Alors que les infirmières praticiennes spécialisées (IPS) viennent de se voir accorder plus de responsabilités dans l’offre de soins de santé au Québec, le Collège des médecins s’inquiète de l’élimination de l’examen final mesurant les compétences des futures « superinfirmières ».

« En termes de protection du public, ça nous préoccupe. […] C’est la question qui nous achale le plus. Parce que pour le reste, on est en faveur d’une plus grande collaboration entre IPS et médecins », affirme le directeur général du Collège des médecins, le Dr Jean-Bernard Trudeau. Ce dernier sera de passage lundi à Québec en commission parlementaire afin de faire part de ses inquiétudes.

Depuis l’arrivée de la profession d’IPS au Québec en 2007, les candidates qui suivaient la formation de deuxième cycle universitaire devaient passer un examen final mesurant leurs compétences et leurs connaissances cliniques. L’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) faisait passer cet examen.

Mais en janvier dernier, l’OIIQ a annoncé son intention de faire disparaître cet examen pour le remplacer par une évaluation des connaissances déontologiques et juridiques des futures IPS.

Luc Mathieu, président de l’OIIQ, explique que « l’évaluation des compétences et des connaissances est déjà faite » par les universités tout au long des 75 crédits de cours et des 950 heures de stages des candidates et que l’examen final était donc une répétition. 

Ce n’est pas efficient de faire ça.

Luc Mathieu, président de l’OIIQ

Il assure que ce n’est pas parce que les taux de réussite des anciens examens finaux étaient faibles que l’OIIQ a décidé de les modifier. Au contraire, ces taux avoisinaient les 100 % après les trois tentatives autorisées. Le taux de réussite était de 82 % après la première tentative.

Plus de responsabilités

Le 29 novembre, la cohorte de 161 candidates IPS passera donc la nouvelle version de l’examen final, qui vérifiera leurs connaissances déontologiques et juridiques. Une situation qui inquiète le Collège des médecins. « On craint que ce ne soit préjudiciable aux patients », affirme le Dr Trudeau.

D’autant plus que le 9 octobre dernier, la ministre de la Santé, Danielle McCann, a déposé le projet de loi 43 visant à accroître l’autonomie des IPS. Ce projet de loi leur permettra notamment de poser certains diagnostics, de déterminer des plans de traitement et d’effectuer le suivi des grossesses normales ou à faible risque.

C’est une belle ouverture. Mais avec cette ouverture, on s’attend à ce que les compétences soient là. Selon nous, le meilleur garde-fou afin de s’assurer que la compétence des IPS est là, c’est l’examen.

Le Dr Jean-Bernard Trudeau

L’Association des infirmières praticiennes spécialisées du Québec (AIPSQ) croit elle aussi que l’examen final devrait être conservé.

« À ce stade-ci de l’intégration des IPS au système de santé québécois, il demeure important qu’une portion de l’examen mesure les compétences médicales de ces dernières. Un tel exercice assurera à notre avis la confiance du public et des autres spécialistes de la santé à l’égard des IPS, une formation encore jeune, ainsi que la crédibilité de la profession, qui repose sur une formation rigoureuse », a écrit par courriel la présidente de l’AIPSQ, Christine Laliberté.

Mais pour l’OIIQ, ces inquiétudes entourant la modification de l’examen final ne sont pas fondées. M. Mathieu souligne que la formation des IPS au Québec est « la plus longue au Canada ». « Oui, on est les premiers à avoir abandonné cet examen. Mais d’autres professionnels de la santé, comme les pharmaciens, n’ont pas ce genre d’examen final », justifie M. Mathieu.

Une modification a été apportée à la première version de ce texte. M. Mathieu indiquait initialement que les physiothérapeutes font partie des professionnels qui n'ont pas d'examen final à passer. Ce qui est inexact. Ce passage a donc été retiré d'une de ses citations.