(Québec) Au Québec, en 2019, des femmes enceintes voient leur stress enfler au même rythme que leur ventre, ignorant dans quel hôpital et dans quelle ville elles pourront accoucher.

Selon la date de l’accouchement, avec un peu de chance, elles pourraient donner naissance à leur enfant près de chez elles, dans leur ville, tandis que les moins chanceuses pourraient devoir effectuer des dizaines de kilomètres pour se rendre dans un hôpital où le personnel médical sera disponible.

La raison : des bris de service observés dans plusieurs régions du Québec, où les médecins spécialisés en obstétrique et en chirurgie se font rares.

À La Pocatière, les femmes enceintes ont intérêt à perdre leurs eaux du lundi au vendredi. Depuis un mois, le service d’obstétrique de l’hôpital est fermé le week-end.

À Amqui, le bloc opératoire de l’hôpital est fermé, au moins jusqu’au 2 novembre. Les femmes prêtes à accoucher doivent faire le trajet jusqu’à Rimouski, une centaine de kilomètres plus loin. Même chose pour les personnes qui doivent subir une chirurgie d’urgence. Les chirurgies électives sont remises à plus tard.

Le porte-parole de l’opposition libérale en santé, le député André Fortin, juge la situation « absolument inacceptable ».

Vendredi, à l’occasion d’une interpellation en Chambre de la ministre de la Santé, Danielle McCann, il a pris le temps d’énumérer la longue liste de cas problèmes documentés « dans à peu près toutes les régions » du Québec ces derniers temps.

Des ruptures de services, « il y en a eu chez nous, en Outaouais, il y en a eu à Maniwaki, il y en a eu à Shawville, il y en a eu en Gaspésie, à Gaspé, à Sainte-Anne-des-Monts. Il y en a eu dans le Bas-du-Fleuve, il y en a une aujourd’hui qui commence à La Pocatière. Il y en a eu dans Charlevoix. Il y en a eu en Abitibi, il y en a eu à La Sarre, il y en a eu à Val-d’Or, il y en a eu à Amos. Tout ça, au cours des derniers mois », a-t-il relaté.

Actuellement, le problème semble particulièrement criant à La Pocatière, où des femmes sur le point d’accoucher pourraient devoir se résoudre à se rendre à Rivière-du-Loup, voire à Lévis, pour donner naissance à leur enfant, faute de médecins et d’infirmières en nombre suffisant sur place.

La ministre McCann a rejeté le blâme sur la Fédération des médecins spécialistes (FMSQ).

Elle a indiqué qu’une entente de principe était intervenue la semaine dernière entre la FMSQ et le gouvernement visant précisément à éviter la « découverture », soit la rupture de services en régions.

Cette entente inclut une enveloppe de 45 millions destinée à « couvrir les frais de découverture », a commenté la ministre en mêlée de presse.

Or, « la FMSQ ne veut pas utiliser » cette enveloppe pour la couverture des services en région, a-t-elle fait valoir, même si elle est destinée à convaincre les médecins d’être présents partout où leurs services sont requis en régions, particulièrement en régions éloignées.

« C’est une enveloppe qui est prévue exactement pour ça », a-t-elle insisté.

Mais à la base, contrairement à ce que la ministre laisse entendre, le problème des bris de service de santé en régions est « structurel » et non ponctuel, selon le député de Pontiac, d’où l’importance de s’y attaquer sérieusement.

Le problème est double, explique-t-il : il y a d’une part une pénurie d’infirmières, particulièrement en obstétrique, et d’autre part un manque de chirurgiens en régions résultant de l’absence d’entente finale à conclure avec le gouvernement.

Pourtant, la ministre s’était engagée à conclure une entente en mars, selon lui.

« Je ne peux pas concevoir qu’un gouvernement accepte qu’en régions les services soient à ce point-là amoindris, que les citoyens et citoyennes ne savent pas s’ils vont pouvoir accoucher à leur hôpital de région par pénurie de main-d’œuvre, par manque de chirurgiens. C’est des enjeux qu’on doit régler parce que c’est des services de base », a fait valoir M. Fortin, en point de presse.