Le cas de Mai Duong, cette jeune maman de 34 ans d'origine vietnamienne qui espère trouver un donneur compatible de cellules souches pour survivre à une leucémie, interpelle les membres de sa communauté. Plus d'une centaine d'entre eux se sont déplacés dimanche lors d'une journée de sensibilisation, au centre-ville de Montréal.

Alors que la rue Sainte-Catherine était fermée à la circulation pour céder la place à une foire commerciale et que plusieurs amateurs de soccer faisaient la file devant les bars remplis à craquer pour regarder la finale de la Coupe du monde, ils étaient tout de même plus d'une centaine réunis dans un petit local pour écouter Héma-Québec expliquer la problématique des dons de cellules souches pour les minorités ethniques.  

Lorsque La Presse est arrivée sur place, le corridor étroit qui menait à la salle était bondé de personnes d'origines vietnamiennes qui remplissaient des cartes d'inscription au registre des donneurs de cellules souches. « On a entendu parler de ça sur Facebook, et on s'est senti immédiatement interpellé », a expliqué Mai Anh Nguyen, 24 ans. 

« Je pense que c'est grâce aux médias sociaux qu'on a su que la communauté ne donnait pas assez. Avant, on ne s'en rendait pas compte », a ajouté son amie Marie Tran, 23 ans. 

Et elles ont raison. Selon Héma-Québec, les personnes asiatiques représentent moins d'un demi de 1% du registre québécois. À l'échelle internationale, c'est plutôt 1%, alors que les personnes caucasiennes forment 75% du bassin mondial des donneurs. 

Face à ces statistiques sans pitié, Mai Duong n'a toujours pas réussi à trouver un donneur compatible. Aujourd'hui, le temps presse. Ses amies se mobilisent et tentent de sensibiliser les membres de sa communauté.

À quelques mètres plus loin dans le corridor, Christiane Rochon parle avec deux hommes et les remercie d'être venus remplir les formulaires afin d'amorcer le processus menant à l'inscription au registre. À notre demande, la dame de 37 ans a donné les dernières nouvelles sur sa bonne amie Mai. 

« Elle va bien, malgré tout. Elle rit, elle fait des blagues, elle a un moral de feu et sent qu'elle est bien entourée. Son équipe médicale est extraordinaire et n'en revient pas de ce qu'on fait pour elle. Mais maintenant, après avoir été si sollicitée par les médias, elle doit se reposer », a-t-elle expliqué.

« Il faut qu'elle se trouve un donneur right now. Ça presse », a-t-elle ajouté, sachant malgré tout que le processus pour y arriver est semé d'embûches. 

Un enjeu de compatibilité

Le directeur des communications d'Héma-Québec, Laurent-Paul Ménard, confirme cette problématique. 

« Pour avoir une compatibilité parfaite, il faut que six gènes concordent entre le donneur et le receveur. Un médecin peut décider de faire une greffe même si la compatibilité n'est pas parfaite, mais on diminue les chances de succès », a-t-il expliqué lors d'une entrevue téléphonique. 

Si une compatibilité entre un donneur inscrit et un receveur est trouvée, le donneur peut effectuer son don de deux façons. Dans le premier cas, qui requiert une intervention chirurgicale sous anesthésie en centre hospitalier, les médecins effectuent une ponction dans la moelle osseuse. Si l'opération ne laisse aucune séquelle, une douleur est toutefois ressentie pendant quelques jours, forçant le patient à stopper ses activités pour un moment.

La deuxième option est un prélèvement sanguin à l'aide d'une centrifugeuse qui retient les cellules souches et retourne les composantes sanguines au patient. L'opération peut durer près de six heures et nécessite la prise d'un médicament qui stimule la production de cellules souches et cause des douleurs aux articulations pour quelques jours. 

« Au Québec, on parle d'une centaine de greffes de cellules souches par année, alors que nous comptons 47 000 inscriptions au registre. Au final, environ 3% d'entre eux sont finalement appelés à donner. Pour s'inscrire, une personne doit être âgée entre 18 et 35 ans. Elle demeurera par la suite inscrite jusqu'à l'âge de 55 ans », a expliqué M. Ménard. 

L'important est que la personne inscrite donne effectivement si elle est un jour appelée. « Pour le receveur, c'est une question de vie ou de mort », a dit le directeur chez Héma-Québec. 

Dans le cas de Mai Duong, son diagnostic sans pitié a interpellé Thérèse Nguyen, l'une des coorganisatrices de la journée de sensibilisation, dimanche. Si elle ne la connaît pas personnellement, elle souhaite que les membres de sa communauté répondent à l'appel et se mobilisent.

« Il faut provoquer un effet de masse. Que le bouche-à-oreille mène à des résultats concrets », espère-t-elle.