Douleurs chroniques, infections à répétition, invalidité : après s’être fait poser des bandelettes pour régler leur problème d’incontinence urinaire, des milliers de Québécoises se retrouvent avec des complications. Par manque d’accès ou de confiance dans le nouveau programme spécialisé du Québec, plusieurs, comme Johanne Ouellette, vont se faire soigner aux États-Unis.

Des centres d’expertise qui se font attendre

Des milliers de Québécoises souffrent de complications liées à la pose de leurs bandelettes sous-urétrales. Annoncés il y a deux ans, les centres spécialisés devant les accueillir ne sont pas encore tous fonctionnels, a appris La Presse.

En mars 2021, le ministère de la Santé et des Services sociaux a annoncé un nouveau programme⁠1 de prise en charge de l’incontinence urinaire et de la gestion des complications liées aux bandelettes sous-urétrales. Une enquête⁠2 du Collège des médecins publiée en 2020 en faisait la recommandation.

Deux ans plus tard, ce programme n’est toujours pas pleinement fonctionnel. « Le recrutement du personnel a été plus difficile, durant les premiers mois de déploiement dû à la pandémie, et reste toujours précaire vu l’état des ressources humaines dans le réseau », a indiqué à La Presse Marjorie Larouche, des relations avec les médias du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

« Force est de constater que la situation ne représente pas encore suffisamment les soins que nous devons offrir », a-t-on aussi indiqué au cabinet du ministre de la Santé, Christian Dubé. « Nous tenons à être clairs : toutes les femmes dont la situation médicale le requiert pourront se faire opérer. Nous allons nous assurer que cela soit accessible et sans frais. »

Des bandelettes quoi ?

Les bandelettes sous-urétrales sont des dispositifs en treillis de polypropylène, qui ressemblent à un filet. Elles sont posées sous les organes génitaux des femmes par chirurgie depuis une vingtaine d’années, pour lutter contre l’incontinence urinaire à l’effort. Un problème qui touche une femme sur sept⁠3.

Il s’agit d’une intervention chirurgicale banale, considérée comme permanente, souligne la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ). En effet, bien que simples à installer, les bandelettes fusionnent ensuite avec les chairs, les os, les muscles, parfois les nerfs, et deviennent très difficiles à retirer.

À la suite de la pose de bandelettes, entre 4 % et 12 % des patientes peuvent développer des effets secondaires, comme des douleurs chroniques invalidantes à l’aine, dans les cuisses, le pubis, l’abdomen, le dos, le vagin et le périnée, selon la FMSQ⁠3.

D’autres complications, comme l’érosion de la paroi vaginale – allant jusqu’à la perforation du vagin ou de la vessie – et des infections urinaires à répétition, ont aussi été rapportées, indique le Collège des médecins.

PHOTOMONTAGE LA PRESSE

Bien que simples à installer, les bandelettes sous-urétrales fusionnent ensuite avec les chairs, les os, les muscles, parfois les nerfs, et deviennent très difficiles à retirer.

Au moins 80 000 femmes se sont fait poser des bandelettes sous-urétrales au Québec depuis 2000, selon la FMSQ. En se basant sur ce nombre, il est possible d’estimer qu’entre 3000 et 10 000 Québécoises font face à des complications.

Des retraits au Québec et aux États-Unis

Le MSSS a annoncé en mars 2021 l’implantation de quatre centres spécialisés pour prendre en charge les cas complexes liés aux bandelettes sous-urétrales. Deux sont situés à Montréal, un à Québec et un à Sherbrooke.

Entre le 1er avril 2021 et le 3 décembre 2022, ces centres ont procédé à 58 retraits partiels ou totaux de bandelettes, selon les données fournies par le MSSS.

Pendant une période semblable, soit de mars 2021 à mars 2023, au moins 136 Québécoises auraient plutôt opté pour une opération aux États-Unis, à leurs frais, selon les données de Cynthia Gagné, qui offre un service d’accompagnement en ce sens – L’expérience Ameshée – et qui administre un groupe de soutien Facebook.

Les femmes se tournent vers les États-Unis par manque d’accès ou de confiance envers le système québécois, avons-nous pu constater sur le groupe Facebook privé de quelque 1200 membres administré par Cynthia Gagné (voir textes suivants).

