Les locaux du Regroupement pour la Trisomie 21 étaient inhabituellement occupés, hier. Dans celui du fond, entre les classeurs habituels et les bureaux, on entendait un bourdonnement inusité pour ce genre d'endroit : celui de machines à tatouage. En vue de la Journée mondiale de la trisomie 21, une centaine de personnes se sont fait tatouer trois chevrons pour la cause.

Robin Harvey attend son tour. Il a fait le choix audacieux de se faire tatouer les trois chevrons qui représentent les trois chromosomes 21 sur le côté droit du cou. Son fils Lennox a 5 mois. Il vit avec la trisomie 21.

« Eux, quand tu les regardes, tu le vois dans leur visage qu'ils ont la trisomie 21. Alors moi, je voulais qu'on le voie, mon tattoo, quand on me regarde », a expliqué M. Harvey avant d'aller s'allonger sur la table du tatoueur Jessi Lee Birch.

L'artiste et son acolyte Tina Louise Art ont passé la journée à tatouer les trois mêmes lignes. Tous deux ont perdu le compte. Ils le font pour la cause.

« Ma fille devait avoir la trisomie 21. Ma blonde et moi, on a décidé de poursuivre la grossesse. On était prêts à vivre avec. Finalement, elle ne l'a pas. Elle a 5 ans aujourd'hui », raconte le tatoueur, qui ne s'est pas fait prier quand le studio Gipsy Tattoo lui a demandé s'il voulait consacrer gracieusement son dimanche à cette cause.

DU TEXAS À L'ABITIBI

Le mouvement du tatouage est né au Texas, initiative d'un groupe de mamans qui a fait boule de neige sur les réseaux sociaux et s'est transporté jusqu'au Québec. En vue de la Journée mondiale de la trisomie 21, différents regroupements québécois ont tâté l'intérêt de familles impliquées. La réponse a été impressionnante.

« Ici, à Montréal, nous avons un regroupement de 40 ou 50 parents d'enfants ayant une trisomie 21. Mais on a eu une centaine d'inscriptions pour le tatouage. On a des grands-parents, des amis, des parrains, des marraines », s'est réjouie Suzi Costa, vice-présidente du conseil d'administration du Regroupement pour la Trisomie 21 (RT21) et organisatrice de la journée, qui envisage de répéter l'expérience l'an prochain.

« C'est vraiment une façon pour nous de faire connaître la trisomie 21. C'est un sujet tabou et des fois, les gens ont tendance à se cacher », dit Suzi Costa, vice-présidente du conseil d'administration du Regroupement pour la Trisomie 21.

« Alors c'est une campagne de sensibilisation davantage qu'une campagne de financement », a expliqué Mme Costa, ajoutant que des 40 $ payés par les participants, 34 $ couvraient les frais de matériel et 6 $ allaient aux organismes locaux. L'événement se tenait simultanément à Québec, à Sherbrooke, à Gatineau et en Abitibi, où pas moins de 120 personnes sont passées sous l'aiguille.

« Il n'y a pas plus de cas là-bas, non. C'est la communauté qui s'est tenue et qui soutient la cause », a expliqué Mme Costa, ajoutant que la semaine dernière, 120 personnes de la petite municipalité de Maniwaki avaient fait de même.

« JE VEUX QUE ÇA PARAISSE »

Des tatouages temporaires étaient aussi offerts pour les enfants ou ceux qui veulent soutenir la cause sans toutefois marquer leur corps de façon permanente. Sandrine et Charlie ont 10 et 12 ans. Elles gardaient le leur pour mercredi, jour officiel de soutien à la cause. Dans la salle d'attente, elles s'occupaient de leur petit frère Éloi, pour qui leurs parents se faisaient tatouer.

« J'ai choisi le poignet. Je veux que ça paraisse. Le but, c'est que les gens nous en parlent pour faire de la sensibilisation », a expliqué Dominique Bélair, maman d'Éloi, pendant que son conjoint Jason se faisait tatouer sur un mollet.

Selon l'organisatrice, environ 75 % des gens qui ont décidé d'embarquer dans l'événement se faisaient tatouer pour la première fois. C'est le cas de Colette Prévost, une grand-maman dont le petit-fils Justin est né avec un chromosome supplémentaire sur la 21e paire de chromosomes.

« J'ai toujours voulu un tatouage. C'était un rêve de jeunesse, mais je me disais que j'étais rendue trop vieille. Cette fois-ci, c'était idéal : ça me fait plaisir et c'est pour une cause que j'ai à coeur », a raconté la femme de 65 ans pendant que sa fille Julie montrait son nouveau tatouage à son fils. Le petit Justin était bien impressionné par le nouveau dessin que sa mère arborait au poignet et qu'elle gardera à jamais.

Photo Olivier Jean, La Presse

Colette Prévost, grand-maman de Justin, s'est fait tatouer pour la première fois.

Photo Olivier Jean, La Presse

« J'ai choisi le poignet. Je veux que ça paraisse », a expliqué Dominique Bélair, maman d'Éloi, pendant que son conjoint Jason se faisait tatouer sur un mollet.