Médecin urgentologue au Centre universitaire de santé McGill, le Dr François de Champlain étudie la possibilité d’utiliser des drones pour livrer des défibrillateurs dans des zones reculées du Québec ou dans des endroits plus difficilement accessibles, comme le long d’un parcours de marathon.

Mardi matin, le Dr de Champlain a tenu une simulation dans le parc du Mont-Royal pour tester l’efficacité de drones à livrer un défibrillateur externe automatique (DEA) à un coureur qui feignait de subir un arrêt cardiaque sur la montagne. « L’objectif est de diminuer le plus possible le temps qui s’écoule entre l’arrêt cardiaque et le moment où le patient reçoit le premier choc », explique le Dr de Champlain.

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Dr François de Champlain

Quand survient un arrêt cardiaque, chaque minute compte. « Si tu donnes le choc dans les cinq premières minutes, tu as des chances de survie de 75 %. Mais ensuite, chaque minute qui s’écoule, les chances de survie diminuent grosso modo de 10 %, explique le Dr de Champlain. […] Après dix minutes, si tu attends que l’ambulance arrive, même dans une ville comme Montréal, et que tu ne fais rien, les chances de survie sont presque inexistantes. »

Sauver 16 minutes

Au cours des dernières années, différentes études ont été menées pour évaluer combien de temps peut être épargné en situation d’urgence si on livre un défibrillateur par drone. Une étude réalisée en Suède dans la région de Stockholm et publiée en 2017 a démontré que le drone arrive en moyenne 16 minutes plus tôt que les premiers répondants.

Le Dr de Champlain explique que différents modèles d’implantation existent pour la mise en place d’un tel service. L’urgentologue s’intéresse plus particulièrement au modèle qui permet d’entrer directement les coordonnées GPS d’où se trouve la victime dans le drone, qui peut décoller vers la scène dès la réception de l’appel au 911.

Dans des marathons

Ayant lui-même déjà été directeur médical du marathon de Montréal, le Dr de Champlain n’a pas voulu commenter le décès du jeune coureur survenu lors du marathon de dimanche dernier. « Je n’ai pas tous les détails sur ce qui s’est passé. Ce serait injuste de ma part de commenter », dit-il.

Il mentionne toutefois que des drones pourraient éventuellement être utilisés dans ce genre d’événement pour livrer des défibrillateurs. « La chose la plus importante en cas d’arrêt cardiaque est le temps qui s’écoule avant le premier choc […] Quand tu parles d’un marathon, tu parles de rues fermées, de foule, d’accès difficile… Trouver la personne qui souffre dans la foule est un défi. Si tu as un drone qui surveille le secteur, tu peux localiser la victime plus vite et apporter le défibrillateur plus vite », énumère le Dr de Champlain.

Encore des détails à établir

Déjà, un projet pilote testant l’efficacité des drones pour la livraison de défibrillateurs est à l’étude dans la région de Renfrew en Ontario. Une autre phase de l’étude se déroulera en banlieue de Toronto. Et le Dr de Champlain travaille actuellement afin de lancer une troisième phase de l’étude au Québec, en Estrie. « On vise une région qui a beaucoup de distances à franchir pour les ambulances, mais qui a quand même une certaine densité de population afin d’avoir des cas », explique-t-il.

Certains détails restent à préciser afin d’établir sous quelles conditions les drones pourraient devenir une solution de soins novatrice. Par exemple, les chercheurs devront déterminer quels secteurs bénéficieraient le plus du service. Des défis restent aussi à surmonter, comme le fait que la durée de vie des batteries des drones est limitée et que les appareils ne peuvent pas toujours voler par grands vents. Mais pour le Dr de Champlain, les nombreuses perspectives offertes par les drones sont prometteuses. « On parle d’une technologie qui peut potentiellement sauver des vies », dit-il.