Après avoir écarté l'idée dans les derniers mois, Québec accepte finalement d'obliger le personnel des CHSLD à dénoncer les actes de maltraitance dont il est témoin.

La décision survient à la suite de pressions exercées par l'opposition, le Conseil pour la protection des malades et l'ex-ministre libérale Marguerite Blais. Et, dans les derniers jours, La Presse a fait la lumière sur une histoire de maltraitance dans un CHSLD de Beauceville. Le comité des résidants de cet établissement, où une préposée aux bénéficiaires a maltraité des aînés avant d'être poussée à la retraite début mars, a réclamé le signalement obligatoire. Cette employée avait été dénoncée par des collègues de travail en février dernier. Or, la direction avait été alertée de « gestes inadéquats » un an plus tôt, mais elle n'avait pas pris les moyens nécessaires pour empêcher la préposée de récidiver, a révélé un rapport d'enquête de la commissaire aux plaintes.

Jeudi, la ministre responsable des Aînés, Francine Charbonneau, a déposé en Chambre un amendement à son projet de loi 115 « visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité ».

Cet amendement instaure « l'obligation de signaler certains cas de maltraitance ». 

Tout employé « qui a un motif raisonnable de croire qu'une personne est victime d'un geste singulier ou répétitif ou d'un défaut d'action appropriée qui porte atteinte de façon sérieuse à son intégrité physique ou psychologique est tenu de signaler sans délai ce cas pour les personnes majeures suivantes :

• toute personne hébergée dans une installation maintenue par un établissement qui exploite » un CHSLD ;

• toute personne en tutelle ou en curatelle ou à l'égard de laquelle un mandat de protection a été homologué ».

Le signalement doit être fait au commissaire local aux plaintes de l'établissement si la victime y reçoit des services ou, dans les autres cas, à la police.

Cette obligation « s'applique même aux personnes liées par le secret professionnel, sauf à l'avocat et au notaire, qui, dans l'exercice de leur profession, reçoivent des informations concernant un tel cas ».

Le gouvernement se donne le droit, par règlement, d'appliquer l'obligation de signalement dans le cas « d'autres personnes recevant des services de santé et des services sociaux ».

L'amendement ne précise pas ce qu'il adviendrait d'un employé qui ferait défaut de signaler un acte de maltraitance. Cela relèverait de la prérogative de l'employeur, comprend-on.

La ministre n'introduit pas de sanctions pénales - des amendes - contre les auteurs de maltraitance.

Réaction de la Coalition avenir Québec« Oui ça avance, mais on n'est pas rendu au fil d'arrivée. Ce que je veux, c'est qu'une personne majeure vulnérable dans une installation autre qu'un CHSLD ait ce même levier de protection [...]. Je ne veux pas des aînés vulnérables mieux protégés à un endroit qu'à un autre. Il faut que la ministre précise cet aspect-là. Et aussi, il n'y a pas de sanctions pénales. Je ne comprends pas qu'on ne se donne pas cet outil dissuasif. » - Le député caquiste et porte-parole pour les aînés, François Paradis