Alors que la saison de la grippe bat son plein et que les urgences aux quatre coins de la province sont très sollicitées, le taux d'occupation à l'hôpital du Suroît, à Valleyfield, dépasse les 200 % depuis des semaines et a même atteint 300 % dans les derniers jours. Il s'agit de loin des pires statistiques de la province.

« Les médecins sont indignés de la façon dont ils peuvent donner les soins actuellement. C'est une question de dignité humaine », affirme le Dr Sylvain Dufresne, président de l'Association des médecins omnipraticiens du Sud-Ouest.

La Presse a visité les urgences de l'hôpital du Suroît hier après-midi et a constaté que des dizaines de patients étaient soignés sur des civières dans des corridors exigus.

Solutions déjà en branle

Le 19 décembre, La Presse a rapporté le problème d'achalandage aux urgences de l'ouest de la Montérégie. 

(Re)lisez notre article sur le sujet publié le mois dernier

Le jour même, la ministre de la Santé, Danielle McCann, a dit plancher sur un plan doté d'un budget « assez substantiel » pour corriger la situation.

Selon la porte-parole du Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest (CISSSMO), Maryse Bégin, plusieurs mesures ont déjà été implantées.

Notamment, du personnel additionnel a été mis en place pour veiller sur les patients devant être soignés dans les corridors. « Nous sommes conscients que cette situation n'est pas idéale », dit Mme Bégin, tout en soulignant le travail colossal des équipes et en assurant que la qualité et la sécurité des soins restent une priorité.

Depuis la mi-décembre, une quarantaine de places pour accueillir une clientèle en perte d'autonomie ont graduellement été ouvertes sur le territoire.

« Le transfert des patients s'est amorcé progressivement et permet d'assurer un milieu de vie plus adéquat pour ce type de clientèle, en plus de diminuer la pression sur nos soins et nos services en milieu hospitalier. »

- Maryse Bégin, porte-parole du Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest

Des ressources en soutien à domicile ont aussi été ajoutées. « Les autorisations ont été données par le Ministère pour la mise en place de mesures additionnelles », ajoute-t-elle.

Maryse Bégin reconnaît toutefois que l'hôpital du Suroît est toujours aux prises avec une pénurie de médecins en hospitalisation. « L'ensemble des équipes est en mode action et collabore pour recruter des ressources et ajouter des effectifs, afin de répondre à la pénurie de main-d'oeuvre », dit-elle. Hier matin, le taux d'occupation aux urgences de l'hôpital du Suroît atteignait 240 %.

La saison de la grippe bat son plein

Pour la semaine se terminant le 5 janvier, 1635 cas positifs pour le virus de l'influenza A ont été détectés dans les hôpitaux de la province. Le Dr Gaston DeSerres, médecin-épidémiologiste à l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), explique que la saison de la grippe bat son plein.

« Depuis la fin décembre, on enregistre beaucoup de cas. On peut s'attendre à ce que ce soit comme ça pour tout janvier et une bonne partie de février, voire pour tout février », dit-il. La souche H1N1 de l'influenza sévit cette année, ce qui laisse présager que l'efficacité du vaccin sera bonne, selon le Dr DeSerres, qui précise que les données exactes sur l'efficacité du vaccin seront connues à la fin du mois.

Directeur des urgences pédiatriques à l'Hôpital de Montréal pour enfants, le Dr Harley Eisman note que plusieurs patients se présentent avec des symptômes d'allure grippale ces jours-ci. Or, s'il ne s'agit pas de bébés de moins de 3 mois, la fièvre ne doit pas nécessairement alarmer les parents. « Si l'enfant devient amorphe ou ne boit pas, il faut consulter. Mais sinon, les bons vieux remèdes de grand-mère et les médicaments pour réduire la fièvre suffisent », dit-il.

L'efficacité des cliniques d'hiver remise en question

Mardi, la ministre McCann a annoncé la création de cliniques d'hiver afin de soulager la pression sur les urgences. Il s'agit en fait de Groupes de médecine de famille (GMF) et de cliniques existantes qui prolongeront leurs heures d'ouverture pour accueillir plus de patients ayant des problèmes mineurs comme la gastroentérite ou la grippe.

Le Dr Dufresne estime que cette mesure, quoique bénéfique, ne permettra pas de diminuer les taux d'occupation aux urgences. « Ça ne permettra pas de libérer des lits d'hospitalisation et les patients vont continuer d'occuper des civières aux urgences, incapables de monter aux étages », dit-il.

Un avis partagé par le vice-président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), le Dr Sylvain Dion. « Mais ça permettra de s'attaquer à un problème moins documenté, soit les gens qui attendent des heures dans la salle d'attente avant de voir un médecin dans les urgences », dit-il.