Le cannabis récréatif est devenu légal au pays, mais ceux qui s’en servent à des fins thérapeutiques ont l’impression que leur cause est tombée dans l’oubli : ils demandent à nouveau au gouvernement fédéral de le traiter comme n’importe quel autre médicament — et d’abolir les taxes.

Les médicaments ne sont généralement pas taxés au pays, mais le cannabis médicinal, oui.

La facture peut être élevée, a indiqué Daphnée Elisma, représentante de l’organisme Santé cannabis et elle-même utilisatrice de cannabis médicinal depuis des années, en conférence de presse cette semaine à Ottawa.

Pour traiter une douleur chronique causée par les suites d’un cancer du sein, sa facture d’huile de cannabis s’élève à 500 $, voire 600 $ par mois. Sans taxe d’accise et taxes de vente, elle épargnerait environ125 $ sur sa facture mensuelle.

C’est discriminatoire, a déploré la femme qui a essayé, comme bien d’autres, des médicaments traditionnels avant de se tourner vers l’huile de cannabis.

« Le gouvernement fait une distinction entre les patients qui utilisent le cannabis pour pallier un problème de santé et un patient qui va utiliser un médicament conventionnel pour pallier au même problème de santé. »

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) soutient cette demande des patients. Le député et chef adjoint du parti, Alexandre Boulerice, qui a organisé la conférence de presse dans la capitale, s’explique mal l’inaction du gouvernement libéral sur un enjeu « si facile à régler ». Le NPD travaille sur le dossier depuis des mois, soutient M. Boulerice.

« Actuellement, il y a des gens qui souffrent et malheureusement, ils ne sont pas écoutés et ne reçoivent pas l’appui du gouvernement libéral », a-t-il déploré.

Non seulement les taxes ajoutent à la facture, mais ces patients ne sont parfois pas capables de travailler en raison de leurs problèmes de santé. Le coût du cannabis, qui les aide à mieux vivre, devient alors hors de portée pour beaucoup d’entre eux, a ajouté Me Jacqueline Bissonnette, spécialisée en droit des patients. Il y a quelques crédits d’impôt disponibles, mais ce n’est pas suffisant, dit-elle.

« Avec la légalisation, la situation n’a pas changé, les mêmes problèmes se présentent, la plupart des gens qui en prennent ont un long parcours, ils ont essayé différents types de produits jusqu’à temps qu’on prescrive du cannabis et que ça marche dans leur cas et que ça les aide à mieux vivre », dit-elle.

La Société québécoise du cannabis (SQDC) n’est pas la solution pour les patients québécois : les employés ne sont pas formés pour conseiller en lien avec une prescription d’un médecin, et puis, ils n’ont pas le droit, rappelle-t-elle. De plus, renchérit Mme Elisma, ils ne peuvent pas offrir de conseils sur le dosage ni expliquer comment le cannabis va interagir avec d’autres médicaments, ce qui est quand même important.

C’est le ministère fédéral des Finances qui décide quelles taxes sont imposées et sur quels produits. Jeudi en fin d’après-midi, un responsable a indiqué que le ministère évalue régulièrement le régime fiscal pour s’assurer qu’il est équitable et efficace, mais qu’il ne serait pas approprié de spéculer sur des modifications possibles au régime.

Par ailleurs, il précise que certains produits pharmaceutiques dérivés du cannabis sont exonérés de taxe, pourvu que les produits en question aient une identification numérique de drogue et qu’ils ne puissent être obtenus qu’au moyen d’une ordonnance.