Après le Royaume-Uni, l’Espagne et le Portugal, c’est au tour du Québec d’enquêter sur une dizaine de cas suspects de variole du singe, ou monkeypox.

Le DDonald Vinh, infectiologue et microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill, espérait avoir une journée calme au boulot mercredi pour avancer ses travaux de recherche, mais ses plans ont été chamboulés par un message d’une collègue : « Cas suspect de variole du singe ».

Un homme, chez qui on avait récemment diagnostiqué une gonorrhée, s’était présenté à une clinique pour un rendez-vous de suivi. « Les lésions de sa peau ne semblaient pas typiques de la gonorrhée et l’échec du traitement suggérait que c’était autre chose. Avec l’apparence des lésions de sa peau et les informations qui circulaient aux nouvelles, ma collègue a soupçonné la variole du singe », explique le DVinh.

Cette situation n’est pas unique. « Pour le moment, le Québec n’a aucun cas confirmé de monkeypox, mais nous enquêtons sur une dizaine de cas de lésions ulcéreuses génitales », a indiqué à La Presse la porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux, Marjorie Larouche. Le Ministère a également été avisé qu’une personne ayant eu un diagnostic de variole du singe avait voyagé au Québec.

Résultats à venir

Lorsqu’il a été informé du cas probable, le DVinh s’est tout de suite mis au travail. « Pendant plusieurs heures, on a essayé de coordonner les échantillons et les tests nécessaires pour faire le diagnostic », raconte-t-il. Une tâche qui est loin d’être facile, soutient le médecin.

Quand un virus ou un microbe est rare, on n’a ni les protocoles ni les trousses pour le diagnostiquer.

Le DDonald Vinh, infectiologue et microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill

En fin de journée mercredi, les experts ont envoyé les échantillons au Laboratoire de santé publique du Québec, avant qu’ils ne soient transférés au Laboratoire national de microbiologie du Canada, à Winnipeg, un établissement hautement sécurisé. Les résultats devraient être obtenus au cours des prochaines 24 heures.

De son côté, l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) dit suivre la situation de près, tout en assurant qu’aucun cas ne lui a été signalé pour le moment. « L’ASPC a alerté les autorités provinciales et territoriales de la santé publique et les partenaires de laboratoire de tout le Canada pour qu’ils soient vigilants et enquêtent sur tout cas potentiel », a indiqué à La Presse la porte-parole de l’Agence, Anna Maddison.

Symptômes variés

Les symptômes les plus fréquents de cette infection sont la fièvre, les maux de tête, les douleurs musculaires, les maux de dos, les ganglions lymphatiques enflés, des frissons et de la fatigue. Des éruptions cutanées peuvent également survenir, souvent sur le visage, et se répandre à d’autres parties du corps, dont les parties génitales.

« La maladie peut être cliniquement confondue avec une infection sexuellement transmissible comme la syphilis ou l’herpès, ou avec le virus varicelle-zona », a indiqué mercredi le département de la Santé publique du Massachusetts, qui a enregistré un cas d’infection chez une personne ayant récemment voyagé au Canada.

Il n’existe pas de traitement contre la variole du singe, mais l’infection virale se guérit d’elle-même, soutient Benoit Barbeau, virologue et professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal. Les symptômes disparaissent généralement spontanément dans les 14 à 21 jours.

À noter : le vaccin contre la variole, administré aux Canadiens jusqu’en 1971, a un taux d’efficacité supérieur à 85 % contre le virus de la variole du singe, selon les données du gouvernement du Canada.

Transmission « surprenante »

La variole du singe sévit fréquemment dans certaines régions d’Afrique centrale et occidentale, mais rarement en Occident. Pourtant, depuis le début du mois de mai, neuf cas de variole du singe ont été recensés au Royaume-Uni. L’Espagne et le Portugal ont également annoncé mercredi avoir enregistré plus d’une quarantaine de cas possibles ou confirmés de variole du singe.

« C’est surprenant de voir un nombre aussi important parce que normalement, la maladie se transmet des animaux aux humains, principalement par les rongeurs », dit Alain Lamarre, professeur-chercheur spécialisé en immunologie et virologie à l’Institut national de la recherche scientifique. Cette fois, la transmission semble plutôt être interhumaine. « C’est particulier parce que ce n’est pas un virus qui se transmet facilement entre humains. C’est un peu préoccupant », ajoute-t-il.

La transmission d’un humain à un autre peut se faire par contact avec des fluides corporels, des lésions sur la peau ou sur les surfaces muqueuses internes et des gouttelettes respiratoires, a détaillé Anna Maddison, de l’ASPC. Selon les premières informations, la maladie semble se transmettre lors de rapports sexuels, indique le DVinh. « Ça semble être des personnes qui ont participé à des activités sexuelles de groupe avec des étrangers », conclut-il.

Avec l’Agence France-Presse