(Toronto) La flambée du coût de l’insuline aux États-Unis a poussé un groupe de diabétiques américains à se rendre au Canada, vendredi, pour se procurer le médicament en vente libre à une fraction du prix.

Quelque 25 personnes ont quitté Minneapolis, dans l’État du Minnesota, pour London, en Ontario, où elles comptent tenir une conférence de presse samedi.

L’une des organisatrices de l’expédition, Quinn Nystrom, en est à son deuxième voyage de ce type, depuis l’explosion des prix de l’insuline.

La jeune femme de 33 ans a reçu un diagnostic de diabète de type 1 il y a 20 ans, lorsque le prix de l’insuline s’élevait à près de 16 $ US par fiole. Aujourd’hui, un fiole lui coûte environ 340 $ US, soit dix fois plus qu’en sol canadien.

Le quart des diabétiques américains en arrivent à rationner leurs doses — une pratique qui peut leur coûter la vie, rapporte-t-elle.

Les touristes peuvent rapporter chez eux un approvisionnement personnel d’au plus trois mois, précise Mme Nystrom, mais certains peuvent seulement se permettre une ou deux fioles. Une fiole de l’hormone peut durer de quelques jours à quelques semaines, selon le patient.

Bien que le tourisme lié à l’insuline soit un phénomène relativement rare, il suscite déjà certaines inquiétudes.

« Dès qu’une population nombreuse comme celle des États-Unis vient au Canada pour avoir accès à des médicaments destinés au marché canadien, il y a un risque de dérèglement », soulève Barry Power, directeur principal de l’Association des pharmaciens du Canada.

Santé Canada et l’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux doivent se pencher sur la situation, estime M. Power.

La ministre fédérale de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, devrait selon lui s’entretenir avec son homologue américain pour s’assurer que l’approvisionnement au Canada soit protégé. Les fabricants pourraient également en faire davantage pour limiter les exportations, relève-t-il.

Étant donné que l’insuline n’est pas sous ordonnance au Canada, il n’y a aucun mécanisme de suivi permettant de déterminer la quantité de fioles qui traversent la frontière.

« Je ne veux pas être une mauvaise voisine, explique Mme Nystrom. Je ne viendrais jamais au Canada s’il y avait une pénurie de médicaments et je ne pense pas que venir au Canada soit une solution à long terme. C’est comme mettre un diachylon sur une plaie par balle. »

Le groupe #insulin4all compte se rendre à la maison Banting, à London, où Sir Frederick Banting a eu l’idée qui a conduit à la découverte de l’insuline, il y a 99 ans. Ironiquement, le scientifique a vendu les droits rattachés à son brevet pour un seul dollar parce qu’il croyait que sa découverte ne devrait pas servir à générer des profits.

Le Canada, à l’instar d’autres pays industrialisés, réglemente les prix des médicaments par le biais d’un conseil d’examen quasi-judiciaire, dont le mandat est d’empêcher tout prix excessif. Les États-Unis s’en remettent plutôt aux forces du marché, c’est-à-dire selon ce que les gens sont prêts à payer.