Depuis l’annonce de l’implantation des centres d’expertise en mars 2021, la RAMQ nous a confirmé ne plus indemniser les femmes qui choisissent d’aller se faire opérer hors du Québec. Et ce, même si le Collège des médecins recommandait, en 2020, que les remboursements de ces patientes se poursuivent « d’ici à ce que les centres d’expertise au Québec soient pleinement fonctionnels ».

32 : Nombre de retraits de bandelettes effectués au Québec du 1er avril 2021 au 31 mars 2022

16 : Nombre de retraits de bandelettes effectués au Québec du 1er avril 2022 au 3 décembre 2022

Source : ministère de la Santé et des Services sociaux

Des retards et des écueils

Deux ans après son annonce, le centre d’expertise chapeauté par le CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal n’est toujours pas implanté, a appris La Presse. « Nous sommes à organiser les ressources additionnelles qui viennent avec la désignation de centre de référence, a indiqué par courriel le spécialiste de relations avec les médias Carl Thériault à la mi-février. Mais nos infirmières, nos physiothérapeutes et nos urologues spécialisés dans la pose et le retrait de bandelettes continuent de traiter depuis plusieurs années les patientes », a-t-il précisé.

Selon nos informations, les trois autres centres spécialisés se disent fonctionnels, mais des bémols s’imposent.

Le centre spécialisé du CHUM a commencé à accueillir des patientes en septembre 2021, devenant par le fait « le premier et le seul centre d’expertise au Québec à offrir ces soins », a souligné Andrée-Anne Toussaint, des relations avec les médias.

Mais « la complexité et la lourdeur des cas à traiter, reliées au nombre relativement limité d’intervenants, ont ralenti la mise en place du service », avait aussi précisé une autre relationniste, Justine Lesage, en décembre. Depuis l’implantation du service, 70 femmes ont été traitées au CHUM et 75 autres sont en évaluation, selon les informations fournies par le CHUM.

Au CHU de Québec – Université Laval, le déploiement « se poursuit pour une mise en service à pleine capacité à l’automne 2023 », a indiqué Bryan Gélinas, conseiller aux affaires publiques et gouvernementales. Au total, 28 femmes avaient été traitées dans ce centre spécialisé en date de décembre 2022, a précisé M. Gélinas.

À Sherbrooke, le CHU de l’Estrie a affirmé que son centre de référence est fonctionnel, malgré des retards liés à la pandémie et à la pénurie de personnel. Le remplacement d’une infirmière était en cours en mars. Entre avril 2021 et avril 2022, les spécialistes du centre ont posé six bandelettes sous-urétrales, et en ont retiré neuf, a rapporté Nancy Corriveau, conseillère en communications pour ce CIUSSS.

Un manque d’accès et de références

Une douzaine de « centres secondaires » régionaux spécialisés en incontinence urinaire ont aussi été désignés par le MSSS dans le cadre du nouveau programme. Leur rôle est d’offrir des services multidisciplinaires aux patientes aux prises avec de l’incontinence urinaire et de les diriger vers les centres d’expertise au besoin.

Environ 40 % de ces centres secondaires manquent de ressources, selon un constat fait l’été dernier par l’Association des obstétriciens-gynécologues du Québec (AOGQ).

« Parfois, il n’y avait pas le personnel infirmier, ou pas de physiothérapeutes, ou pas de locaux, illustre la Dre Martine Bernard, secrétaire de l’AOGQ. Pour nous, ç’a été un réveil, parce que c’est bien beau d’avoir accès, mais il faut que la clientèle soit capable d’avoir des soins. »

Les centres secondaires ne sont pas tous déployés

Malgré des retards liés à la pandémie, le CISSS des Laurentides, deux CIUSSS montréalais (Centre-Sud et Est) et le CIUSSS de la Mauricie – Centre-du-Québec ont indiqué avoir les ressources en place dans leurs centres secondaires pour traiter les patientes, selon une demande d’information envoyée par La Presse.

Au CISSS du Bas-Saint-Laurent, une partie des ressources humaines est en place, mais il n’y a pas de local consacré au programme.

En revanche, du côté de Chaudière-Appalaches et de l’Abitibi-Témiscamingue, la pénurie de main-d’œuvre a empêché le déploiement des centres secondaires à ce jour, ont indiqué ces deux CISSS par courriel. Le CISSS de la Montérégie-Est nous a dirigée vers le MSSS en disant « travailler de très près » avec lui sur le dossier.

