Après un difficile début de pandémie, le Québec semble avoir considérablement amélioré son bilan en matière de surmortalité depuis le début de l’année 2021. La province rapporte même moins de décès qu’anticipé depuis le début de l’année, révèlent de nouvelles données.

Depuis le début de 2021, le Québec observe en effet une mortalité inférieure de 2 % aux prévisions, selon de nouvelles données de l’Institut de la statistique (ISQ) rendues publiques mercredi. Ce bilan contraste avec celui de 2020, alors que la COVID-19 avait provoqué une surmortalité de 7 % dans la province. Devant ce renversement de tendance, le Québec affiche ainsi, après 18 mois de pandémie, une surmortalité globale d’environ 4 %.

C’est donc officiel : le Québec n’est plus la province canadienne affichant le plus lourd bilan depuis le début de la pandémie. Ce titre revient désormais à l’Alberta, qui affiche en effet une surmortalité de 13 % depuis le début de 2021.

Pendant ce temps, chez nos voisins du Sud, la surmortalité globale a atteint 15 % en 2020, puis 17 % depuis le début de 2021. Au Canada, des pics mensuels de surmortalité ont par ailleurs été atteints l’été dernier, en juillet, dans la foulée des incendies de forêt qui sévissaient fortement dans l’ouest du pays.

De nombreuses raisons peuvent expliquer les écarts de surmortalité, mais l’ISQ en dégage deux principales. « Il y a d’abord le devancement de certains décès qui auraient dû normalement survenir en 2020 ou en 2021. Comme les décès ont beaucoup été concentrés en CHSLD, dans des lieux où on compte beaucoup de personnes en fin de vie, forcément, il y a des gens là-dedans qui étaient destinés à décéder prochainement », explique le démographe Frédéric Fleury-Payeur, en entrevue avec La Presse.

Avec le virus, certains décès ont été devancés de semaines, de mois ou d’années, bref c’est assez variable. En 2020, après la première vague où il y avait eu beaucoup de décès, cet effet-là de diminution de la surmortalité s’était aussi faire sentir.

Frédéric Fleury-Payeur, démographe à l’Institut de la statistique du Québec

« La surmortalité (ou excès de mortalité) est définie comme le nombre de décès de toutes causes qui excède le nombre attendu “en temps normal”. »

Source : Institut national de santé publique du Québec

L’effet « protecteur » des mesures sanitaires

Un autre facteur, ajoute le démographe, pourrait bien être « l’effet protecteur des mesures sanitaires », qui ont été maintenues plus longtemps au Québec que dans d’autres provinces. « L’hiver dernier, ces mesures ont par exemple complètement éradiqué la circulation de la grippe, qui génère beaucoup de décès en temps normal, d’une saison à l’autre. En 2018, on avait eu 1000 décès qui y étaient liés », confie l’expert.

Rappelons que contrairement au Québec, qui a maintenu des mesures sanitaires plus strictes l’été dernier, l’Alberta avait de son côté éliminé les siennes, avant de les remettre en place devant la forte hausse des hospitalisations et des décès.

En bref, dans le reste du Canada, la surmortalité a été « initialement inférieure à celle du Québec, mais elle s’est maintenue à un niveau généralement plus élevé à partir de juillet 2020 », note-t-on dans le rapport de l’Institut déposé mercredi. « Après 18 mois de pandémie, le bilan de la surmortalité du reste du Canada était semblable à celui du Québec », insiste-t-on aussi.

Les auteurs de ce rapport révèlent par ailleurs que l’espérance de vie au Québec en 2020 « se situe à 80,6 ans chez les hommes et à 84,0 ans chez les femmes, ce qui représente des baisses respectives de 6 et 9 mois par rapport à 2019 ». « L’ampleur de ces baisses, qui s’explique par la surmortalité enregistrée en raison de la COVID-19, fait figure d’exception, car l’espérance de vie tend plutôt à augmenter au fil des ans. L’espérance de vie s’est également réduite dans plusieurs pays, souvent de façon encore plus marquée qu’au Québec », précisent-ils toutefois.

Quant à l’avenir de la surmortalité au Québec, il reste difficile à cerner, affirme M. Fleury-Payeur. « L’effet à long terme, c’est encore à découvrir. Il y a eu de grandes inquiétudes avec le nouveau variant [Omicron], mais les nouvelles sont assez bonnes de ce côté. Il reste que c’est vraiment trop tôt pour faire des hypothèses sur ce qui va se passer à plus long terme. Des facteurs autant négatifs que positifs, comme les développements des technologies au cours de la dernière année, pourraient entrer en ligne de compte », dit-il.