La nouvelle est passée inaperçue, mais Québec et la FIQ ont récemment annoncé 10 autres projets pilotes sur les ratios infirmière-patients, qui doivent permettre d'améliorer enfin les conditions de travail de ces professionnelles en soins.

«C'est important parce que ce sont ces projets qui vont, littéralement, changer les conditions de travail de tout le personnel dans le réseau, surtout pour le personnel affecté directement aux soins, donc infirmières, inhalothérapeutes, préposés. C'est eux que ça va changer pour toujours», a lancé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, interrogé lundi à Montréal, alors qu'il participait à une conférence de presse sur les jeunes et la santé mentale.

Expliqué simplement, un projet de ratio professionnelle en soins-patients vise à tester un nombre X d'infirmières pour un nombre X de patients dans tel type d'unité de soins, par exemple, et de voir si cela convient à tel quart de travail, pour donner tous les soins qui doivent être donnés: changement de pansement, médication à donner à la bonne heure, etc.

Trois de ces nouveaux projets pilotes auront lieu dans des CHSLD (Centres d'hébergement et de soins de longue durée) des régions de Québec, Estrie et Mont-Tremblant; trois dans des départements de chirurgie à l'Hôpital du Sacré-Coeur, en Montérégie-Ouest et en Abitibi-Témiscamingue, et quatre en médecine au CHU de Québec, dans Lanaudière, Chaudière-Appalaches et dans le Bas-Saint-Laurent.

«Il fallait avoir un grand nombre de projets de ratios pour s'assurer de s'attaquer à tous les cas de figure. Donc, on a de gros CHSLD, de petits CHSLD, étages de chirurgie, urgence et ainsi de suite. On a une variété de cas de figure à analyser - ce qui, à la fin, nous permettra de prendre la bonne décision», a illustré le ministre Barrette.

Exemples concrets

Au cours d'une entrevue, la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ), Nancy Bédard, a bien illustré l'importance de ces ratios aujourd'hui: «dans les CHSLD, il y a 30 ans, les gens entraient en voiture et étaient autonomes. Maintenant, ce sont des gens extrêmement malades et on n'a pas revu les ratios. Ils ont besoin de soins infirmiers. Quand on a une infirmière pour 60, 70, 75, 80, 100 patients, elles le disent: elles n'en peuvent plus. Il y a des patients qui sont mal soignés.»

«Il y a 30 ans, quand j'ai commencé en chirurgie, je pouvais avoir 14, 15, 18 patients de soir. Mais la moitié de ces patients-là étaient à sept, huit, neuf  jours postopératoires. Ils se promenaient dans le corridor avec leurs enfants. Aujourd'hui, en chirurgie, les patients restent en moyenne 48, 72 heures pour les mêmes opérations pour lesquelles ils restaient 14 jours avant. Quand ils sortent de l'hôpital, ils sont encore en besoin de soins assez aigus. Et on les transfère vers les soins à domicile. On est dans une acuité de soins qui est totalement différente et on n'a jamais revu l'équipe de soins infirmiers», a souligné Mme Bédard.

Ces 10 nouveaux projets-pilotes devraient débuter d'ici le mois de juin et la phase de pré-implantation dure huit semaines, a précisé Mme Bédard. Mais à cause des vacances d'été, certains projets pourraient ne pas être totalement déployés avant septembre, du moins pour la phase qui nécessite l'ajout de personnel.

«D'ici la fin de l'année 2018, ça devrait être terminé. Ça pourrait déborder en 2019 mais, l'important, c'est que ça commence», a opiné le ministre Barrette.

«L'engagement du ministre c'est qu'à la fin de l'année, quand les 17 projets vont être tout déployés, ça va être un plan majeur de main-d'oeuvre où tous les établissements devront déposer leur plan pour instaurer les ratios» qui auront été établis, affirme Mme Bédard.

La FIQ espère faire inscrire dans une loi ces ratios, afin d'éviter qu'ils soient soumis aux aléas des vagues de compressions budgétaires et des changements de priorités des différents gouvernements.

Les trois premiers projets avaient été annoncés à la fin de mars et les 10 suivants à la fin d'avril. Les quatre derniers le seront cet automne, en inhalothérapie, à l'urgence, en soins à domicile et dans un établissement privé conventionné.