Alors que les médecins du Québec se disent très ouverts aux changements, la population n'en croit rien, révèle un sondage mené pour le compte de l'Association médicale du Québec (AMQ), qui tient aujourd'hui et demain son congrès annuel à Montréal.

L'AMQ entame actuellement une profonde réflexion sur le «nouveau contrat social» qui devrait lier la population et les médecins. La Presse a obtenu en exclusivité le sondage mené pour le compte de l'AMQ auprès de 1045 médecins omnipraticiens et spécialistes québécois, 620 futurs médecins et 1025 Québécois adultes.

Le directeur général de l'AMQ, Normand Laberge, se réjouit de constater que la majorité de la population appuie les privilèges des médecins. Il précise que la majorité des gens qui jugent ces privilèges trop importants n'ont pas de médecin de famille. «La réaction de la population est donc le symptôme de quelque chose», dit-il.

Changements et délégation

L'enquête révèle également que 57% des Québécois estiment que les médecins sont «fermés» à d'éventuels changements concernant la pratique de la médecine. Au contraire, les médecins s'estiment ouverts dans une proportion de 86%. Et si 96% des médecins disent vouloir travailler avec d'autres professionnels, la population croit à 50% qu'ils sont peu disposés à le faire.

L'AMQ croit que ces différences de perceptions s'expliquent par différents facteurs. «Les médecins sont peut-être plus fermés qu'ils ne le croient. Mais peut-être également que c'est la structure de travail ou la rémunération qui sont en cause», note M. Laberge.

La confiance des médecins envers les autres professionnels n'est toutefois pas entièrement au rendez-vous: seulement 19% des médecins croient que les infirmières et les pharmaciens peuvent soigner les patients tout aussi bien qu'eux, contre 58% de la population.

Des salariés

Le sondage de l'AMQ montre que la majorité de la population souhaite un changement dans le mode de rémunération des médecins. Près de la moitié des répondants estiment que les médecins devraient continuer d'être des travailleurs autonomes, mais avec des règles de fonctionnement dictées par le gouvernement. Et 16% estiment que les médecins devraient être carrément des employés de l'État. Les médecins, eux, souhaitent à 59% conserver leur pratique de travailleur autonome.

M. Laberge estime que la population souhaite un changement, car elle est insatisfaite de l'accessibilité aux soins de santé. «Les gens se disent: "Je n'ai pas ce que je veux. Ça prend un changement"», dit-il. Lors du congrès d'aujourd'hui et demain, différentes pistes de solution seront explorées. «On est à un point de rupture. Il faut agir», croit M. Laberge.

Un exemple du sondage

Les privilèges des médecins sont:

Justifiés étant donné leurs obligations

• Population: 58%

• Médecins: 72%

Insuffisants étant donné leurs obligations

• Population: 11%

• Médecins: 13%

Trop importants

• Population: 22%

• Médecins: 13%

Je ne sais pas

• Population: 11%

• Médecins: 2%