À deux reprises depuis 2020, Santé Canada a refusé que l’Ordre des chimistes du Québec effectue une inspection professionnelle auprès de l’un de ses employés. L’organisme fédéral a refusé en janvier que les enquêteurs de l’Ordre mettent les pieds dans ses bureaux de Longueuil, qui abritent notamment son Service d’analyse des drogues.

Déplorant une « entrave » au travail de ses inspecteurs, l’Ordre des chimistes du Québec, qui a le mandat de protéger le public et de surveiller la pratique de ses membres, a déposé le 18 janvier une demande d’injonction afin de forcer Santé Canada à lui donner accès à ses locaux.

Dans la requête, on peut lire que l’un des employés de Santé Canada travaillant dans un « secteur de pratiques à risques », soit le secteur pharmaceutique, a été choisi de façon aléatoire par le programme d’inspection professionnelle de son ordre.

En octobre 2022, un inspecteur de l’Ordre des chimistes a annoncé à l’employé en question qu’il ferait l’objet d’une inspection professionnelle sur son lieu de travail à Longueuil. Les procureurs de Santé Canada ont toutefois refusé en déclarant que « Sa Majesté n’est pas liée par les lois provinciales relatives aux ordres professionnels », peut-on lire dans la demande d’injonction.

Pas la première fois

En décembre, le secrétaire et directeur général de l’Ordre des chimistes, Patrick Paquette, a écrit aux procureurs de Santé Canada pour déplorer qu’il « ne [s’agisse] pas de la première occasion où l’Ordre des chimistes se retrouve face à des problématiques liées à l’inspection professionnelle d’un de ses membres exerçant au sein du gouvernement du Canada ». À l’automne 2020, une situation similaire s’était produite avec une autre chimiste de Santé Canada. Plutôt que de se soumettre à une son inspection, l’employée de l’époque n’avait tout simplement pas renouvelé son statut de membre de l’Ordre des chimistes du Québec.

En janvier, les procureurs de Santé Canada ont réitéré qu’ils ne permettraient pas l’accès à leurs locaux. L’Ordre des chimistes s’est donc tourné vers les tribunaux. Dans sa demande d’injonction, l’Ordre estime que la position de Santé Canada « constitue une violation claire et injustifiable [des] dispositions du Code des professions » et se dit « préoccupé » par la situation.

Questionné sur le sujet, Santé Canada n’a pas voulu faire de commentaires « puisque le litige est devant les tribunaux ». L’organisme précise toutefois que l’employé visé ne travaille pas au Service d’analyse des drogues. Que « les analyses effectuées à Santé Canada font l’objet de contrôles de qualité rigoureux », que ses installations « rencontrent les exigences de l’Organisation internationale de normalisation pour les laboratoires d’essais et d’étalonnage » et que « les laboratoires des produits de santé détiennent une attestation de la Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé ».

Santé Canada est-elle le seul organe fédéral à rejeter la compétence des ordres provinciaux ? Présidente du Conseil interprofessionnel du Québec, qui regroupe les ordres professionnels de la province, Danielle Boué affirme préparer actuellement un état de situation sur la question afin de déterminer la suite des choses. D’autres professionnels travaillant dans des organismes fédéraux font partie d’ordres professionnels au Québec, comme des avocats et des ingénieurs.

Précision
Ce texte a été modifié pour préciser que l’employé de Santé Canada visé par l’inspection de l’Ordre des chimistes du Québec ne travaille pas au Service d’analyse des drogues, mais bien dans un autre service non précisé par l’organisme.