À peine deux mois après le déménagement de l'hôpital Notre-Dame vers le nouveau CHUM, près d'une trentaine d'infirmières qui avaient fait le saut dans le nouvel hôpital ultramoderne du centre-ville ont décidé de... rentrer au bercail, soit de retourner travailler dans leur vieil hôpital.

Pour expliquer ces nombreux transferts, le syndicat des professionnels en soins du CHUM qui représente les infirmières montre du doigt la « surcharge de travail » due notamment à la grandeur des lieux - les infirmières marchent beaucoup plus dans un quart de travail - et à un nouveau système d'approvisionnement du matériel de soins.

Le manque d'accessibilité à des stationnements dans le secteur du nouveau CHUM est aussi un problème, souligne le président du syndicat, Guy Brochu.

« Beaucoup de nos infirmières vivent sur la rive sud de Montréal et ont de jeunes enfants. Elles doivent déposer les enfants à la garderie qui ouvre à 7 h, traverser le pont, se trouver un stationnement et arriver au travail pour 7 h 45, c'est serré et parfois même impossible, dit-il. Autour du CHUM, les stationnements sont rares et coûtent une fortune alors qu'à Notre-Dame, il y a plein de stationnements dans les environs. »

Et même si le coût du stationnement est exorbitant près du nouveau CHUM, le salaire de l'infirmière, lui, ne change pas d'un hôpital à l'autre, ajoute M. Brochu.

D'AUTRES SOURCES D'IRRITATION

Autre source d'irritation majeure pour les infirmières selon leur syndicat : les chariots qui servaient de réserves de matériel de soins ont disparu des étages dans le nouveau CHUM. L'approvisionnement se fait désormais grâce à des véhicules autoguidés.

« Il manque souvent du matériel sur les étages. C'est plus criant aux urgences et au bloc opératoire où il y a plus d'imprévus. Les infirmières courent partout pour trouver ce qui leur manque, et pendant ce temps-là, les soins sont retardés ou prennent plus de temps à être donnés », explique M. Brochu, du syndicat.

Sans compter que les infirmières marchent plus qu'avant, car les lieux sont vastes, indique le président du syndicat. La cafétéria est tellement loin de certaines unités - et tellement achalandée - que les infirmières n'ont pas assez des 45 minutes accordées pour la pause du dîner, selon M. Brochu. « Si vous voyiez les files le midi, on se croirait aux caisses du Costco dans le temps des Fêtes », illustre-t-il.

Ainsi, depuis deux mois, 26 infirmières sont retournées occuper un poste au sein du CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal qui englobe l'hôpital Notre-Dame après avoir travaillé quelques semaines au nouveau CHUM. Seulement trois ont fait le chemin inverse.

AUCUNE PERTE D'AVANTAGES

Ces infirmières se sont ainsi prévalues d'une entente négociée entre les syndicats et les hôpitaux qui leur permettait de « changer d'idée » et ainsi retourner à leur hôpital d'origine sans perdre leurs avantages liés à leur ancienneté.

Les infirmières ont jusqu'au 28 février pour se prévaloir de cette entente. Rappelons que l'hôpital Notre-Dame est resté ouvert après le déménagement des patients vers le CHUM, mais l'établissement de santé a une nouvelle vocation communautaire. Il est désormais géré par le CIUSSS du Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal.

La direction du CHUM affirme ne pas être « surprise » par le nombre d'infirmières qui quittent le nouvel hôpital ultramoderne de la rue Sanguinet pour retourner dans leur vieil hôpital.

« Dans un nouvel hôpital, le personnel doit apprivoiser de nouveaux espaces ; s'adapter aux nouvelles technologies. Cette période d'adaptation est une source de motivation pour certains, mais peut aussi être plus difficile pour d'autres », indique une porte-parole du CHUM, Lucie Dufresne.

Il est vrai que le système d'approvisionnement en matériel a changé et que les lieux sont plus vastes, reconnaît Mme Dufresne. « En fait, tout est nouveau. C'est une période d'adaptation pour tout le monde », martèle-t-elle.

Le CHUM est en période de recrutement « massif », souligne Mme Dufresne, des communications. Ainsi, 282 infirmières ont été embauchées d'avril à décembre derniers. Puis, 86 autres uniquement ce mois-ci. Cinquante autres devraient être embauchées en février. Au total, un peu plus de 2000 infirmières y travaillent actuellement.

« Le CHUM a le personnel nécessaire pour assurer les soins aux patients », assure la porte-parole de l'hôpital.

« Embaucher, c'est bien, mais encore faut-il les garder », conclut pour sa part M. Brochu, président du syndicat des professionnels en soins du CHUM.