Les médecins spécialistes seront désormais tenus d'accueillir des patients référés par les médecins de famille, a indiqué vendredi le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, levant le voile sur l'entente conclue avec la Fédération des médecins spécialistes dans la foulée de l'adoption du projet de loi 20 plus tôt cette semaine.

L'entente prévoit aussi qu'à compter de 2016, il n'y aura plus de frais accessoires pour les patients qui ont une échographie dans un bureau de radiologue. L'acte sera rétribué par la RAMQ, mais les médecins acceptent qu'ils soient financés à même leur masse salariale actuelle. Le réarrangement - 30 millions - ne coûtera pas un sou de plus au gouvernement, assure le ministre Barrette. Comme c'est le cas actuellement, la radiographie ne sera pas assurée lorsque réalisée par un «non-radiologue».

Un article de la nouvelle loi 20, l'article 39, permet au ministre de réaffecter unilatéralement une partie de la masse salariale des médecins pour le bien de la population. Ce pouvoir était vu comme une lourde menace par les médecins. M. Barrette s'engage à ce que l'article 39 ne soit utilisé que pour la rétribution des écographies en cabinet pour les radiologues.

Le ministre gardait le profil bas toutefois. Refusant de dire qu'il avait remporté un pari, il a souligné sa satisfaction d'avoir convaincu les médecins de changer leur façon de faire. «J'ai forcé les gens à changer d'approche», a-t-il soutenu. Les médecins «ont le fardeau de livrer ça, et s'ils ne le font pas, la loi est là pour être appliquée le 1er janvier 2018. Ceux et celles qui pensent que je n'appliquerais pas la loi parce que c'est une année électorale, ils rêvent en technicolor !»,a lancé Gaétan Barrette.

D'ici janvier 2017, les médecins spécialistes s'engagent à réserver des plages horaires spécifiques pour la clientèle des médecins de famille. Les patients seront identifiés selon l'urgence de l'intervention, «un avancement significatif pour la population», estime M. Barrette. Actuellement, l'accès est restreint et il faut souvent passer par l'urgence pour voir ultimement un spécialiste. «La fluidité des patients à l'intérieur de l'hôpital sera grandement améliorée», a promis le ministre.

Les spécialistes s'engagent aussi à prendre rapidement en charge les patients référés par les urgentologues - des généralistes. Le spécialiste pourra aussi, dans des situations extrêmes, se voir désigner comme «médecin traitant» appelé à prendre en charge formellement des patients. Les besoins diffèrent selon la spécialité, rappelle-t-il, en cardiologie, en pneumologie et en gastro-entérologie cet accès plus rapide au spécialiste sera déterminant pour les patients.

Pour Diane Lamarre, critique péquiste à la Santé, il faudra voir les détails de l'entente écrite. Pour elle, le ministre Barrette voulait avant tout obtenir le feu vert pour pouvoir permettre l'imposition de frais accessoires dans son projet de loi 20, comme monnaie d'échange dans ses négociations avec les spécialistes. Les changements imposés pour la radiographie auraient pu être étendus à d'autres spécialités qui imposent des frais, les ophtalmologues par exemple, a-t-elle relevé. Pour elle, le mécanisme de «priorisation» mis en place dans l'entente pour que les spécialistes reçoivent des patients est bien moins contraignant que les «cibles» proposées par le gouvernement à l'origine.  «Il y a suffisamment d'argent dans le système, il faut simplement mieux faire les choses et on ne retrouve pas ça dans l'entente», de résumer Mme Lamarre.

Pour la CAQ, le député François Paradis relève que le gouvernement brise une promesse électorale, l'imagerie magnétique devait être aussi couverte par la mesure qui ne couvre que les écographies. «Pour les patients en charge aujourd'hui, il n'y aura pas une grande différence», d'ajouter M. Paradis, relevant que les changements sur l'accès aux spécialistes s'appliqueraient en 2017. Le gouvernement n'est pas parvenu à réduire la liste des patients en attente d'une chirurgie, a-t-il martelé.