Les médecins devraient être exemptés de l'application de la future loi 62, selon la Fédération des médecins spécialistes du Québec.

La présidente de l'organisme, qui regroupe quelque 10 000 médecins spécialistes, la docteure Diane Francoeur, est venue exprimer mardi, en commission parlementaire, d'énormes réserves envers le projet de loi 62 sur la neutralité religieuse de l'État et l'encadrement des demandes d'accommodement religieux.

Elle a rappelé à la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, qui pilote le dossier, que les médecins étaient des travailleurs autonomes et qu'ils ne devaient pas être d'aucune façon assimilés à des employés de l'État.

La docteure Francoeur exhorte la ministre Vallée à tout mettre en oeuvre pour éviter que se multiplient les demandes d'accommodement religieux en milieu hospitalier, un phénomène en croissance qui risque de nuire à la qualité des soins, au moment où la pression sur le réseau de la santé est déjà énorme.

«Tout le monde a les pattes aux fesses dans les hôpitaux. On a autre chose à faire», s'est indignée la docteure Francoeur.

Dans son mémoire, la fédération attire l'attention du gouvernement sur le fait que les médecins, trop souvent débordés, doivent déjà composer avec des exigences et des pressions indues «qui vont bien au-delà des simples demandes d'accommodement pouvant être traitées de manière raisonnable ou raisonnée».

Concrètement, la volonté du gouvernement d'accommoder les patients devant observer des diktats religieux peut se traduire dans les faits par une forme de discrimination envers les médecins masculins ou féminins, selon le cas. Quelques exemples: «Des patientes qui, sous la pression de leur conjoint, refusent de subir des traitements médicalement requis, même en situation critique, parce que le médecin est un homme. Pressions exercées dans certains départements hospitaliers afin que soient établies des listes de garde parallèles pour assurer la présence de médecins de sexe féminin, même si celles-ci sont encore en formation. Pressions des parents exigeant que ce soit un médecin de sexe masculin qui prennent en charge leurs enfants. Bref, de telles situations n'ont pas leur place en centre hospitalier», écrit la FMSQ.

Le secteur de la gynécologie et de l'obstétrique est particulièrement frappé par ce genre d'exigences, a déploré la docteure Francoeur, elle-même une gynécologue-obstétricienne.

Des demandes «irréalistes» exercent des pressions inutiles sur la répartition des ressources, et risqueraient de miner la qualité des soins si on y donnait suite, surtout en situation d'urgence, a-t-elle fait valoir.

«Les préceptes culturels et les considérations religieuses s'opposent au fondement même de la médecine et du Code de déontologie qui régit la profession» en s'opposant à toute forme de discrimination, a fait valoir la docteure Francoeur.

La FMSQ estime donc que toute personne ayant recours aux services de santé «peut et doit les recevoir sans exiger d'accommodement qui pourrait venir alourdir le processus de prestation des soins».

Il va de soi qu'un médecin doit pratiquer à visage découvert, a par ailleurs dit la gynécologue-obstétricienne.