Le 25 janvier 2011, Félix Martel se blessait assez gravement à la cheville en jouant au hockey pour avoir besoin d'une chirurgie. Mais c'est seulement près de cinq ans plus tard, en juillet dernier, qu'il a reçu un appel du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) pour une consultation en vue d'obtenir éventuellement un rendez-vous pour une intervention.

Selon des données compilées par La Presse canadienne, seulement dans les hôpitaux montréalais, les patients attendent en moyenne plus de dix semaines pour obtenir une chirurgie orthopédique - ce qui inclut les interventions aux genoux, aux hanches et aux chevilles comme c'est le cas de M. Martel. Ces données ne tiennent toutefois compte que de l'attente à partir du moment où la demande pour les soins requis est entrée dans la liste centralisée de l'hôpital.

Certains hôpitaux de la métropole ont des listes d'attente avec des centaines de patients. À l'hôpital général de Montréal - l'un des établissements du CUSM - la durée d'attente est de dix semaines et 708 personnes figurent sur la liste d'attente, selon les plus récentes données disponibles en date de juillet.

À titre comparatif, les gens de Montréal patientent en moyenne moins de sept semaines pour des chirurgies aux cataractes. Pour les chirurgies générales, on parle d'une durée d'attente moyenne de 9,8 semaines.

Le portrait ne semble pas plus rose à l'extérieur de la métropole. Au Centre hospitalier de l'Université Laval à Québec, la durée d'attente moyenne est de 19 semaines pour des interventions orthopédiques et 622 patients sont sur une liste d'attente. À l'Hôtel-Dieu de Sherbrooke, la durée d'attente est de 15 semaines, et le nombre de personnes sur la liste d'attente atteint 447 patients.

La moyenne d'attente toutes chirurgies confondues dans l'ensemble du Québec est de 8,8 semaines, selon les derniers chiffres du ministère de la Santé. Ni le ministère ni le Commissaire à la santé ne disposent de données sur la moyenne d'attente pour les chirurgies orthopédiques à l'échelle de la province.

En Ontario, le temps d'attente pour une chirurgie à la cheville est évalué à 160 jours - soit un peu plus de 22 semaines.

Pour sa part, Félix Martel a été relativement chanceux malgré tout. En 2011, après avoir essuyé des refus dans plusieurs cliniques, il a contacté un ami orthopédiste, qui a pu au moins l'ausculter et lui donner une prescription pour qu'il puisse passer un examen de résonnance magnétique.

Après avoir subi son examen, son ami lui a dit qu'il avait bel et bien besoin d'une chirurgie et comme il n'avait jamais lui-même effectué une telle intervention, il lui a fourni une liste de médecins «superspécialistes» pouvant l'opérer à la cheville.

«Il m'a dit qu'au Québec, il y a quatre gars dans le système public et un au privé qui font ça», a relaté M. Martel.

Il s'est toutefois une fois de plus heurté à un mur: aucun d'entre eux n'a pu l'aider. «Il y a même une secrétaire dans une clinique d'orthopédie qui m'avait dit: »Monsieur, bien franchement, vous devriez apprendre à vivre avec votre infirmité parce que vous ne serez jamais vu«», s'est-il souvenu.

L'option d'une chirurgie dans le secteur privé avait rapidement été écartée - vérification faite par La Presse canadienne, une telle intervention coûte au moins 4350 $.

Son ami médecin a donc décidé d'effectuer ce type d'intervention pour la première fois, puisqu'il était lui-même spécialisé dans les opérations au genou. La chirurgie a finalement eu lieu en février 2012.

M. Martel estime que sa qualité de vie a été fortement affectée pendant cette année. «La douleur a fini par s'estomper, mais je n'avais plus de stabilité dans la cheville. Une craque dans le trottoir me faisait tomber», a-t-il souligné, ajoutant qu'il n'a pas pu faire de sport pendant toute cette période.

Le cabinet du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, n'a pas voulu commenter le cas particulier de M. Martel. Toutefois, une porte-parole a souligné que les délais d'attente au Québec étaient inférieurs à ceux de l'Ontario.