(Québec) Alors que les voix s’élèvent pour réclamer que Québec serre la vis aux CHSLD privés ainsi qu’aux CHSLD privés non conventionnés, les réponses de la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, sont loin d’avoir satisfait mercredi les partis d’opposition qui ont talonné l’élue caquiste.

« Le virage radical qu’on attend depuis 20 ans, il est où ? L’espoir, il est où ? », a lancé au Salon bleu la députée de Québec solidaire, Catherine Dorion, s’adressant à la ministre Marguerite Blais. « Est-ce que la ministre des Aînés réalise vraiment ce qui se passe » sur le terrain, a demandé à son tour la députée péquiste, Lorraine Richard.

Marguerite Blais a fait face à un tir groupé du Parti québécois, du Parti libéral et de Québec solidaire sur la gestion des CHSLD pendant la pandémie. Une enquête de La Presse a révélé mercredi le chaos qui a régné au sein de l’un des plus grands groupes de CHSLD privés conventionnés du Québec, chez Vigi Santé.

Mardi, un rapport d’enquête conjoint du Collège des médecins, de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec et de l’Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec concluaient que le gouvernement doit donner des « leviers légaux » aux établissements de santé et conventionner les CHSLD récalcitrants.

« On est en train de faire un changement radical, un changement de paradigme », s’est défendu la ministre Blais à plusieurs reprises, mercredi.

Elle a répété que son gouvernement a dans sa ligne de mire de conventionner la moitié des CHSLD privés non conventionnés – donc pratiquement la moitié du réseau privé non conventionné – d’ici deux ans.

« Pourquoi on veut les conventionner ? Pour que les employés aient un meilleur salaire, pour qu’il y ait des redditions de comptes, pour faire en sorte qu’on ait des liens beaucoup plus [serrés] avec les CISSS et les CIUSSS », a-t-elle ajouté, rappelant que le dans le cas du CHSLD Herron, le CIUSSS « n’avait même pas pu rentrer légalement ».

Pour la députée libérale Monique Sauvé, l’enquête de La Presse sur le cas spécifique de la situation à Vigi Santé illustre la nécessité de tenir une enquête publique indépendante sur la gestion de la pandémie par le gouvernement Legault.

Elle a critiqué que la ministre Blais ait affirmé, en entrevue à La Presse, vouloir « s’asseoir avec le président » du groupe Vigi Santé pour lui demander des comptes. « Est-ce que le gouvernement veut agir comme ça, à la pièce ? », a interrogé la députée de Fabre au Salon bleu.

« La COVID a touché les CHSLD, les CHSLD privés et les CHSLD privés conventionnés. Oui, il y en a plus à Vigi Santé, il a manqué de personnel, il a peut-être manqué […] de matériel de protection, mais le CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île est entré immédiatement » dans l’établissement, a nuancé Mme Blais.

« Nous avons été sur place pour faire en sorte de pouvoir reprendre le contrôle la situation. Après la pandémie, on va s’asseoir avec tous les CHSLD privés conventionnés », a-t-elle argué.

Le Parti québécois a, pour sa part, réclamé l’ajout d’inspecteurs dédiés aux résidences privées pour personnes âgées (RAP) ainsi que la création d’un « Protecteur des aînés ».

« Nous [nous] sommes déjà engagés à mettre sur pied un bureau des enquêteurs et des inspecteurs au ministère de la Santé et des Services sociaux. […] On va annoncer prochainement combien il y aura d’enquêteurs, combien d’inspecteurs. On va faire des visites-surprises davantage, des visites de vigie. Et on va s’organiser pour que ça ne se produise plus, ces questions de maltraitance envers nos plus vulnérables », a répondu Mme Blais.

De son côté, Vigi-Santé a publié un communiqué, qu’elle a également fait parvenir aux familles de ses bénéficiaires, pour « réitérer leur compassion pour toutes les familles et pour tous les résidents qui ont été durement éprouvés par les effets de la pandémie actuelle ». L’entreprise dit vouloir « rassurer » les familles qui s’inquiètent è la suite de la publication de notre reportage, « lequel prétend à tort que les soins offerts par le personnel du groupe Vigi sont de moindre qualité que ceux offerts dans les autres établissements. » Certains centres Vigi n’ont pas du tout été touchés par la COVID, cinq, dit l’entreprise, quatre, disent les chiffres du ministère de la Santé. « Il est donc faux de prétendre que la pandémie a affecté plus durement les centres du groupe Vigi que l’ensemble des établissements du Québec. »

Avec Katia Gagnon, La Presse