Deux autres CISSS, ceux de Laval et de l’Outaouais, n’ont pas de centre secondaire. « Nous n’avons pas de projet pour développer le centre secondaire pour l’incontinence urinaire », a indiqué le CISSS de l’Outaouais par courriel. De son côté, le CISSS de Laval « a informé le MSSS qu’il ne disposait pas des ressources requises […] pour répondre à la désignation de centre secondaire » et a donc « été retiré des établissements désignés à ce programme », a indiqué ce CISSS par courriel.

Le CISSS du Saguenay–Lac-Saint-Jean ne nous a jamais répondu.

1. Consultez le programme du gouvernement du Québec 2. Consultez l’étude du Collège des médecins 3. Consultez le site de la Fondation d’aide aux personnes incontinentes 4. Consultez le dossier de la Fédération des médecins spécialistes du Québec

« J’ai retrouvé une vie de femme »

Un « calvaire », des douleurs « intolérables » et un manque de confiance dans les soins prodigués au Québec : une femme témoigne de son parcours pour se faire soigner, après la pose d’une bandelette contre l’incontinence urinaire.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Johanne Ouellette

Quand elle a eu un rendez-vous téléphonique avec le nouveau centre d’expertise du CHUM, en juillet dernier, Johanne Ouellette ne savait pas trop à quoi s’attendre. Elle s’y était fait diriger par un urologue et un gynécologue de Joliette, dans Lanaudière, en raison d’une infection due à l’érosion de sa bandelette sous-urétrale.

Depuis un an, du pus et du sang coulaient en continu de son méat urinaire, ce à quoi s’ajoutaient des infections urinaires et de la vessie, raconte-t-elle. Elle avait consulté les urgences à répétition, pris « neuf sortes d’antibiotiques », déplore-t-elle, sans amélioration à son état. Elle n’était plus en mesure d’avoir de relations sexuelles depuis plus de deux ans. Depuis la pose de sa bandelette, en 2007, elle souffrait de douleurs chroniques aux jambes et aux genoux.

Au téléphone, on a indiqué à Mme Ouellette que le CHUM était alors le seul centre d’expertise sur les complications liées aux bandelettes fonctionnel au Québec. En raison de la COVID-19, il aurait été fermé pendant plusieurs mois. Malgré l’urgence de la situation de Mme Ouellette, on lui dit qu’elle ne pourrait être vue avant de quatre à six mois. La Presse a eu accès à l’enregistrement de cette conversation, sans pouvoir l’authentifier.

« Le délai d’attente est d’environ 6 mois [en mars 2023], a indiqué Andrée-Anne Toussaint, des relations avec les médias du CHUM, par courriel. Les cas qui nous sont référés sont complexes et commandent du temps, et ce, dans un contexte où les ressources sont fortement sollicitées pour un ensemble de pathologies, qui elles aussi sont lourdes et complexes. »

Entre le Québec et les États-Unis

Dans une enquête de Radio-Canada diffusée en 2019, plusieurs femmes ont témoigné avoir subi des opérations de retrait partiel de leur bandelette au Québec, alors qu’on leur assurait que la bandelette avait été retirée complètement. Ces femmes s’étaient ensuite rendues aux États-Unis, où des longueurs supplémentaires de filets de plastique leur avaient été enlevées.

Ce reportage a créé une fracture dans la confiance des Québécoises aux prises avec ces complications, confirme la Dre Martine Bernard, de l’Association des obstétriciens-gynécologues du Québec, elle-même urogynécologue pour le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.

Il y a une méfiance de la part des patientes. Les professionnels d’ici partent un pas en arrière, ils doivent prouver qu’ils sont capables de faire [l’intervention chirurgicale]. Les patientes veulent voir les photos [des bandelettes retirées], le rapport de pathologie. C’est une clientèle qui a été échaudée.

La Dre Martine Bernard, de l’Association des obstétriciens-gynécologues du Québec

« Depuis 2020, des médecins se sont mis à niveau pour cette technique spécifique [de retrait des bandelettes] par des formations dans des congrès ou auprès de collègues », soutient le Collège des médecins par courriel.

Un spécialiste aux États-Unis

En parallèle de sa prise en charge par le CHUM, Mme Ouellette a entamé des démarches pour subir une opération aux États-Unis. Au Missouri, un chirurgien spécialisé, le DDionysios Veronikis, reçoit des femmes de partout dans le monde pour leur retirer des bandelettes sous-urétrales.

