. Le Collège des médecins a d’ailleurs demandé d’élargir l’accès à « toutes les personnes lourdement handicapées ».

Devant l’absence de consensus, la députée libérale Jennifer Maccarone avait proposé d’organiser un « forum » parallèle pour étudier la question qui n’a jamais fait l’objet d’un débat au Québec. « Je remercie la ministre pour son ouverture de poursuivre avec un comité d’experts, ce qui va alimenter la réflexion avant qu’on entame la prochaine étape de ce projet de loi qui sera l’étude détaillée », a souligné la libérale.

Ce comité d’experts sera composé de professionnels du milieu médical et de personnes vivant avec un handicap. Ceux-ci disposeront de trois semaines pour livrer leurs recommandations. Le gouvernement pourrait ensuite tenir une consultation populaire ou un forum pour faire connaître les conclusions de ce comité d’experts. La formule de l’exercice n’a pas encore été établie.

L’objectif est toujours d’adopter le projet de loi d’ici la fin de la session parlementaire, a précisé Mme Bélanger.

« Le mandat qu’on va donner au comité d’experts, essentiellement, c’est de tenter de nous définir ce que pourrait vouloir dire le handicap neuromoteur, de nous définir la notion de handicap, de nous définir également la notion de déficience et d’incapacité, qui nous a été recommandée par quelques acteurs pendant les auditions », a expliqué la députée de Québec solidaire Christine Labrie.

« Le mandat n’est pas d’exclure complètement le handicap », a nuancé la ministre Bélanger, mais de « guider » les parlementaires sur la notion du handicap neuromoteur.

« L’objectif n’est pas purement et simplement d’harmoniser la loi québécoise au fédéral, mais de continuer à avoir un Québec qui progresse dans le sens de ses valeurs et d’un consensus social le plus large possible dans cette matière qui est éminemment délicate », a affirmé le député péquiste Joël Arseneau.

Le Collège des médecins soulignait en commission parlementaire que le Code criminel « ne qualifie aucunement la notion de handicap » et demandait que le Québec laisse tomber le critère « neuromoteur » pour que « la loi québécoise accorde en toute équité l’accès à ce soin ».