Une infirmière en CHSLD aurait à s'occuper d'environ cinq patients de moins le jour, et le nombre de résidants à sa charge le soir et la nuit serait réduit de moitié, selon les projets-pilotes annoncés par Québec et la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) jeudi.

Une baisse des ratios de patients par infirmière sera en effet mise à l'essai cette année. Treize projets pilotes seront lancés d'ici l'été, quatre autres cet automne, selon une entente intervenue entre Québec et la FIQ.

Le premier projet en unité de médecin se tiendra à l'Hôpital général du Lakeshore, à Montréal, à compter de la mi-avril. Un autre en unité de chirurgie sera lancé à la fin d'avril au centre hospitalier de Trois-Rivières. Un troisième se réalisera au CHSLD de Bagotville, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Les autres projets pilotes seront annoncés plus tard. Ils dureront de six à huit mois.

En conférence de presse aux cotés de la présidente de la FIQ, Nancy Bédard, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, a dévoilé les nouveaux ratios qui seront testés en CHSLD dans le cadre des projets-pilotes.

Ratios actuels en CHSLD

Jour : 25 à 32 patients par infirmière

Soir : 50 à 64

Nuit : 75 à 96

Ratios prévus aux projets pilotes

Jour : 20 à 27 patients par infirmière

Soir : 25 à 32

Nuit : 37 à 44 

« On part avec ça, et on va analyser au fil du temps ce qui est meilleur ou moins bon, de façon la plus objective possible. Mais, clairement, avec ces ratios de départ, vous voyez qu'on a eu ensemble la volonté d'améliorer les conditions de travail des infirmières », a affirmé M. Barrette.

La machine est lancée pour abaisser les ratios, et Québec ne peut plus faire marche arrière selon lui. « On est engagé sur une voie de laquelle on ne sortira pas : on va améliorer les conditions, on comprend que cette amélioration passe par des ratios qui sont différents, et on va arriver à destination. C'est le jour 1 d'un changement qui va s'exercer pleinement », a-t-il insisté. Il a souligné qu'au terme des projets-pilotes, de nouveaux ratios seront décrétés en vertu d'une directive ministérielle, ce qui a eu l'heur de plaire à Nancy Bédard. Elle souhaite toujours néanmoins que ces ratios soient enchâssés dans une loi.

Pour mettre en oeuvre de nouveaux ratios, « des centaines, peut-être des milliers de personnes », infirmières et préposés aux bénéficiaires, devront être embauchées, a indiqué M. Barrette. Un plan sur la formation du personnel sera convenu avec le ministère de l'Éducation pour que les embauches puissent se faire « le plus rapidement possible ». « Je ne peux pas mettre en place un ratio s'il n'y a pas de personnel pour prendre les postes », a affirmé le ministre, laissant entendre que l'opération prendrait tout de même un certain temps.

Les établissements retenus par Québec et la FIQ pour les projets-pilotes ont le personnel disponible afin de mener l'opération.

Les embauches nécessiteront « au moins une centaine, et probablement des centaines de millions de dollars ». « L'argent est prévu » au budget, a assuré M. Barrette, refusant de préciser le montant. La Presse évoquait 150 millions de dollars à la mi-mars, ce que le ministre n'a ni confirmé ni infirmé.

« C'est enfin l'espoir de régler la surcharge de travail », a lancé Nancy Bédard. « C'est un pas de plus vers la sécurité et la qualité des soins et des services dans notre réseau public de santé. »

Dans un cri du coeur qui a fait le tour du Québec en janvier, la jeune infirmière Émilie Ricard se disait « vidée » à la fin de son quart de travail de nuit dans un CHSLD. Elle avait eu «  70-76 patients » à sa charge. Elle déplorait ses conditions de travail et ironisait sur le « succès » de la réforme du ministre Barrette dans son message publié sur Facebook.