Ce médecin a étudié le dossier de Mme Ouellette et lui a recommandé le retrait complet de sa bandelette le plus rapidement possible. « Ma méthodologie diffère de celle d’autres chirurgiens, parce que je traite des complications liées aux bandelettes sous-urétrales depuis 25 ans, a indiqué le Dr Veronikis par courriel à La Presse. J’ai vu les résultats déplorables chez des femmes ayant subi un retrait partiel, et souvent de multiples retraits partiels, et qui continuent de souffrir quotidiennement. »

Puis, début septembre, une urologue spécialisée du CHUM a rappelé Mme Ouellette. Encore une fois, La Presse a eu accès à l’enregistrement de cette discussion, sans pouvoir l’authentifier.

Au téléphone, cette spécialiste a encouragé Mme Ouellette à se renseigner sur les risques liés à un retrait complet de bandelette. Selon cette spécialiste, Mme Ouellette avait 90 % de risques de devenir complètement incontinente si elle allait de l’avant avec cette intervention. Elle risquait aussi de perdre de la mobilité dans sa jambe. Contacté par La Presse à ce sujet, le CHUM n’a pas pu se prononcer sur le cas spécifique de Mme Ouellette.

« L’équipe travaille très fort à offrir des soins spécialisés, de l’investigation de la douleur jusqu’aux traitements, aux patientes dont les cas sont les plus complexes », a soutenu Mme Toussaint, du CHUM, par courriel.

Opérée au Missouri

Mme Ouellette a finalement tranché en faveur du DVeronikis aux États-Unis. La sexagénaire est partie au Missouri en septembre, en compagnie de sept autres femmes du Québec et de la France. Elle a subi son opération le 23 septembre.

Selon le rapport opératoire consulté par La Presse, elle souffrait en raison d’une bandelette urétrale infectée, d’une cavité d’abcès chronique et de fistule urétrale.

Dès le lendemain de l’opération, Mme Ouellette a été capable de marcher et de monter les escaliers, assure-t-elle. Elle n’est jamais devenue incontinente. Elle a déposé une plainte au Collège des médecins, estimant s’être fait mal évaluer par la spécialiste du CHUM. Elle a fait une demande d’indemnisation par la RAMQ pour les frais découlant de son opération aux États-Unis, sans succès.

« J’ai retrouvé une vie de femme, se réjouit-elle, malgré tout. J’ai repris ma vie, j’ai recommencé à travailler ! »

Des approches médicales qui diffèrent

Le milieu médical avance encore à tâtons dans la question d’une meilleure prise en charge des complications majeures liées aux bandelettes sous-urétrales, a confirmé le Collège des médecins à La Presse.

En 2020, le Collège des médecins (CMQ) avait reconnu qu’il existe « peu de publications [scientifiques] sur les effets indésirables à long terme liés à la mise en place d’une bandelette » et, par conséquent, sur la meilleure prise en charge des patientes.

Trois ans plus tard, la littérature scientifique a progressé, mais « on n’a pas, à ce jour, de grandes études qui nous permettent de dire hors de tout doute : c’est ça qu’il faut faire », a expliqué à La Presse le DStéphane Ouellet, gynécologue obstétricien et inspecteur au Collège des médecins. Une approche multidisciplinaire pour prendre en charge les cas de complications complexes est préconisée, souligne-t-il.

L’implantation des quatre centres spécialisés vise d’ailleurs à contribuer à la littérature mondiale sur la question, a renchéri la Dre Isabelle Tardif, directrice générale adjointe et secrétaire du Collège.

Un « système de surveillance » des complications liées aux bandelettes doit être mis en place dans les centres spécialisés, selon la recommandation du Collège de 2020. Ce système n’a toujours pas été déployé, a indiqué la Dre Tardif.

Craintes et désinformation

Cette approche fait craindre à Cynthia Gagné que certaines femmes d’ici servent de « cobayes » en recevant des soins au Québec. Sur son groupe de soutien, de nombreuses femmes témoignent de complications après avoir reçu des soins au Québec, par comparaison à ceux reçus aux États-Unis.

Après avoir elle-même subi une opération réussie avec le DDionysios Veronikis aux États-Unis en 2019, Cynthia Gagné offre depuis la fin de l’année 2020 L’expérience Ameshée, un service d’accompagnement payant aux femmes qui veulent s’y rendre.

