(Québec) Le gouvernement a changé l’an dernier, mais les problèmes rencontrés par les personnes âgées vivant dans un centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) demeurent, quant à eux, inchangés.

Le manque de personnel demeure criant, ce qui entraîne des « conséquences majeures » en termes de qualité de services offerts aux résidants des CHSLD, déplore une fois de plus la protectrice du citoyen, dans son rapport annuel 2018-2019, déposé à l’Assemblée nationale jeudi.

Elle parle de l’urgence d’agir, pour mieux protéger les citoyens parmi les plus vulnérables de la société.

Du même souffle, elle lance un appel au gouvernement en vue d’alléger les exigences administratives (formulaires à remplir, documents à fournir), qui se transforment trop souvent en parcours à obstacles pour bien des gens malades, âgés, handicapés ou démunis.

« Les démarches sont trop lourdes », a tranché la protectrice, Marie Rinfret, en conférence de presse.

D’autant plus que souvent, les exigences gouvernementales ne sont ni réalistes ni nécessaires, et ne tiennent pas compte des capacités des gens, selon ce qu’elle a pu observer.

Ce fut le cas pour plus de 40 000 prestataires de l’aide de dernier recours, l’an dernier. Ils n’ont pas touché le crédit d’impôt auquel ils avaient pourtant droit, parce qu’ils n’avaient pas fourni une déclaration de revenus. Sauf que le gouvernement n’a pas tenu compte que ces personnes démunies n’étaient tout simplement pas « en mesure de satisfaire cette condition ».

Année après année, le Protecteur du citoyen pointe du doigt d’importantes lacunes du réseau de la santé et des services sociaux, visant particulièrement les soins à prodiguer aux personnes âgées en perte d’autonomie, aux malades et aux personnes lourdement handicapées.

Faute de personnel suffisant, des soins requis doivent être annulés ou reportés, incluant les soins d’hygiène, observe Mme Rinfret, dans son rapport.

Les longs délais avant d’obtenir un soin ou un service, incluant une chirurgie, et la qualité des services reçus sont d’ailleurs les principaux motifs de plaintes formulées au Protecteur.

Les CHSLD continuent d’accueillir des personnes lourdement handicapées, souvent jeunes, alors qu’elles ne font pas partie de la clientèle visée, et « sans qu’aucune ressource adaptée à leurs besoins ne soit disponible ».

D’autres, des aînés fragiles, se retrouvent sur des listes d’attente pendant des années, jusqu’à ce que la situation devienne « intenable », au point de nécessiter un placement d’urgence en centre d’hébergement.

Soins à domicile déficients

La pénurie de soins et de services d’aide à domicile est également dénoncée année après année, alors que la demande ne cesse d’augmenter avec le vieillissement de la population. « De trop nombreuses personnes démunies n’ont pas accès aux services auxquels elles devraient avoir droit et leurs proches s’épuisent en attendant du soutien qui ne vient pas », peut-on lire dans le document.

Faute de personnel suffisant, des établissements en sont rendus à exclure de leur clientèle des personnes qui devraient normalement être admissibles à des services, une pratique que dénonce la protectrice du citoyen.

Elle affirme avoir noté dans certains établissements des « écarts importants » entre la politique gouvernementale sur les soins à domicile et les services réellement fournis.

Par exemple, la protectrice du citoyen a dû intervenir pour qu’une personne lourdement handicapée puisse être accompagnée aux toilettes le temps nécessaire. Le temps qu’on lui accordait, en vertu d’une nouvelle norme, était passé de 30 à 10 minutes, une source de grand stress pour cette personne.

Enfants sans statut

Des enfants nés au Québec, donc citoyens canadiens, mais de parents immigrants au statut précaire, ne sont pas admissibles au régime public d’assurance maladie, une aberration selon la protectrice.

Ces enfants, qui résident au Québec, risquent ainsi d’être privés des soins dont ils ont besoin.

L’application de la loi faite par la Régie de l’assurance maladie (RAMQ) « est trop restrictive », juge Mme Rinfret, qui s’interroge à savoir si la RAMQ contrevient ou non aux conventions internationales, en agissant de la sorte.

Jeunes suicidaires

Les services offerts par ailleurs dans les centres de réadaptation pour jeunes en difficulté présentent, eux aussi, « des lacunes importantes ». La façon de gérer le risque de suicide et la prise de médicaments pose problème.

Un exemple : un jeune homme a dû faire deux tentatives de suicide avant que le personnel de son centre de réadaptation contacte l’infirmière chargée d’évaluer le risque suicidaire chez cet adolescent, et ce, même si ses parents avaient sonné l’alarme.

« Catalogue d’horreurs »

Le rapport de la protectrice du citoyen, véritable « catalogue d’horreurs », « déshonore le Québec », a conclu le député solidaire de Rosemont, Vincent Marissal, qui se disait en point de presse à court de mots pour qualifier l’attitude « mesquine » du gouvernement envers les plus démunis de la société.

Le député péquiste de Rimouski, Harold Lebel, a renchéri, appelant le gouvernement à se montrer « plus humain » envers les personnes démunies et dans le besoin, de même qu’à s’efforcer à rendre ses services plus accessibles.

Par exemple, Québec devrait faire en sorte de rendre automatique le versement du crédit d’impôt aux prestataires d’aide sociale, selon lui.