Entreprendre une cure pour en finir avec sa dépendance à l'alcool et aux drogues n'est pas une mince tâche. Sevrage pénible, isolement temporaire et thérapies sont à l'ordre du jour. Malgré tous ces efforts, les rechutes demeurent fréquentes. La Presse s'est entretenue avec Anne Elizabeth Lapointe, directrice générale adjointe de la Maison Jean Lapointe.

Q: Quelles sont les raisons qui conduisent une personne à entreprendre une cure?



R: Des événements précis poussent souvent une personne à entreprendre une thérapie, alors qu'elle n'a plus le choix. Cette personne compose notamment avec les répercussions de sa consommation et est placée devant des ultimatums. Il est rare qu'une personne se lève un bon matin et décide de se prendre en main. Normalement, elle risque de perdre son emploi, son conjoint ou ses enfants, sa santé est en jeu, bref, elle est poussée vers la thérapie.

Q: À la Maison Jean Lapointe, vous offrez une thérapie fermée. Qu'est-ce que ça représente pour le patient?



R: Durant les premiers jours, il y a d'abord un sevrage, où la substance est éliminée du système de l'individu. Les symptômes associés sont les tremblements, les nausées et les maux de tête. Selon la substance, la personne peut avoir de la difficulté à dormir, ou au contraire, être très fatiguée. Par la suite, une thérapie de groupe et une thérapie individuelle sont entreprises. Ce cheminement doit amener l'individu à prendre conscience de la gravité et des conséquences de sa consommation. Il faut aussi identifier les éléments déclencheurs pour qu'à sa sortie, le patient ne se retrouve pas dans un contexte similaire qui le pousserait à nouveau vers l'alcoolisme et la toxicomanie.

Q: Arrive-t-il qu'une personne se présente pour régler un problème d'alcool, mais nie avoir aussi un problème de toxicomanie?



R: Il arrive en effet qu'une personne commence une cure et un sevrage pour un problème d'alcool, mais nie par exemple que sa consommation de cocaïne soit problématique. C'est un discours qu'on entend. Mais lors d'une cure fermée, la personne devra tout arrêter et ne pourra plus consommer. Cela dit, certains croient pouvoir continuer à gérer le tout à la sortie.

Q: Que conseille-t-on aux personnes qui sortent d'une cure fermée? Doivent-ils reprendre leur travail et leurs occupations comme avant?



R: Pour certaines personnes, leur emploi les met à risque. Si par exemple vous êtes alcoolique et que vous travaillez dans un bar, vous devriez manifestement changer de «job». Les gens qui consomment et qui ont un cercle d'amis qui consomment doivent aussi envisager de changer de réseau social. Le plus urgent est de cerner les facteurs de risque et de les éliminer.

Q: Quels sont les traits communs des personnes alcooliques ou toxicomanes?



R: Il est difficile de généraliser, mais on dit souvent que l'alcoolisme et la toxicomanie sont des maladies d'émotions, donc liée à une difficulté à gérer ses émotions et à résoudre des problèmes d'une façon que l'on pourrait considérer comme «normale». Ces personnes ont dans l'ensemble une propension accrue à l'impulsivité. Ainsi, pour le contrôle, c'est difficile.

Q: Combien peut coûter une cure comme celles que vous offrez à la Maison Jean Lapointe et quel est votre taux de succès?



R: Dans un centre privé comme le nôtre, les gens doivent payer des frais, contrairement à un centre public, où c'est gratuit, mais où le temps d'attente est surtout plus long. Chez nous, cela coûte 3900 $. On peut appeler et être admis le jour même. D'autres centres exigeront toutefois 10 000, 15 000 ou même 20 000 $. [...] Ensuite, nous sommes conscients que la rechute existe, mais après quelques embûches, la personne arrive à l'abstinence durable. Si une personne revient deux ou trois fois en thérapie, ce n'est jamais un échec.