Des milliers de patients pourraient ne plus avoir accès à des chirurgies au cours des prochaines années dans la région de Montréal, craint l'opposition caquiste.

L'entente controversée entre l'hôpital Sacré-Coeur et la clinique de chirurgie Rockland MD prendra en effet fin en septembre et ne sera pas renouvelée, comme l'a confirmé le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, jeudi.

Pas moins de 1500 chirurgies d'un jour étaient effectuées chaque année pour le compte de Sacré-Coeur dans cette clinique, et la Coalition avenir Québec (CAQ) plaide que l'hôpital ne pourra faire face à cet afflux de patients s'ils sont rapatriés.

Pour sa part, le ministre Barrette est resté inébranlable. Jeudi, en commission parlementaire sur l'étude des crédits de son ministère, il a maintenu que l'entente ne sera pas renouvelée à son échéance le 4 septembre 2014, parce que les coûts par chirurgie unitaire sont plus élevés à Rockland MD que dans le réseau public, selon les études dont il dispose.

«Je n'ai pas de problème, moi, à augmenter la capacité par (l'entremise de) Rockland MD, ou n'importe qui d'autre, dans la mesure où le prix est compétitif, a dit M. Barrette en commission parlementaire. Ces documents (les études) concluent qu'il y a un différentiel significatif.»

Le porte-parole de la CAQ, le député de La Peltrie, Éric Caire, a brandi une étude qui suggère le contraire. L'étude qui porte l'entête de l'hôpital Sacré-Coeur soutient qu'une chirurgie d'un jour coûte 2679,81 $ à Sacré-Coeur et 2456,22 $ à Rockland MD, donc 223 $ de moins, si on exclut les charges non considérées dans les établissements du réseau de la santé, comme le loyer, l'amortissement, etc.

M. Barrette a refusé de dévoiler ses études, mais a assuré que l'aide des hôpitaux Fleury et Jean-Talon suffira à répondre à la demande supplémentaire. Le député caquiste a répliqué avec une lettre du président du conseil d'administration de l'hôpital, qui demande la reconduction de l'entente parce que l'établissement ne pourra réintégrer l'ensemble des chirurgies, parce que la mise à niveau de ses installations n'est pas complétée.

«Vous coupez un service en demandant à l'hôpital de l'assumer, alors qu'ils ne sont pas prêts à le faire», a fait valoir le député de La Peltrie en demandant au ministre de rendre publiques ses études.

«Jusqu'à preuve du contraire, ça coûte moins cher à Rockland MD», a-t-il dit.

Selon M. Caire, la direction de l'hôpital lance ainsi un cri d'alarme au ministre. Mais M. Barrette a quant à lui affirmé que l'étude proposée par M. Caire vient du corps médical de l'établissement et non de l'administration hospitalière. Il a aussi indiqué que l'entente avait un objectif compensatoire, mais que maintenant, elle pourrait équivaloir à un avantage indu accordé à un centre hospitalier.

Rappelons que l'entente avec la clinique Rockland MD a été mise en place en 2008, pour régler les problèmes d'achalandage à Sacré-Coeur. De 2008 à 2013, le ministère de la Santé a versé 18 millions $ à Rockland MD pour faire effectuer plus de 8000 chirurgies.

Par ailleurs, les deux partis d'opposition, le PQ et la CAQ, ont aussi reproché au ministre de ne s'être pas encore entendu avec les pharmaciens propriétaires à propos de la mise en oeuvre de la loi 41. Cette loi leur permet notamment de prolonger l'ordonnance d'un médecin ou de l'ajuster, ou même de prescrire un médicament si aucun diagnostic n'est requis, tout cela afin de désengorger le système de santé.

Or la loi devait entrer en vigueur en septembre 2013, mais cela a été reporté, car les négociations sur la tarification notamment n'avancent pas. Gaétan Barrette a blâmé le gouvernement péquiste précédent pour la détérioration du climat des négociations, et il affirme qu'il s'emploie à rebâtir les relations.

«Je vais citer Ginette Reno: l'essentiel c'est d'être heureux, a dit M. Barrette, en réponse à une question d'Éric Caire. Je peux vous assurer que dans les négociations les deux parties doivent être heureuses, et actuellement ce n'était pas le cas. Maintenant on n'est pas encore totalement heureux les uns les autres. Mais on va travailler pour qu'à la fin il y ait une entente bénéfique pour toute la population.»

À M. Caire qui faisait valoir que ces délais privaient le Québec d'économies importantes, M. Barrette a répondu qu'il n'y aurait pas d'économies dans le système, au bout du compte. Selon M. Caire, le ministre veut donc ainsi économiser et c'est donc le retour du rationnement des services.

«Il dit que les actes faits par les pharmaciens vont libérer du temps aux médecins, qui vont donc faire d'autres actes et, au total, cela va coûter plus cher au Trésor québécois, parce qu'on va offrir plus de services et soigner plus de patients, a-t-il dit. C'est un rationnement budgétaire, c'est le retour des quotas!»