(Montréal) La reprise des chirurgies se poursuit au Québec, après les reports causés par la pandémie. La Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) rapporte que le niveau d’activité est de 66 % en juillet, au-delà de ses attentes. Elle ajoute que les chirurgiens mettent les bouchées doubles pour en faire un maximum avant une possible 2e vague de la COVID-19 à l’automne.

En entrevue vendredi, la présidente de la FMSQ, Diane Francœur, était heureuse de constater que la cible établie de 50 % avait été dépassée.

Fin juin, le niveau d’activité des chirurgies avait même atteint 75 %, dit-elle.

La reprise a toutefois été ardue, comme dans les autres provinces : elle croit qu’il faudra probablement deux ans pour rattraper le retard et revenir aux niveaux d’avant la pandémie.

Dès mars, de nombreuses chirurgies non urgentes — par exemple, aux genoux ou aux hanches — ont été annulées ou reportées pour délester un maximum de lits d’hôpitaux pour qu’ils soient prêts à accueillir des patients atteints de la COVID-19.

Cette demande de la ministre de la Santé, qui était alors Danielle McCann, a tout changé pour les départements de chirurgie.

Difficile de maintenant rattraper le retard quand il manquait déjà de personnel pour les salles d’opération avant la COVID, souligne Mme Francœur. Les listes d’attente se sont depuis allongées et il manque toujours de personnel : la formation des infirmières en salle d’opération est précise et longue, dit la présidente qui ajoute que des travailleurs de la santé ont été réaffectés ailleurs pendant la pandémie et que d’autres sont tombés malades.

Le personnel médical qui a travaillé d’arrache-pied au printemps a maintenant besoin de vacances, ce qui fait aussi en sorte que les activités n’ont pas atteint de plus hauts niveaux.

Il y a eu d’autres embûches au retour à la normale : des réserves de médicaments nécessaires en chirurgie, dont des anesthésiques, ont dû être utilisées pour les patients atteints de la COVID, et le manque d’équipement de protection personnelle a aussi nui.

Et des patients ne voulaient pas se présenter pour leur opération par peur d’attraper la COVID-19.

« C’est très difficile pour les patients et les familles parce qu’ils sont inquiets », dit la présidente, expliquant qu’il fallait les rassurer et les convaincre d’aller à leur rendez-vous.

Différences régionales

Le taux de 66 % est une moyenne provinciale : certaines régions ont réussi à reprendre un niveau d’activités plus élevé, par exemple, la région de la Chaudière-Appalaches avec 81 %, alors que d’autres comme la Côte-Nord ont rencontré plus de difficultés, avec 32 %. « Ça tire la moyenne vers le bas », dit-elle, notant que dans cette dernière région, du personnel hospitalier est encore en train de prêter main-forte dans les CHSLD.

À Montréal, là où il y a eu le plus d’hospitalisations de patients atteints de la COVID, le taux d’activité en chirurgies est actuellement de 63 %.

La présidente de la FMSQ n’a pas pu évaluer le nombre de semaines supplémentaires qu’allaient devoir patienter ceux qui se trouvent sur les listes d’attente : les données compilées par le ministère de la Santé font état du nombre de chirurgies réalisées et non de la durée, a-t-elle expliqué.

La menace d’une seconde vague cet automne inquiète, surtout qu’elle coïncidera fort probablement avec la période de l’influenza. Les chirurgiens veulent donc mettre les bouchées doubles cet été, rapporte Mme Francœur.

« On veut faire un maximum de cas ».

Mais cet effort demeure limité par le manque de personnel.

Pour y arriver, les chirurgiens font et refont leur ordre de priorités sur les listes d’attente. Des ententes ont aussi été conclues entre le ministère de la Santé et des cliniques privées ayant des salles d’opération afin d’augmenter la cadence. Les hôpitaux gardent les cas les plus compliqués.

Près de 600 chirurgies ont été réalisées dans des cliniques privées jusqu’à maintenant en juillet, a déclaré Mme Francœur, et d’autres l’ont été auparavant.

Pour l’automne, elle croit que la planification sera plus solide. Des stratégies sont déjà en train d’être élaborées avec le ministère de la Santé.

Par exemple, il est envisageable que les directives sur le délestage des activités hospitalières ne soient pas provinciales : l’expérience ayant démontré que la COVID-19 n’a pas frappé avec autant de force dans toutes les régions.