Un député fédéral va déposer lundi un projet de loi d'initiative parlementaire pour qu'il soit possible de rémunérer les mères porteuses.

Dean Del Mastro, un député ontarien indépendant qui faisait jusqu'à récemment partie du caucus conservateur, veut ainsi modifier la loi fédérale sur la procréation assistée, adoptée en 2004.

Il n'est pas illégal d'avoir recours aux mères porteuses au pays mais la rémunération de ces femmes est interdite. Certains frais peuvent toutefois être remboursés, mais cet aspect reste imprécis. M. Del Mastro veut aussi qu'il soit possible de payer les agences privées qui s'occupent de ces arrangements.

Au Québec, les contrats de mères porteuses ne sont pas reconnus: il n'est pas possible de forcer leur respect devant les tribunaux si l'une des deux parties change d'idée. Les règles varient selon les provinces.

La Cour suprême du Canada a aussi eu à se pencher sur la loi sur la procréation assistée et a rendu une importante décision en 2010. Québec a alors réussi à faire invalider plusieurs dispositions sur les nouvelles techniques de reproduction et les cliniques de fertilité puisqu'elles relèvent des champs de compétence des provinces.

Ottawa a néanmoins conservé son rôle sur certains aspects: il peut continuer à édicter les règles sur le remboursement des dépenses engagées par les mères porteuses.

Soulignant que le Canada reconnaît les contrats rémunérés conclus à l'extérieur du pays, M. Del Mastro estime qu'il est temps de «mettre fin à l'hypocrisie» et de permettre le paiement pour ces ententes.

«Qu'on veuille l'admettre au non, les Canadiens retiennent les services de personnes à l'extérieur du Canada», a-t-il souligné en entrevue avec La Presse Canadienne.

Le député explique que d'avoir des enfants est le rêve de bien des familles mais que des contraintes physiques en empêchent plusieurs de le réaliser.

Il parle de «familles», mais il n'est pas question de limiter l'accès aux familles traditionnelles uniquement. Il souligne ne pas avoir défini le terme «famille», justement pour reconnaître la diversité des unités familiales et y inclure les personnes seules et les couples de même sexe. Sa proposition vise à éliminer l'interdiction de rémunération, sans plus, dit-il

Après la modification de la loi sur la procréation assistée, il reviendrait aux provinces d'ajuster leurs lois sur les contrats et de mettre en place les système de surveillance qui encadreraient la pratique.

Le député fédéral reconnaît qu'une préoccupation demeure: que des femmes pauvres et vulnérables soient exploitées. Mais il croit que de nombreuses juridictions, comme la Californie, ont su mettre en place des balises efficaces pour empêcher ce type d'abus et éviter «toute commercialisation du corps humain».

«Beaucoup de femmes le font par altruisme, et non pas pour l'argent», dit-il. Mais il y a néanmoins des coûts associés à la grossesse, fait-il valoir.

Son initiative ne fait pas suite à des démarches de citoyens ayant cogné à sa porte pour que la loi soit changée, reconnaît-il.

«J'ai eu une expérience personnelle avec des amis qui étaient incapables de concevoir un enfant par eux-mêmes. Ils ont dû franchir beaucoup de barrières, c'était très dispendieux, mais aujourd'hui, ils forment une très belle famille», dit-il.

M. Del Mastro affirme avoir discuté du projet de loi avec certains de ses collègues et qu'aucun ne s'y est opposé. Mais il ne s'attend pas à un consensus lors du vote.

Puisqu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire - et non du gouvernement - il pourrait s'écouler un certain temps avant que la mesure législative ne soit mise à l'ordre du jour.