Une nouvelle étude coordonnée par la cardiologue montréalaise Julia Cadrin-Tourigny permettra de mieux traiter les patients atteints de cardiopathie arythmogène du ventricule droit (CAVD). Une pathologie qui touche jusqu'à 1 personne sur 2000 et qui mène parfois à la mort soudaine et spectaculaire d'athlètes de haut niveau.

Le 28 août 2007, les spectateurs du match de soccer de la Liga espagnole opposant Séville et Getafe ont vu le défenseur Antonio Puerta, de Séville, s'effondrer à quelques mètres de son but, victime d'un arrêt cardiaque. Si le jeune joueur a pu quitter le terrain en marchant après avoir reçu les soins du médecin de l'équipe, il a subi un nouveau malaise dans le vestiaire et a été transporté d'urgence à l'hôpital, où il est mort trois jours plus tard. Les rapports médicaux révéleront que l'athlète de 22 ans souffrait de cardiopathie arythmogène du ventricule droit, une maladie héréditaire pouvant causer des arythmies cardiaques.

« C'est une cause fréquente de mort subite chez les jeunes adultes, particulièrement les athlètes, explique la Dre Cadrin-Tourigny, cardiologue électrophysiologiste à l'Institut de cardiologie de Montréal. [...] C'est un problème d'instruction dans les cellules cardiaques. En gros, les jonctions intercellulaires fonctionnent anormalement. Des cicatrices se forment. »

Pour les patients atteints de CAVD, tout stress mécanique au coeur, comme l'exercice physique, augmente considérablement les risques de souffrir d'arythmie. Une étude menée au Royaume-Uni a montré que sur les 357 athlètes qui sont morts subitement entre 1994 et 2014, le CAVD en était responsable dans 13 % des cas.

Mieux prévenir

Conjointement avec des chercheurs de six autres pays, la Dre Cadrin-Tourigny a analysé les dossiers de plus de 500 patients américains et européens et a mis au point un « calculateur capable de mieux prédire la probabilité d'arythmies mortelles » chez les patients atteints de CAVD. Car chez les patients très à risque, un défibrillateur peut être implanté sous la peau près de la clavicule et relié au coeur afin d'éviter les arythmies. Mais l'installation de ce dispositif n'est pas sans risque. 

« Les batteries doivent être changées au bout de quelque temps. Les sondes qui mènent au coeur doivent être changées tous les 15 ans. On ne veut pas faire ce genre de procédure à tout le monde. »

- La Dre Julia Cadrin-Tourigny

Grâce au calculateur, « nous serons en mesure de mieux cibler les patients qui ont besoin d'un défibrillateur », précise la spécialiste, qui explique que le calculateur « permet de diminuer de 20 % la pose de défibrillateurs par rapport aux recommandations actuelles tout en offrant le même niveau de protection ».

Cardiologue et chercheur à l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, le Dr Paul Poirier a suivi plusieurs athlètes durant sa carrière. Selon lui, l'outil développé, même s'il touche une pathologie bien précise, permettra effectivement de mieux guider le processus décisionnel afin de déterminer quel patient devrait ou non se faire poser un défibrillateur. « Ça permettra d'être plus précis », dit-il.