Amélie Taillon avait 8 ans quand on lui a diagnostiqué sa première tumeur dans un pied. Puis quelques années plus tard, on lui a découvert plusieurs tumeurs dans les seins, l'obligeant à subir une double mastectomie. Aujourd'hui âgée de 30 ans, cette résidante de Laval a subi plus de 15 opérations.

Comme environ 500 000 Québécois, Mme Taillon est atteinte d'une maladie rare. «Je souffre du syndrome de Cowden. Ça implique que j'ai plusieurs tumeurs, partout. Certaines restent bénignes, d'autres non», dit-elle.

Aujourd'hui, une centaine de personnes atteintes de maladies rares et des spécialistes seront réunis à Montréal pour discuter de leurs difficultés et pour réclamer une stratégie nationale sur les maladies rares. «Le principal objectif serait de réduire les délais avant d'avoir un diagnostic», mentionne, Gaël Ouellette, présidente du Regroupement québécois des maladies orphelines.

Malchanceuse?

Mme Taillon n'a obtenu son diagnostic qu'à l'âge de 25 ans. «On me disait toujours que j'étais juste malchanceuse d'avoir toutes ces tumeurs», témoigne-t-elle. En plus de sa double mastectomie, Mme Taillon s'est fait enlever l'utérus, la glande thyroïde et a été traitée pour deux cancers de la peau. «J'ai eu quelques emplois, mais j'ai de la difficulté à les conserver, dit Mme Taillon qui est travailleuse sociale de formation. Je suis toujours à l'hôpital, en opération ou en complications. J'ai en moyenne 10 rendez-vous par mois. J'ai 14 spécialistes dans mon dossier».

Mme Taillon vit depuis un an de l'aide sociale pour contrainte sévère à l'emploi. «Ce qui est le plus dur, c'est de toujours devoir se battre dans le système. Parce qu'on ne rentre dans aucune catégorie. Aucun programme n'est prévu pour nous», dénonce-t-elle.

Mme Ouellette ajoute que certains patients doivent payer pour des traitements ou des équipements, car ils se heurtent à des séries de refus dans le système puisque leur maladie est souvent inconnue.

Perte musculaire

Véronique Jetté, 27 ans, est atteinte de myasthénie et est en attente d'une confirmation d'un diagnostic de syndrome d'Ehlers-Danlos.

Les premiers symptômes se sont manifestés quand elle avait 12 ans. Adepte de soccer et de taekwondo, elle a commencé à se sentir constamment fatiguée et à se blesser à répétition. «J'avais beaucoup de crampes aussi. Puis j'ai développé une myopie qui dégénérait rapidement. Je n'ai pas pu terminer mon secondaire 5 parce que j'étais trop épuisée et que je passais mon temps à l'hôpital», raconte la jeune femme.

On croit alors qu'elle souffre de sclérose en plaques. Mais les tests s'avèrent négatifs. Ce n'est qu'à l'âge de 26 ans qu'elle aura finalement son diagnostic. «Pendant toutes ces années, on a pensé que j'avais juste besoin d'attention. On m'a fait évaluer en psychiatrie. Ç'a été un véritable «combat extrême» de faire reconnaître ma maladie», dit-elle.

Aujourd'hui, Mme Jetté se déplace en déambulateur ou en fauteuil roulant. Sa vue est également très basse. «Je me bats tout le temps pour avoir de l'aide. Mais puisque je ne souffre pas d'une maladie «ordinaire», je ne rentre dans aucun programme. Je dois tout le temps me battre pour avoir le moindre soutien», dénonce-t-elle.

Pour Mme Ouellette, la création d'une stratégie nationale aiderait les personnes atteintes de maladies rares dans leur recherche de service. «On devrait établir une définition de maladie rare et ce serait reconnu dans le réseau. On pourrait aussi offrir des cours qui devraient être donnés aux futurs médecins dans les universités», plaide-t-elle tout en ajoutant qu'une trentaine de pays à travers le monde possèdent de telles stratégies sur les maladies orphelines.

Au ministère de la Santé et des services sociaux (MSSS), on explique des démarches ont déjà été entreprises «pour mettre sur pied une stratégie québécoise pour la prise en charge des maladies rares.» «Des contacts ont été établis, notamment avec des groupes de recherche dans le domaine, et un comité interne a été créé au MSSS. Toutefois, au cours de la dernière année, d'autres investissements et travaux ont dû être priorisés et la stratégie québécoise n'a pas encore vu le jour», explique la porte-parole du MSSS Marie-Claude Lacasse. Différentes initiatives ont été prises par Québec au cours des dernières années, dont le financement du site Orphanet, qui répertorie les maladies rares.

Au cabinet du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, on mentionne qu'une «mise à jour du dossier» sera remise au ministre au cours des prochains mois.

Quelques exemples de maladies rares

1. Syndromes d'Ehlers-Danlos

Groupe hétérogène de maladies héréditaires du tissu conjonctif. Plusieurs personnes atteintes de ces syndromes présentent une hyperlaxité des articulations et une hyperextensibilité de la peau.

2. Syndrome de Freeman-Sheldon

Syndrome très rare de contractures congénitales multiples. Ce syndrome est également appelé «face du siffleur» dû à l'apparence de plusieurs personnes qui en sont atteintes. Ces personnes présentent aussi souvent un pied bot et des contractures articulaires.

3. Hypertrichose

Les personnes atteintes de cette maladie présentent des poils de 3 à 5 cm de long sur la totalité du corps, excepté les paumes des mains et les plantes des pieds.

4. Ostéogénèse imparfaite

Mieux connue sous le nom de maladie des os de verre. Les personnes qui en souffrent ont les os très fragiles, une faible masse osseuse et une tendance aux fractures.

5. Myasthénie

Maladie neuromusculaire auto-immune qui se manifeste par une faiblesse musculaire variable, mais non douloureuse.

Source: Portail des maladies rares