(Montréal) Une perte d’odorat bien spécifique pourrait laisser craindre l’arrivée de la maladie de Parkinson dans quelques années, selon les travaux d’un chercheur montréalais.

Cela est encore plus vrai si le patient présente aussi un trouble du sommeil qui se caractérise par un sommeil très agité.

« Si on pense à la maladie de Parkinson, on pense aux gens qui tremblent ou qui ont de la rigidité, a dit Johannes Frasnelli, de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. Ce qui est beaucoup moins connu, c’est que ce n’est pas tout le monde qui a la maladie de Parkinson qui a des tremblements […] mais 90 % à 95 % des patients ont également un trouble de l’odorat. Ils ne sentent rien ou presque. »

Ce qui est encore moins connu, poursuit M. Frasnelli, est que cette perte d’odorat peut survenir dix ou quinze ans avant que le patient ne se décide à aller consulter un médecin pour ses troubles moteurs.

Une personne sur cinq pourrait souffrir d’une perte d’odorat, ce qui veut dire que le problème est donc très peu spécifique à la maladie de Parkinson. Même si le sujet est à la mode avec la pandémie de COVID-19, le médecin s’intéressera à des causes possibles, allant de la commotion cérébrale à la tumeur, avant de chercher ailleurs.

M. Frasnelli et ses collègues ont toutefois réussi à identifier un profil de perte de l’odorat spécifique à la maladie de Parkinson : les patients qui le présentent conservent la capacité de détecter les odeurs piquantes ou fraîches aussi bien que tout le monde, et possiblement même mieux.

« Plusieurs médecins, et même des spécialistes, ne font pas une évaluation spécifique de la perte de l’odorat, a-t-il déploré. Ils vont seulement demander au patient s’il est capable de sentir la tasse de café devant lui. Selon nous, il faut évaluer l’odorat par exemple avec des tests d’identification d’odeurs. »

Les chercheurs souhaiteraient combiner cette perte de l’odorat avec un marqueur encore plus spécifique de la maladie de Parkinson, un trouble du sommeil appelé « trouble comportemental du sommeil paradoxal ».

Le patient souffrant de ce problème peut avoir un sommeil très agité, et gare à la personne qui dort à côté de lui.

« Il y a un groupe de patients pour qui ce trouble du sommeil est une phase préclinique de la maladie de Parkinson, a dit M. Frasnelli, qui est aussi professeur titulaire au département d’anatomie de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Ces gens-là ont déjà une dégénérescence des centres du cerveau qui plus tard vont se manifester par les symptômes de la maladie de Parkinson. »

La combinaison de ces deux mesures pourrait permettre d’identifier plus précocement et plus précisément ceux chez qui la maladie de Parkinson risque de se développer plus tard.

Même si on ne dispose pour le moment d’aucune thérapie curative efficace contre le parkinson, on pourrait mettre en place beaucoup plus tôt des stratégies pour freiner la progression de la maladie, ce qui pourrait avoir un impact énorme sur la qualité de vie du patient.

« Ça ferait en sorte que la personne n’aurait pas les premiers symptômes moteurs dix ou quinze ans plus tard, mais peut-être trente ou quarante ans plus tard, et à ce moment-là le problème se règle autrement », a-t-il dit.

M. Frasnelli et ses collègues souhaitent maintenant s’intéresser à des patients chez qui le risque de maladie de Parkinson est très élevé pour voir s’ils présentent ce trouble de l’odorat et ce trouble du sommeil, et si la maladie apparaîtra chez eux au cours des prochaines années.