Au moins trois personnes s’enlèvent la vie chaque jour au Québec, mais les statistiques démontrent que depuis les 20 dernières années le taux de suicide chez les adolescents a diminué de 72 % chez les garçons âgés de 15 à 19 ans, selon la mise à jour 2019 sur les Statistiques sur le suicide au Québec. Les données démontrent aussi un recul important chez les jeunes hommes âgés de 20 et 34 ans (68 %).

Ces statistiques laissent croire que les campagnes de prévention et de sensibilisation portent leurs fruits, mais il reste encore beaucoup à faire pour que les personnes en détresse se tournent vers les ressources en place.

C’est pourquoi la 30e Semaine de prévention du suicide, qui se déroule du 2 au 8 février, encourage les gens à être plus ouverts sur le sujet tant au travail qu’à la maison.

« On a diminué de plus de moitié les taux de suicide chez les jeunes parce qu’on est plus alerte à reconnaître les troubles de santé mentale. On va réagir plus rapidement et apporter des soins plus rapidement, souligne Jérôme Gaudreault, directeur général de l’Association québécoise de prévention du suicide (AQPS) en entrevue à La Presse canadienne. Les milieux scolaires se sont bien outillés pour repérer la vulnérabilité chez les jeunes, donc tout ça a pu avoir un impact positif sur la santé mentale des jeunes. »

Communication plus difficile chez les adultes

Malgré tous les progrès réalisés auprès des jeunes, être plus vigilants aux signaux de détresse et être plus à l’écoute de l’autre sont des principes qui sont plus difficiles à appliquer chez les adultes.

À preuve, le « profil type » des gens les plus vulnérables demeure le même : ce sont toujours les hommes âgés de 35 à 55 ans qui sont les plus enclins à mettre fin à leurs jours.

Pour changer cette triste réalité, il suffirait pourtant d’être un peu plus attentif aux gens autour de nous et d’en parler, selon M. Gaudreault

« Ce qui est important, c’est d’en parler et de mettre des mots sur ce qu’on perçoit. D’approcher la personne et de lui demander : qu’est-ce qui se passe ? Veux-tu m’en parler ? »

Il suggère même d’être direct, s’il le faut, et demander à la personne si elle songe à s’enlever la vie.

« C’est une question qui est directe, mais qui en même temps peut amener une réponse directe. C’est peut-être la première occasion pour la personne de partager ses pensées suicidaires et le fait d’en parler est la première étape pour obtenir de l’aide », souligne le directeur général de l’Association québécoise de prévention du suicide.

Jérôme Gaudreault se fait toutefois rassurant en indiquant que cela n’incitera pas l’autre à passer à l’acte, bien au contraire.

« Ce n’est pas nécessairement de se mettre sur les épaules de sauver la vie de la personne, mais de se mettre en mode d’écoute et d’accompagnement vers les ressources d’aide, qui elles sont disponibles partout au Québec, 24 h sur 24. »

Des personnalités publiques pour faire tomber les tabous

Comme dans plusieurs causes, des personnalités publiques s’associent à l’événement pour mieux faire passer le message.

La 30e Semaine de prévention du suicide compte sur deux ambassadeurs provenant du milieu du hockey, l’animateur et ancien joueur de la LNH, Dave Morissette, et le multiple médaillé paralympique et ancien joueur de la LHJMQ, Dean Bergeron, tous deux endeuillés par le suicide d’un être cher.

Selon M. Gaudreault, la contribution des personnalités est importante puisque les gens s’identifient souvent à ces personnes.

« Je pense que ça fait en sorte qu’on réalise que c’est moins tabou, que c’est une problématique qui touche la grande majorité de la population et qu’il existe des solutions. »

De son côté, Dean Bergeron reconnaît qu’il n’a pas songé au suicide lorsqu’il est devenu quadriplégique à la suite de son accident de hockey, du moins pas sérieusement…

« Effectivement, j’ai eu à me poser cette question-là. J’ai eu un accident de hockey. J’avais 18 ans. Je suis tombé en fauteuil roulant, quadriplégique, et à ce moment-là, c’est quoi mes choix ? Heureusement, j’avais un filet social qui était très fort. J’avais des gens autour de moi qui m’ont montré que j’avais des choix », confie en entrevue celui qui est aujourd’hui vice-président à l’administration et aux prestations à La Capitale sécurité financière.

« À partir du moment que j’ai commencé à en parler et que ce n’était plus une honte pour moi de vivre une difficulté, eh bien, quelque part, s’est venu m’apaiser. De la même façon, les personnes qui sont en situation de détresse majeure ou qui sont en crise, ça apaise un peu la souffrance à partir du moment qu’elle peut en parler. Il faut que les gens puissent en parler justement », affirme Dean Bergeron.

Il avoue aussi avoir fait du cheminement dans son rapport face au suicide, soit depuis la perte d’un ami proche. Il dit avoir compris en se tournant vers des ressources d’aide que le suicide n’est pas un choix personnel.

« Ce dont je me suis rendu compte, en parlant notamment avec les gens de l’Association québécoise de prévention du suicide, c’est que ces gens-là ne le font pas par choix. Ils le font par manque de choix ! La souffrance devient tellement lourde, tellement intense, que les gens ne voient plus de choix et c’est venu m’interpeller énormément », dit-il.

Il rappelle qu’il est possible d’obtenir de l’aide en allant sur le site web ou en appelant à la ligne d’intervention 1-866-APPELLE (1-866-277-3553).