Le bilan de la vague de pneumopathies graves liées au vapotage s’est alourdi, alors qu’on déplore désormais 26 morts et 1300 hospitalisations. Un spécialiste californien de la cardiologie qui a beaucoup publié sur les effets cardiovasculaires du vapotage craint que les poumons ne soient pas les seuls organes à risque. Selon lui, il est trop tôt pour conclure que la cigarette électronique diminue le risque de cardiopathies en par rapport à la cigarette.

De multiples indices

Après le cancer, les cardiopathies. La vague de pneumopathies graves a placé sous les feux des projecteurs les études montrant que la cigarette électronique peut avoir des effets similaires à la cigarette sur les poumons. Cet intérêt médiatique s’étend maintenant à la comparaison entre vapotage et tabagisme quant aux cancers et aux maladies cardiovasculaires.

« Je crois que dans tous les cas, du moins dans mon domaine des cardiopathies et des maladies vasculaires, on constate que la cigarette électronique n’est peut-être pas moins risquée que la cigarette », explique Stanton Glantz, de l’Université de Californie à San Francisco, qui est l’auteur d’une étude ayant conclu le printemps dernier que le vapotage double le risque de crise cardiaque.

Le biologiste spécialisé en cardiologie ajoute que d’autres facteurs de risque cardiovasculaires ont été cernés. « Il y a des études montrant une inflammation dans les vaisseaux sanguins avec la cigarette électronique, une diminution de la fonction vasculaire, un impact négatif sur les plaquettes du sang, tant chez l’homme que chez l’animal. Et il ne faut pas oublier que la nicotine augmente l’activité du système nerveux autonome, ce qui est un facteur de risque cardiovasculaire. »

Une ou deux décennies

Pour le moment, aucune étude épidémiologique n’a pu établir un lien de cause à effet entre le vapotage et les cardiopathies. « On a moins de dix ans de données, dit Stanton Glantz. Avec la cigarette, on parle d’une ou deux décennies avant d’observer des crises cardiaques ou d’autres événements cardiovasculaires. Et on n’a pas d’études longitudinales, où on suit des gens sur 10, 20 ans. On parle de problèmes qui ne surviennent que quelques fois dans la vie d’une personne. Alors il est normal qu’on ne dispose pas de preuves définitives actuellement. »

Critiques

L’étude de M. Glantz en juin dernier dans le Journal of the American Heart Association, qui concluait que le vapotage double le risque de crise cardiaque, a été critiquée parce qu’elle incluait des patients qui avaient eu une crise cardiaque avant de commencer à utiliser la cigarette électronique.

« Nous avons bien indiqué cette limitation, dit M. Glantz. Mais nous voulions voir le risque de récidive chez des gens ayant déjà eu une crise cardiaque. Et nous avons vu un risque plus élevé chez les patients qui vapotent et qui fument. Ça veut dire qu’il y a un risque cardiovasculaire distinct pour le vapotage. »

Deux études publiées cet automne ont tenté sans succès de reproduire les résultats de M. Glantz. « Elles aussi ont inclus des patients ayant eu une crise cardiaque avant que le patient commence à utiliser la cigarette électronique. Mais ça ne leur a pas été reproché. »

En chiffres

32 % : Proportion des victimes de pneumopathies liées au vapotage n’ayant utilisé que du THC (l’ingrédient actif du cannabis) dans leur cigarette électronique

13 % : Proportion des victimes de pneumopathies liées au vapotage n’ayant utilisé que de la nicotine dans leur cigarette électronique

70 % : Proportion des victimes de pneumopathies liées au vapotage qui sont de sexe masculin

80 % : Proportion des victimes de pneumopathies liées au vapotage ayant ont moins de 35 ans

49 ans : Âge médian des décès dans la vague de pneumopathies liées au vapotage

Source : Centers for Disease Control and Prevention