(Montréal) Alors que l’Ordre des infirmières et infirmiers a délivré un nombre record de permis d’exercice pour 2018-2019, le milieu de la santé se plaint toujours d’un manque de ressources sur le terrain. Et seulement 60 % des infirmières travaillent à temps complet.

L’ordre professionnel des infirmières a dévoilé, mardi, son portrait annuel des effectifs pour l’exercice 2018-2019. Ce sont ainsi 76 360 infirmières qui sont inscrites au tableau de l’ordre, dont 75 529 actives. (Les inactives peuvent être retraitées)

L’Ordre a délivré 3893 permis d’exercice cette année. Il s’agit d’un nouveau record, qui dépasse celui de 2015-2016.

Pourtant, malgré ces augmentations, l’Ordre déplore un « manque de ressources criant sur le terrain ».

« On trouve qu’il y a un paradoxe là, parce que nos effectifs nous démontrent qu’on n’arrête pas d’ajouter des infirmières — 3900 au cours de la dernière année — mais, d’autre part, les milieux cliniques nous disent qu’ils sont en situation de pénurie. Alors il y a quelque chose à explorer là, pour voir ce qui peut expliquer ça », a souligné en entrevue Luc Mathieu, président de l’Ordre.

Pourquoi ?

L’une des explications de ce paradoxe réside dans le fait que seulement 60 % des effectifs infirmiers travaillent à temps complet. Et la proportion de temps complet tombe même à 26 % chez les plus jeunes.

La Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) — l’organisation syndicale qui représente 76 000 infirmières, infirmières auxiliaires et autres — a déjà déploré le fait que des directions d’établissements n’ouvrent pas de postes à temps complet.

« Ouvrir des postes à temps complet, oui, mais il faut que ce soit attrayant », a opiné M. Mathieu.

Le rapport de l’OIIQ note une « timide remontée du taux d’emploi à temps complet ». Celui-ci est passé de 58,5 à 59,9 %.

« Il y a certains établissements de santé où il y a peu ou pas de pénurie. La question qu’on peut se poser, c’est : est-ce que ce sont des modes d’organisation de soins, est-ce que ce sont des politiques, des procédures qui sont mises en place qui font en sorte qu’il y en a peu ou pas ? Ou au contraire qui accentuent les situations de pénurie ? » demande-t-il.

Une autre raison déjà évoquée pour expliquer cette faible proportion d’infirmières à temps complet est l’obligation parfois faite à celles qui détiennent un poste à temps complet de faire des heures supplémentaires obligatoires.

« Une infirmière, si elle travaille à temps complet et si elle sait qu’elle va se faire imposer du temps supplémentaire obligatoire, peut-être qu’elle va se dire :’moi je vais prendre un temps partiel trois jours et si je fais deux ou trois TSO, bien je vais avoir travaillé l’équivalent d’un temps complet’ », a illustré M. Mathieu.

Moins de départs

L’Ordre a aussi remarqué une diminution des départs dans toutes les tranches d’âge. Ainsi, 3690 membres qui étaient inscrits pour l’exercice 2017-2018 n’ont pas renouvelé leur inscription en 2018-2019.

De ce nombre, 2033 étaient âgées de 55 ans et plus. Or, le nombre de départs dans cette catégorie d’âge était en constante augmentation depuis sept ans, affirme-t-on dans le rapport sur les effectifs. Il avait atteint un sommet de 2700 en 2017-2018.

L’OIIQ souligne que le taux de rétention dans la profession est de 90 %, malgré les conditions de travail souvent difficiles. « Elles ont à cœur ce qu’elles font », conclut M. Mathieu.

À l’opposé, il y a eu 4965 entrées dans la profession, dont 1121 retours au tableau de l’ordre.