Le Québec connaît une pénurie d’analgésiques d’usage courant au point que les pharmacies sont rationnées quant à la quantité qu’elles peuvent commander de ces médicaments vendus sans ordonnance servant à traiter la fièvre et la douleur.

« Des problèmes d’approvisionnement en acétaminophène et en ibuprofène (connus respectivement sous les noms commerciaux de Tylenol et d’Advil) en formats liquides sont actuellement observés pour plusieurs fournisseurs des pharmacies communautaires et des établissements de santé », a confirmé le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), jeudi.

Selon le MSSS, cette problématique touche particulièrement ces deux types d’analgésiques en formats liquides, soit la forme utilisée pour traiter les enfants et les personnes ayant de la difficulté à avaler.

Mais la pénurie toucherait également tous les produits pour adultes visant à traiter les symptômes du rhume ou de la grippe, a indiqué à La Presse le directeur général de l’Association québécoise des distributeurs en pharmacie (AQDP), Hugues Mousseau.

Une forte demande

La demande de ces médicaments, cet été à travers la province, aurait été supérieure de 150 à 200 % à la normale en cette période de l’année, selon des chiffres de l’AQDP, une situation due en bonne partie à la septième vague de COVID-19, comme le souligne également le MSSS.

« Une demande importante et plus subite au cours des derniers mois attribuable aux récentes vagues de la COVID-19 semble avoir engendré une pression sur les fournisseurs qui se traduit par des problèmes dans la continuité de l’approvisionnement », précise la porte-parole du MSSS, Marjorie Larouche.

Face à cette forte demande, les producteurs n’auraient pas été en mesure de hausser suffisamment leur production, confirme Hugues Mousseau. À noter, il ne s’agit pas d’une situation propre au Québec. Elle s’observe partout au Canada.

« C’est ce qui a fait en sorte que nous, [les grossistes], on a dû puiser dans nos réserves, explique Hugues Mousseau. Ça a entraîné la situation de pénurie qu’on connaît actuellement. » Si ces produits continuent d’être livrés de façon continue, ils le sont toutefois en quantité insuffisante, ajoute-t-il.

Les pharmacies rationnées

Des « filtres » ont donc été établis afin de permettre à toutes les pharmacies de la province de commander une certaine quantité de médicaments chaque jour, indique Hugues Mousseau.

« Il apparaît important de rappeler à la population de procéder à l’achat de ces produits en fonction de réels besoins de santé dans l’immédiat et d’éviter de faire des achats superflus afin d’éviter d’accentuer les problèmes de disponibilité », précise le MSSS.

Une des solutions envisagées est de ranger les analgésiques à usage courant derrière le comptoir des pharmaciens pour en limiter l’accès, comme cela s’est fait lors de la pénurie de lait maternisé plus tôt cet été, dit Hugues Mousseau.

Pour l’instant, on essaie surtout de travailler avec les fabricants. Tous les scénarios sont étudiés en ce moment pour voir comment on peut réussir à répondre à la forte demande et à regarnir les niveaux d’inventaires en pharmacie et chez les grossistes.

Hugues Mousseau, directeur général de l’Association québécoise des distributeurs en pharmacie

Cette pénurie pourrait perdurer encore « plusieurs semaines », calcule Hugues Boisseau, soit au-delà de la rentrée scolaire.

Du côté de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires, on invite les clients à s’adresser à leur pharmacien si jamais l’analgésique qu’ils cherchent n’est pas offert sur les rayons dans le cas des médicaments pour enfants, plus rares.

« [Le pharmacien] pourrait faire des ajustements de doses. Si un produit est disponible pour les [enfants de] 24 mois et qu’un enfant est plus vieux, il est possible de faire des ajustements », précise la porte-parole Marilie Beaulieu-Gravel.

Des hôpitaux à court d’analgésiques

Deux hôpitaux pédiatriques de l’Ontario ont affirmé plus tôt cette semaine devoir composer avec des pénuries d’analgésiques d’usage courant.

Les directions de l’Hôpital pour enfants malades de Toronto et du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO) situé à Ottawa ont précisé qu’elles prenaient des mesures pour maintenir l’approvisionnement en Tylenol liquide et Advil pour les patients hospitalisés et aider à trouver des solutions pour les enfants qui reçoivent leur congé.

Une porte-parole de l’hôpital de Toronto a précisé que si certains détaillants peuvent avoir ces médicaments vendus sans ordonnance en stock, d’autres pharmacies peuvent n’avoir que de grands flacons qui ne peuvent être remis que par un pharmacien.

Pour le moment, les principaux hôpitaux pédiatriques de Montréal ne semblent pas affectés par cette pénurie.

L’Hôpital de Montréal pour enfants dit avoir suffisamment d’acétaminophène et d’ibuprofène pour le moment. Des plans sont aussi en place s’il devait survenir une telle situation, a précisé une porte-parole de l’établissement, Christine Bouthillier.

Le CHU Sainte-Justine indique aussi ne pas avoir « de difficulté d’approvisionnement d’analgésiques d’usage courant ». « Bien que l’hôpital dispose d’une quantité suffisante de ces solutions pour les patients, la situation est surveillée de près », indique-t-on.

Avec La Presse Canadienne