Bien qu'il soit dans la ligne de mire du Collège des médecins depuis 2009 en raison de son «manque de compétence», le Dr Nelson Ubani a continué - et ce, malgré plusieurs avertissements - à pratiquer la médecine familiale dans son cabinet du quartier Côte-des-Neiges.

Le Dr Ubani, qui avait déjà été radié pour une période de deux ans, de 2011 à 2013, s'est récemment vu imposer une nouvelle radiation temporaire de six mois.

De son côté, le médecin de 77 ans accuse son ordre professionnel d'être «raciste».

Pour continuer à pratiquer, le Dr Ubani est «prêt à bafouer tous les règlements, mettant ainsi en danger le public à qui il prodigue des soins», indique le président du conseil de discipline du Collège des médecins, Me François D.  Samson, dans sa décision écrite rendue publique le 22 juin dernier.

«Les patients ne sont absolument pas en mesure d'évaluer les compétences de celui-ci et se confient à lui à un moment souvent où ils sont vulnérables», rappelle Me Samson.

Engagement non respecté

Le conseil de discipline précise que le Dr Ubani a «très peu de crédibilité» à ses yeux.

«La preuve a révélé qu'il a été mis en garde à plusieurs reprises et que ses obligations lui ont été rappelées sans que cela ne donne de résultat tangible, et ce, à de nombreuses reprises depuis 2009, poursuit le président du conseil de discipline. Malgré ces interventions, l'intimé [le DUbani] a continué à prodiguer des soins à de nombreux patients alors qu'il n'avait ni les compétences ni le droit de le faire en médecine familiale.»

En 2009, le Dr Ubani s'était engagé à limiter sa pratique à des interventions mineures (son champ d'expertise) et à ne pas prescrire de médicaments. Or, il n'a pas respecté son engagement et a tout de même continué à soigner des patients à son cabinet et à leur prescrire des antibiotiques dans ce qui avait toutes les apparences d'une clinique sans rendez-vous, a constaté le conseil de discipline.

Le médecin s'était aussi engagé à faire un stage en médecine familiale avant de pouvoir reprendre sa pratique en cabinet. Or, deux ans plus tard, malgré des avertissements du Collège des médecins, le Dr Ubani n'avait toujours pas fait son stage et avait continué à voir des patients (523 patients de juin 2011 à novembre 2011).

C'est ainsi qu'on lui a imposé une première radiation temporaire de deux ans, qu'il a contestée, mais qui a été confirmée par le Tribunal des professions.

En 2013, le médecin a obtenu le droit de pratiquer de nouveau, mais à certaines conditions. En janvier 2014, soit cinq ans après s'être engagé à le faire, il a finalement entrepris un stage en médecine familiale, auquel il a échoué.

Puis, en janvier dernier, le médecin ne s'est pas présenté à l'audience du conseil de discipline, mais il a reconnu, par le truchement de son avocat, avoir contrevenu au code de déontologie de sa profession. Le Dr Ubani s'est ainsi vu imposer cette nouvelle radiation de six mois. Il n'aura plus le droit de pratiquer ailleurs qu'en milieu hospitalier.

«Je ne veux plus rien savoir de la pratique de médecine familiale, a expliqué le Dr Ubani en entrevue avec La Presse. J'ai fait ça pour aider d'anciens patients qui ne se trouvaient pas de médecin. Tout ce que je veux, c'est continuer à pratiquer des opérations mineures.»

Accusation de discrimination

Le médecin de 77 ans accuse le conseil de discipline du Collège des médecins de faire de la discrimination à son endroit parce qu'il est noir. «Il y a des médecins qui ont tué leurs patients en faisant une erreur médicale et qui ont eu des radiations moins sévères. Moi, je n'ai tué personne», a-t-il dit à La Presse.

Le Collège des médecins du Québec ne commentera pas les allégations de discrimination du Dr Ubani, nous a indiqué sa coordonnatrice aux communications, Caroline Langis. Lorsque la radiation provisoire prendra fin, le Dr Ubani ne retrouvera pas «automatiquement» son droit de pratique, assure Mme Langis. Le médecin devra respecter toutes les conditions imposées par le conseil de discipline, dont celle de ne pas pratiquer ailleurs qu'en milieu hospitalier, où il pourra être supervisé, précise la porte-parole du Collège des médecins.