(Québec) Un autre point de tension est apparu entre le gouvernement Legault et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), cette fois quant à la place réservée à la télémédecine.

Alors que le gouvernement tient désormais à plafonner à 30-40 % le nombre de téléconsultations, les médecins de famille s’opposent et réclament une plus grande flexibilité.

« On ne veut pas déterminer un nombre maximum de téléconsultations, […] parce que ça dépend des types de clientèles, des circonstances », explique en entrevue le président de la FMOQ, le Dr Louis Godin.

Selon lui, les patients et les médecins ont pris goût à la télémédecine depuis qu’elle a été déployée en vertu de l’état d’urgence sanitaire lié à la pandémie de COVID-19.

« On ne veut pas mettre des espèces de quotas, dire : "Tu ne peux pas faire plus que 30 % ou 40 % de téléconsultations". C’est inopportun », tranche le Dr Godin.

« Nous, on n’est pas à l’aise avec ça. C’est sûr qu’on a des discussions à avoir sur comment on l’encadre, parce qu’on ne s’entend pas toujours là-dessus. »

Il donne l’exemple d’un médecin dont le patient « travaille, a expérimenté avec la télémédecine et aime ça », qui arrive en décembre ayant atteint son « quota » de téléconsultations pour l’année.

« Le médecin va être obligé de dire : "Non, non, je ne peux pas te voir en téléconsultation, j’ai atteint mon quota". Ça, là-dessus, je veux dire, on n’a pas la même approche que le gouvernement. »

Au cours des derniers mois, le ministère de la Santé a senti le besoin de diffuser des balises appelant les médecins à faire preuve de grande prudence et à reprendre leurs activités en présentiel.

Car bien qu’appréciée, la télémédecine reste inappropriée dans plusieurs cas, selon le ministère, notamment lorsqu’un examen physique ou neurologique est nécessaire.

« Un taux de plus de 90 % des activités […] en télésanté est considéré comme inacceptable », a même précisé le ministère dans un document intitulé « Utilisation de la télésanté en vertu du décret d’urgence sanitaire ».

Prévoit-on sanctionner les médecins qui voient des patients à distance plus de 90 % du temps ?

« Des discussions sont en cours […] afin de déterminer les paramètres d’application […], notamment ce qu’il advient en cas de non-respect », répond le porte-parole du ministère Robert Maranda.

La FMOQ dit également trouver inacceptable qu’un médecin ne fasse qu’uniquement de la téléconsultation.

« Un patient qui veut être vu, il faut qu’il soit vu. T’es un médecin, […] tu t’organises pour le voir, toi ou tes confrères. Il ne faut pas que ce patient-là soit envoyé à la salle d’urgence pour voir un médecin », dit le Dr Godin.

« Mais en même temps, on ne veut pas mettre de chiffre là-dessus. On ne veut pas dire : « La norme, c’est 40-45 % », on ne veut pas que ce soit ça », ajoute-t-il.

Les discussions se poursuivent dans le but de rendre la télémédecine pérenne au Québec.

Interrogée à ce sujet, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) a indiqué à La Presse Canadienne ne pas avoir statué sur la mise en place d’un plafond, qui « peut avoir un effet pervers ».

« La fédération croit qu’un médecin doit user de son jugement clinique, en tenant compte des caractéristiques du patient et de son problème de santé, pour déterminer le meilleur mode de consultation », a-t-elle affirmé.

Le Collège des médecins ne se prononce pas non plus sur des « chiffres précis ». Il renvoie à la déclaration de son président, publiée en février dernier, qui est « toujours d’actualité et représente la position du Collège ».

La télémédecine est-elle systématiquement une option ? « Non. Certaines situations exigeront toujours une évaluation en personne. C’est une question de prudence et de discernement », écrivait alors Mauril Gaudreault.