Ce service inclut notamment des frais de transport, hébergement, nourriture, traduction, etc. L’intervention chirurgicale elle-même coûte en moyenne 20 000 $, selon Mme Gagné.

« Offrir un service d’accompagnement était pour moi devenu tout à fait logique après deux années de don de moi à constater le besoin d’aide [des femmes] et le manque de ressources au Québec, a tenu à expliquer à La Presse Cynthia Gagné. J’ai décidé de quitter mon emploi et j’ai maintenant la chance d’aider des femmes de partout dans le monde de manière concrète. »

Le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) estime que de la « désinformation » circule sur les différents groupes de soutien Facebook quant aux services disponibles et à la compétence des médecins du Québec, a-t-il affirmé à La Presse par courriel.

« Nous sommes grandement préoccupés par cette désinformation qui induit en erreur les femmes sur la disponibilité et la qualité des services du Québec et qui les redirige vers un service en anglais, dans un autre pays, qui exige un déplacement ainsi que des coûts importants (3000-5000 $ supplémentaires pour le service d’accompagnement), et qui n’offre aucun suivi postopératoire », a indiqué par courriel Marjorie Larouche, des affaires avec les médias du MSSS.

Le DVeronikis et le Québec

Même si des dizaines de Québécoises décident de se faire opérer aux États-Unis, ni le Collège des médecins ni le MSSS ne sont entrés en contact avec le DVeronikis, ont confirmé les deux instances à La Presse. Le Collège des médecins n’exclut toutefois pas de le faire dans l’avenir.

Le DVeronikis n’a jamais publié les résultats de sa pratique et il n’y a donc jamais eu de validation par ses pairs. En termes de sécurité et de qualité des soins, il n’y avait aucune donnée probante publiée qui soutenait sa pratique. De plus, le DVeronikis opère les femmes sans assurer de suivi post-opératoire.

Noémie Vanheuverzwijn, des relations avec les médias du MSSS, dans un courriel

Les succès du DVeronikis seraient connus de bouche à oreille, mais pas de la communauté scientifique, a insisté la Dre Tardif, du CMQ.

Le MSSS a échangé en octobre 2020 avec le gouvernement écossais, qui partageait alors les mêmes préoccupations, a ajouté Mme Vanheuverzwijn. L’Écosse a depuis changé son fusil d’épaule et conclu une entente avec le DVeronikis, en juillet 2022, pour que les patientes écossaises atteintes de complications puissent être opérées par ses soins.

Au Québec, des spécialistes auraient par le passé invité le DVeronikis à participer à des conférences au Canada, ce qu’il aurait décliné, a affirmé le DAlain Maillette, président de l’Association des urologues du Québec. Ces spécialistes auraient même tenté d’être formés sur ses techniques de chirurgie, sans succès.

« Je n’ai jamais reçu un appel du Collège des médecins ou d’aucun membre de la profession médicale du Québec », a assuré le DVeronikis à La Presse par courriel.

Des douleurs pour la vie

Pour celles qui souffriront toute leur vie en raison de la pose d’une bandelette sous-urétrale, une indemnisation devrait être allouée, estime Chantale Dufour, l’une d’elles.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Chantale Dufour

Mme Dufour n’avait pas été informée des risques lors de la pose de sa bandelette sous-urétrale en 2011, soutient-elle. Et malgré deux retraits partiels au Québec et un retrait complet aux États-Unis, elle souffre toujours.

« Le DVeronikis, il l’a guérie à 90 % », estime son conjoint, Richard Prémont. Mme Dufour peut désormais marcher, ce qui n’était plus le cas avant cette opération. Mais, déplore-t-elle : « j’ai tout le temps des douleurs ».

Des fabricants poursuivis en justice

Au Canada, quatre recours collectifs ont été intentés contre des fabricants de bandelettes sous-urétrales. L’un d’eux, contre l’entreprise Coloplast, est en cours par le cabinet Lambert Avocats. En 2019 et 2020, deux autres recours – contre American Medical Systems Canada Inc et Boston Scientific – se sont soldés par des ententes de plus de 20 millions de dollars en compensation à toutes les personnes au Canada qui se sont fait poser ce type de bandelettes, peu importe le mode de la chirurgie ou les complications vécues.