Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, durcit le ton face aux provinces qui réclament depuis plusieurs mois une hausse substantielle des transferts en santé sans aucune condition.

« Envoyer des transferts inconditionnels aux ministres des Finances des provinces, ce n’est pas un plan en santé », a laissé tomber M. Duclos, qui a aussi insisté pour dire que les provinces doivent « faire les choses différemment » afin de régler la crise qui secoue le réseau de la santé à travers le pays.

Le ministre Duclos a ainsi écarté avec plus de force l’idée qu’Ottawa acquiesce à la demande des provinces d’augmenter de 28 milliards de dollars par année les transferts en santé. Une telle hausse ferait en sorte qu’Ottawa assumerait 35 % de la facture totale liée aux soins de santé, contre 22 % aujourd’hui, selon les calculs des provinces.

PHOTO ASHLEY FRASER, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos

M. Duclos a tenu ces propos à la Chambre des communes, mardi, après avoir été interpellé par le Bloc québécois et après que le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a réitéré son intention de mettre fin à l’entente qu’il a conclue au printemps avec les libéraux si le gouvernement Trudeau ne s’attaque pas à la crise qui secoue le réseau de la santé en augmentant les transferts dès le prochain budget fédéral, entre autres choses.

Cette entente doit assurer la survie politique des libéraux, qui sont minoritaires aux Communes, jusqu’en juin 2025.

Une rencontre avec les provinces réclamée

La semaine dernière, les premiers ministres des provinces ont réclamé la tenue d’une rencontre avec Justin Trudeau dès le début de la nouvelle année afin de discuter de ce dossier qui empoisonne de plus en plus les relations fédérales-provinciales.

M. Trudeau doit rencontrer le premier ministre François Legault vendredi à Montréal. Dans son entourage, on a indiqué mardi que le dossier du financement de la santé est à l’ordre du jour de cette rencontre, de même que les cibles ambitieuses du gouvernement fédéral en matière d’immigration.

Aux Communes, le Bloc québécois s’est fait le porte-parole des provinces en pressant le premier ministre Justin Trudeau de rencontrer ses homologues provinciaux.

« Ça fait 27 mois qu’ils ont chiffré leurs besoins et qu’ils réclament une rencontre. Ça fait 27 mois que le premier ministre les ignore. Ça fait 27 mois que la capacité de soigner la population continue de se dégrader dans nos hôpitaux », a tonné le député bloquiste Mario Simard.

Cette impasse qu’entretient le premier ministre, elle se fait au détriment des malades et du personnel soignant.

Mario Simard, député du Bloc québécois

« La vraie raison de l’impasse, c’est que le fédéral ne veut pas payer 35 % des coûts en santé. Pendant ce temps, dans les hôpitaux, on empile les gens sur des civières par manque de lits et on fait voyager des enfants sur 500 kilomètres pour les soigner. Ça ne peut plus continuer ainsi. Le fédéral doit assumer sa responsabilité », a renchéri le député bloquiste Luc Thériault.

Le ministre Duclos est resté de marbre. Il a affirmé qu’Ottawa donne déjà un sérieux coup de pouce financier aux provinces. « Investir en santé, c’est exactement ce qu’on fait depuis déjà plusieurs années avec la COVID-19 », a lancé le ministre.

« Il y a eu 72 milliards de dollars additionnels au Transfert canadien en matière de santé. Au cours des dernières semaines, il y a eu deux milliards de dollars supplémentaires pour réduire les délais en matière de traitement, de chirurgie et de diagnostic, et neuf milliards de dollars en plus en santé mentale, soins à domicile et soins de longue durée. En plus, on a promis qu’il allait y en avoir davantage, mais il y a déjà beaucoup d’argent et il faut faire les choses différemment parce que les Canadiens et les Québécois ont besoin que ce soit le cas. »

Motion déraillée

Le Bloc québécois est revenu à la charge, après la période des questions, en proposant une motion à la Chambre des communes exhortant le premier ministre à rencontrer ses homologues provinciaux au début de l’année, mais des députés libéraux ont fait dérailler la manœuvre en refusant de donner leur consentement pour qu’elle soit adoptée.

En mêlée de presse avant la période de questions, le chef du NPD, Jagmeet Singh, a indiqué qu’il a clairement fait savoir au premier ministre, lors d’une rencontre qu’il a eue avec lui lundi, que le prochain budget fédéral sera un test décisif pour la suite des choses.

« C’est clair que nous avons une crise de santé pédiatrique. Il faut des actions concrètes pour faire face à cette crise. C’est clair que le premier ministre manque de leadership et il doit rencontrer les premiers ministres des provinces pour trouver des solutions et régler cette crise », a déclaré le chef néo-démocrate.