(Halifax) Des chercheurs affirment que la prévalence des tiques porteuses de la maladie de Lyme devrait être plus élevée que jamais dans la majeure partie du Canada cette année.

Vett Lloyd, chercheur et directeur du Lloyd Tick Lab de l’Université Mount Allison, au Nouveau-Brunswick, affirme qu’à cause du progrès des changements climatiques, chaque saison de tiques sera probablement pire que la précédente.

« Alors que les hivers deviennent plus doux et plus courts, les tiques survivent mieux et elles ont plus de temps pour se nourrir et se reproduire », a déclaré M. Lloyd dans une récente entrevue. « Une fois qu’une tique femelle trouve un mâle et de la nourriture, elle peut produire environ 3000 œufs. La population explose alors très rapidement. »

La Nouvelle-Écosse a le ratio le plus élevé de tiques par habitant au Canada et se classe deuxième derrière l’Ontario pour le nombre total de tiques signalées. Mais les arachnides peuvent être trouvés partout au Canada.

Vett Lloyd signale que les tiques sont actives de la fin d'avril jusqu’au mois de juin, puis, elles se reposent généralement pendant les mois les plus chauds. Leur présence culmine ensuite de la fin de septembre jusqu’en novembre.

Le petit arachnide est préoccupant, car il propage la maladie de Lyme, qui est nocive pour les humains et les animaux domestiques. Toutes les tiques ne sont pas porteuses de la bactérie de la maladie de Lyme, mais les tiques du cerf à pattes noires sont les plus susceptibles d’être infectées, selon le chercheur.

Les cas de la maladie transmise par les tiques ont augmenté de 150 % au Canada entre 2020 et 2021, avec près de 2900 cas signalés aux autorités fédérales l’an dernier. Le décompte ne tient pas compte des cas qui n’ont pas été détectés ou signalés.

Le signe le plus courant de la maladie de Lyme est une éruption cutanée en expansion qui commence généralement au site de la piqûre de la tique. Les autres symptômes précoces comprennent la fièvre, les frissons, la fatigue et les maux de tête.

Si elle n’est pas traitée, l’infection peut se propager aux articulations, au cœur et au système nerveux.

Justin Wood, qui dirige l’organisme ontarien de test des tiques Geneticks, a lui aussi observé que l’activité des tiques ne cesse d’augmenter. « Je pense que tout le monde dira qu’il voit plus de tiques chaque année », a-t-il affirmé dans une entrevue. Le laboratoire de Geneticks a reçu plus de 400 tiques à tester au cours des six dernières semaines. Environ 1600 tiques ont été envoyées au laboratoire tout au long de la saison des tiques 2021.

Les tiques peuvent se reproduire localement et de nouvelles populations de tiques sont introduites sur les animaux migrateurs, généralement en se posant sur des oiseaux, selon Vett Lloyd. Les tiques voyagent également et se propagent localement sur des mammifères tels que les cerfs ou les souris.

L’Association canadienne des médecins vétérinaires indique sur son site Web que les tiques étendent leur aire de répartition dans certaines régions du Canada à un rythme d’environ 46 kilomètres par an.

En Ontario, une étude de 2019 de l’Université d’Ottawa a révélé qu’un tiers des tiques à pattes noires de la région d’Ottawa étaient porteuses de la maladie de Lyme.

Manisha Kulkarni, professeure agrégée à l’Université d’Ottawa qui étudie les tiques et les maladies transmises par les tiques, signale qu’au cours des cinq à 10 dernières années, les chercheurs ont remarqué « une grande expansion vers le nord » des tiques à pattes noires dans la région d’Ottawa.

« Les tiques sont détectées dans de plus en plus d’endroits autour de la ville d’Ottawa et plus près des zones où vivent les gens, il y a donc également plus de chances que des personnes entrent en contact avec elles », affirme-t-elle.

La Ville d’Ottawa a signalé 180 cas de maladie de Lyme en 2019, 120 en 2020 et 290 l’année dernière.

L’expansion vers le nord des tiques s’observe également au Québec. Virginie Millien, professeure agrégée de biologie à l’Université McGill, affirme que le déplacement des tiques signifie qu’elles peuvent maintenant être trouvées dans les zones suburbaines du sud de la province où elles ne vivaient même pas il y a cinq ans.

Il y a environ 10 ans, il y avait quelques endroits au Québec où les chercheurs trouvaient des populations de tiques établies, dit-elle ; elles étaient toutes du côté sud du fleuve Saint-Laurent.

« Maintenant qu’elles ont traversé le fleuve, et parce qu’il fait plus chaud et qu’il y a plus d’humidité, les conditions sont parfaites pour les tiques », selon Mme Millien. « Dans le sud du Québec, elles sont maintenant un peu partout, y compris dans mon jardin. »

En Nouvelle-Écosse, les tiques peuvent être n’importe où, mais elles sont plus nombreuses dans les régions du sud et de la vallée d’Annapolis. On les trouve aussi fréquemment à Halifax et dans les environs. Des chercheurs qui collectent et échantillonnent des tiques à pattes noires ont découvert qu’en Nouvelle-Écosse, de 30 % à 50 % d’entre elles sont porteuses de la maladie de Lyme.

Afin de garder la maladie de Lyme gérable pour les Canadiens qui pourraient être infectés, Vett Lloyd souhaite une augmentation des tests de dépistage de la maladie offerts dans le système de santé. La détection et le traitement précoces peuvent aider considérablement à réduire les effets néfastes de la maladie.

Les responsables de la santé conseillent également aux gens de faire preuve de diligence lorsqu’ils passent du temps à l’extérieur, ce qui signifie de porter des pantalons longs insérés dans les chaussettes, utiliser un insectifuge et vérifier soigneusement la présence de tiques près de la maison.